A bas la médiocrité !
par Chotarax
jeudi 9 mars 2006
A l’heure où nombre d’artistes joignent leur voix à celle des professionnels de l’industrie du disque pour combattre le téléchargement et la licence globale, il convient de prendre de la hauteur, et de s’interroger sur la place de l’art et sur les aspirations artistiques.
Qu’est-ce donc que la musique ? Qu’est donc l’aspiration d’un vrai musicien ou de tout artiste ?
Ne serait-ce donc pas d’être écouté, découvert, vu, admiré ? Apparemment non ! Face à l’amendement voté récemment, par députés de droite comme de gauche, en vue d’instituer une licence globale dépénalisant le peer-to-peer, beaucoup de prétendus artistes ont dévoilé leurs vraies aspirations ! Faire du fric ! Ah, mais quelle belle motivation ! Quelle noble conviction pour sous-tendre leurs « créations » !
Je m’imagine Homère s’interrogeant avant de narrer L’Iliade et L’Odyssée sur la question de ses droits d’auteur ! Ou Mozart mort dans la misère ! Ou Voltaire refusant que ses lumières soient diffusées auprès d’un peuple qui ne pouvait pas le rémunérer...
Tout grand auteur ou compositeur se livre à l’art de manière spontanée, sans arrière-pensée. Il poursuit une quête personnelle vers la création. La destinée qui lui insuffle inspiration, talent ou génie, décide également de sa postérité, de son universalisme, de son éternité. Or, aujourd’hui, quel est donc l’état de fait ? Quels sont ces gens se proclamant les représentants de la création artistique, avec leurs doléances mercantiles ?
Il convient de réaliser que bien avant Internet, l’invention des radios K7 permettait à n’importe qui d’enregistrer à volonté toute musique diffusée sur les antennes radio. Or, lorsqu’on sait que ce sont les « artistes installés » qui, aujourd’hui, montent le plus au créneau pour fustiger le téléchargement, cela a tout de même un air de ridicule. Ce sont les auteurs des chansons diffusées des dizaines de fois par jour, sur les mêmes radios, qui viennent nous dire que nous sommes des monstres qui les empêchons de poursuivre leur création, non pas en tarissant leur inspiration, mais en diminuant (fictivement) leurs bénéfices !!!??? (« Fictivement », car j’ai du mal à imaginer que tout ce qui est téléchargé serait transformé en ventes du côté des maisons de disques ! C’est justement grâce à la gratuité que nombre de personnes découvrent des talents qu’ils n’auraient jamais eu l’occasion d’entendre si elles avaient ouvrir leur porte-monnaie...)
Quel respect pourrais-je donc avoir pour des hommes ou femmes d’une telle bassesse ? Si minables qu’ils oublient déjà que, pour la totalité d’entre eux, le succès n’est dû qu’aux relais incessants et gratuits des médias de masse que sont la télévision et la radio !
Quel est donc leur but ? Faire de l’argent comme leurs maisons de disques !
Mais heureusement, ils ne sont pas les seuls représentants de la « création ». Nombre de jeunes artistes musiciens ou écrivains ont bien saisi l’enjeu d’Internet : un média interplanétaire permettant la diffusion de l’art et de la culture. Quelles sont les aspirations de ceux-ci ? Faire partager leurs richesses, leur inspiration, leur sensibilité au monde entier. Le but d’un musicien n’est-il pas de remplir des salles de concert ? Partager son art avec son public. Echanger des émotions. Transmettre sa passion, et recevoir l’écho plein de gratitude des gens qui l’aiment. Avec une diffusion gratuite, ce but est plus vite atteint, et tout le monde y trouve son compte : auditeurs ravis que leur vie soit enrichie des mélodies qu’ils aiment, et artistes remplissant salles de concert et gagnant leur vie noblement, dans l’exercice de leur art, devant ces mêmes personnes qui les ont découverts grâce à Internet.
Le but d’un écrivain est d’être lu pour des siècles et des siècles (amen...) par le plus grand nombre, par différentes générations. Ce sont là les « vrais artistes », ceux que l’art pousse à la création sans questionnement, de manière innée, comme il a déjà poussé tous les génies des civilisations passées dont les richesses constituent le plus beau patrimoine de l’humanité...
Il me semble indispensable de prendre de la hauteur face à ce sujet, au risque de n’entendre que les médiocres commerçants (maisons de disque) et autres prétendus artistes (mentionnés plus haut) installés dans le confort de l’industrie du disque, et qui veulent nous faire oublier que la création et le partage des richesses culturelles ne sont pas toujours passés par le lien commercial et la logique du profit.