« Assistanat social » contre la « guerre »

par zahoda
vendredi 24 avril 2015

Il est commun d’entendre que le « Revenu de Solidarité Actif, » ou « RSA, » et les diverses allocations sociales, dont celles « Au Logement, » et la « Couverture Maladie Universelle, » ou « CMU, » ruineraient la France ou tout du moins plomberait son économie, alors que c’est tout l’inverse ! Car les 32 milliards que cela coûte à l’année, sont immédiatement captés soit par la grande distribution et le petit commerce de quartier, Total et les fournisseurs de téléphonie, soit, pour les milliards des allocations logements, par les petits propriétaires ou les sociétés privées HLM. Et l’Etat en reprend une part non négligeable par la TVA… 20% ! (Les chiffres de cet article sont arrondis car ils varient d’année en année.)

En effet, qu’en est-il réellement des dépenses des bénéficiaires des allocations ? Vont-ils planquer les 32 milliards en Suisse ou sur un rocher du Golfe du Mexique protégé par des caïmans ? Vont-ils les investir dans le chocolat de Côte d’Ivoire ou le pétrole libyen ?

D’abord l’allocation logement, ce sont rien de mois que 15 milliards par an qui reviennent en totalité aux propriétaires des logements ! Les milliards versés par l’Etat n’enrichissent certainement pas les pauvres et les fainéants, mais bien les propriétaires fonciers, les investisseurs et les hommes d’affaires. Si d’aventure l’Etat stoppait les allocations logements, le cours de l’immobilier locatif s’effondrerait d’autant ! Soit les loyers seraient maintenus à leur niveau actuel mais des centaines de milliers de familles et d’handicapés seraient expulsées faute de pouvoir les payer, soit les loyers s’effondreraient pour rejoindre la réalité du marché !

Prenons le cas d’un homme qui achète à crédit un petit appartement en province 25 000 euros, et le loue généreusement 250 euros par mois à un allocataire handicapé et sans travail, bénéficiaire d’une allocation logement de 250 euros. En dix ans de loyers, son appartement aura été payé à 100% par les allocations logements, tandis que le locataire handicapé sera toujours locataire sous assistanat car le loyer, qui aura augmenté en dix ans, sera toujours trop cher pour lui ! Et en 40 ans, l’appartement aura été payé 4 fois ! Qui donc est le bénéficiaire final de l’allocation d’Etat ? Qui est le « profiteur ? »

Idem pour le RSA. 2 milliards par an que les allocataires dépensent en totalité dans les commerces pour de la nourriture, des vêtements, des couches, du gasoil, de la téléphonie ou des clopes ! L’Etat récupérant 20% de TVA sur le tout, si ce n’est 80% sur le gasoil et les clopes, c'est-à-dire l’équivalent de deux ou trois mois de RSA par an ! Mais tout le reste est récupéré par les commerçants, les assurances, EDF, Véolia, les fournisseurs de téléphonie et d’Internet, etc. Les banques récupèrent également l’équivalent d’un mois de RSA par an, en frais de gestions et intérêts des micro-découverts qu’elles accordent à des taux généreusement prohibitifs et scandaleux pour aider les allocataires les plus pauvres à boucler leurs fins de mois… Un véritable scandale.

Idem enfin pour la CMU, 15 milliards d’euros par an qui sauvent le secteur hospitalier de la faillite ! Car les soins dont bénéficient les allocataires sont payés par la Sécurité sociale au secteur hospitalier et médical, qu’il soit publique ou privé. Les milliards que rapporte la CMU donnent de l’air aux finances de ce secteur au bord de l’implosion. Quant au « trou de la sécu, » il n’est pas dû à un excès de dépenses mais à un défaut de reversement des taxes sur le tabac et l’alcool par l’Etat, qui consacre l’argent à un tout autre commerce, que nous aborderons plus bas.

Rappelons ici que le budget de l’Etat est d’environ 350 milliards et celui de la Sécu d’environ 450 milliards, soit 800 milliards pour 365 jours ! 32 milliards pour des millions de personnes, hommes, femmes, enfants, sans travail, beaucoup de malades, vivant tous sous le seuil de pauvreté, n’est-ce pas le moins… ?

En outre, ces allocations sociales, en plus d’apporter plusieurs milliards par mois au marché intérieur français, permettent aux français qui travaillent de continuer à travailler dans un climat social serein. Sans RSA, les mendiants remplieraient les rues de France et l’on verrait des enfants en guenilles voler aux étals des marchés. Sans allocations logements, en plus de l’effondrement de l’immobilier, nous verrions le retour des bidonvilles dangereux et insalubres, des faubourgs-ghettos et des bas-fonds. Et des tombereaux de « morts de froid » en hiver comme au temps de « l’Appel » de l’Abbé Pierre en 1954 ! Triste retour en arrière ! Sans CMU des milliers de mendiants malades tendraient leurs mains en montrant leurs plaies béantes et leurs sourires édentés à la foule, comme en Afrique, en Inde, ou dernièrement en Espagne et en Grèce. Et ce sera l’explosion des vols, des agressions, des cambriolages dans cette course à la survie que deviendrait la vie en France pour des millions de désespérés et leurs familles sans aucunes ressources. Que deviendraient les banlieues actuellement sous perfusions ? Où en serons-nous du grand banditisme ? Les français qui ont un travail autant que les petits propriétaires devraient réfléchir à deux fois avant de se plaindre qu’on aide trop les pauvres…

« L’assistanat social » coûte 32 milliards par an ? Et bien je prétends que si on doublait ces allocations on relancerait l’économie française de la plus juste des manières car cela profiterait à tous. Les pauvres bénéficieraient d’un accès à la société de consommation et des loisirs dont ils sont tenus à l’écart, (si tant est que ce soit la panacée…,) mais aussi, et surtout, cela profiterait largement aux commerçants et aux propriétaires, aux hôpitaux et aux banques, qui se partageraient cette nouvelle manne mensuelle garantie par l’Etat !!! Qui retrouverait des points de croissance par retour de TVA grâce à cette relance réelle de la consommation ! Est-ce illogique d’imaginer qu’une société progresse à la faveur du développement de sa classe la plus pauvre ?

D’ailleurs c’est tout une partie du débat politique d’aujourd’hui face à la crise financière de l’Etat français… par ceux-là même qui l’ont provoqué ! Rigueur ou investissement ? Et si le choix politique se porte sur l’investissement, dans quel secteur ? Les infrastructures ? L’industrie ? La recherche ? L’innovation ? Débat intéressant et nécessaire mais il semble que la tendance soit à la « rigueur sociale » d’une part, et à l’investissement dans le secteur industriel d’autre part… Refus navrant, idéologique et égoïste d’investir sur les plus pauvres !

Cette inversion des valeurs humanistes les plus élémentaires sur laquelle prospèrent des édiles populistes est une injure à la pensée française. Autant qu’aux valeurs universelles de liberté, d’égalité et de fraternité que la France prétend porter et représenter à la face du monde...qui n’est pas dupe ! Injure aux valeurs chrétiennes également, dont les élites politiques et médiatiques se font tantôt les chantres tantôt les bourreaux, selon le sens du vent… Un peu comme les romains qui d’abord crucifièrent Jésus, paix sur lui, avant d’en faire un « fils de Dieu chrétien » à leur service, dans un obscur « concile » trois siècles plus tard !!! Ni charitable, ni chrétienne, ni républicaine, ni humaniste, la stigmatisation de « l’assistanat social » est une injure à l’intelligence du cœur autant qu’à celle du portefeuille ! C’est une grosse connerie !

Si les 32 milliards par an « d’assistanat social » ruinent la France, bien qu’ils soient redistribués immédiatement dans l’économie française, pourquoi celle-ci emprunte-t-elle entre 80 et 150 milliards par an pour boucler son budget ? Si 32 milliards « profitent » aux sept millions de français vivant sous le seuil de pauvreté, à qui donc « profitent » les 768 milliards qui restent ???

Et combien la France reverse-t-elle d’intérêts aux « banques internationales » chaque année ? Rien de moins que 45 milliards d’euros par an seulement pour les intérêts de la dette !!! C'est-à-dire quasiment la moitié de ce qu’elle leur emprunte chaque année !!! N’est-ce pas un formidable tour de passe-passe ? Une formidable arnaque bancaire au niveau d’un Etat sur le dos du peuple qui paye l’impôt ? Je tiens à dire ici qu’un gouvernement incapable de gérer la France avec un budget de 800 milliards d’euros pour 365 jours, est un gouvernement suspect de démence ou de corruption. Et que la stigmatisation du coût des pauvres et des immigrés n’est qu’un vulgaire attrape-nigaud, un enfumage, pour cacher au peuple la défaillance, la corruption et le pillage généralisé des « élites ! » C’est un peu trop facile de dire que la crise est de la faute aux 32 milliards consacrés aux plus pauvres… C’est faux, démagogique et lamentable.

Mais toute cette réflexion est utopique et vaine car l’humanité a choisi une autre voix que l’humanisme, l’entraide et la modération dans ses appétits. La France est corrompue jusqu’à la moelle et la société matérialiste de la consommation et des loisirs est un naufrage moral. On prête à Malraux de nous avoir averti que le 21ème siècle « sera spirituel ou ne sera pas, » et l’on voit bien sur quel chemin nous sommes lancés à toute vapeur !

La guerre ! La guerre ! La guerre ! On pointe sans rougir un doigt accusateur sur les allocations dont « profitent » les pauvres, mais on détourne le regard des centaines de milliards jetés dans des guerres abjectes provoquant la mort et l’effondrement de tout un pan de l’humanité.

Le budget militaire français est « officiellement » de 30 milliards d’euros par an, auquel il faut ajouter une part du budget du ministère des affaires étrangères, une part du budget de la « coopération » en Afrique, une part du budget de la recherche spatiale et nucléaire, et une part du budget du ministère de l’Intérieur qui gère le renseignement, etc. Sans oublier le budget du ministère des anciens combattants ! Ce qui nous conduit plus près du chiffre de 50 milliards par an consacrés directement ou indirectement à la guerre… Auxquels on peu encore ajouter les « lois de programmations » aux budgets inexistants et l’économie souterraine des ventes d’armes, du pétrole et de la drogue, et les participations en capitaux dans des industries d’armements. Que la France ne s’étonne pas si elle apprend un jour que les guerres contemporaines lui ont plutôt coûté entre 80 et 100 milliards d’euros lourds par an ! (600 milliards de francs !) Et qu’elles ne rapportent rien d’autre que la destruction de l’Orient et la ruine de l’Occident. Et si l’on considère que la France est en guerre depuis la première guerre du Golfe en 1991, cela fait 25 ans que ça dure…

Les français se plaignent de devoir serrer la ceinture mais ils votent et ils revotent pour des hommes politiques qui ont jeté 2 500 milliards d’euros dans la guerre en 25 ans ! Plus que ce que représente la dette totale française sur la même période… Quand donc les français réfléchiront ???

Au seul profit des vendeurs d’armes et de pétrole ! Car cet argent de la guerre, comme celui du RSA, n’est pas perdu pour tout le monde… Il ne se volatilise pas… Il est redistribué entre marchands d’armes et de pétrole à qui l’Etat passe commande ! Des entreprises privées d’armes et de pétrole en partie propriétés de banques privées « internationales » qui prêtent l’argent à l’Etat français pour acheter des armes et du pétrole pour faire la guerre ! Il faut donc encore ajouter une grande partie des « intérêts annuels de la dette » sur la facture et le budget global de la guerre ! Oui, les français qui fustigent le RSA sont des aveugles qu’on enfume !

Einstein n’était pas qu’un scientifique génial inventeur de la bombe nucléaire, il était surtout un grand pacifiste et antimilitariste radical. Au point de refuser d’être le premier président israélien en 1948, compte tenu de la violence par laquelle ce soi-disant « Etat » s’était construit, bien qu’il l’ait lui-même appelé de ses vœux de juif-allemand en exil. La théorie d’Einstein la plus utile à l’humanité n’est pas celle de la « Relativité » mais bien plus celle de la « Démilitarisation des Etats. » Est-ce illogique ? Pourquoi Einstein n’est-il plus un géni dès qu’il parle de briser les reins des marchands d’armes pour le bienêtre de l’humanité ?

Les français devraient se retourner sur leur propre histoire et celle de la civilisation occidentale. Combien d’empires se sont effondrés à cause de leur fuite en avant dans la guerre ? Rome ! Royaume de Jérusalem ! Bonaparte ! Hitler ! Empire colonial français ! Que peuvent donc attendre les français des guerres contemporaines de l’OTAN en Orient, si ce n’est la ruine, la mort, la destruction et la chute de leur âge d’or ? 

Je veux conclure ce vain rappel à la paix et au partage par ce qui devrait être une lapalissade : Les « allocations sociales » sont un pilier de la paix sociale et civile et un motif de progrès et de civilisation qui devraient être augmentées, tandis que les budgets de la « Défense » sont un pilier de la guerre et de la corruption qui devraient être diminués, voir annulés totalement selon la meilleure théorie d’Albert Einstein...

A chacun de choisir ce qu’il veut promouvoir et ce dont il veut jouir pour ce siècle. Ce n’est pas tout de se frapper la poitrine en pleurant sur la Shoah d’il y a 70 ans, à chacun de prendre sa responsabilité d’être humain devant les guerres dévorantes de son siècle. Collabo ou résistant aux crimes de guerre et contre l’humanité de l’OTAN ?

Ceux qui feront le choix de la paix, devant les hommes comme devant Dieu, doivent alors réfléchir sérieusement à la voie Gandhienne de la « non-violence-active, » qui passe par l’abstention, la grève de l’impôt et la désobéissance civile tant que durent la guerre et ses faramineux budgets. Une sorte de refus politique et moral de la guerre est nécessaire pour l’avenir de ce siècle.

Ceux qui feront le choix de la paix doivent aussi et surtout aider les pauvres qui les entourent, car le véritable progrès passe par la paix et l’entraide sociale... C’est aussi important de s’opposer à la guerre que d’agir concrètement pour la paix en soutenant, entre autres choses, le progrès social des plus pauvres au quotidien. Aider un pauvre de son quartier à sortir de sa condition est un véritable levier de paix et de progrès pour la société, sortir un homme ou une famille de la pauvreté est un formidable pari sur l’avenir mieux que de larguer des bombes à l’uranium de 400 kilos sur les villes d’Orient et d’Afrique, jetant des peuples entiers sur des boat-peoples !

« Réussir sa vie » tient peut-être plus dans l’aide à son prochain que dans l’acquisition d’une Rolex payée par de l’argent public, c’est en tout cas, à mon humble avis, le moyen le plus sûr de laisser à l’humanité un héritage positif et un exemple sensé au-delà de sa mort ! La vie, la mort, ce sont des choses sérieuses… Bénis soient les bienfaiteurs de l’humanité. Maudits soient les guerres et ceux qui les financent.

 

Vincent Després Levard


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