Aziz Senni : « Mon ambition : que ça change »
par Yann Riché
vendredi 21 avril 2006
Le 4 avril se tenait le salon de l’association Entreprendre et Passion, à Poissy, présidée par François Gourdon, maire de Poissy. Le 5 avril, Le Parisien titrait : « L’entrepreneur des cités prié de se faire discret ».
Résumons : ce salon est un salon pour faire des affaires, Aziz Senni, alias l’entrepreneur des cités, y tient un stand. Le président du stand lui a envoyé par mail cette missive : « Compte tenu de la conjoncture politique actuelle et de tes engagements [...] le président te demande de te faire le plus discret possible [...] voire de ne pas y assister. Entreprises et passions doit rester neutre. » Ce jour-là en effet, le député de Mantes, Pierre Bédier, est venu au salon, et les deux hommes semblent avoir des points de vue différents, l’un étant député UMP, l’autre un jeune qui "monte" localement. Aurait-on dit à M. Bédier de ne pas venir car M. Senni avait pris un stand ?
« L’ascenseur social est en panne... »
Aziz Senni, si vous ne le savez pas, a écrit un livre L’ascenseur social est en panne... j’ai pris l’escalier dans lequel il raconte comment et pourquoi il est arrivé à créer ATA France, société de transport de personnes, plus connue sous l’appellation de Taxi brousse à la française.
Installé au Val Fourré, où il habite, il est engagé dans la vie économique et locale, président-fondateur de l’association des Jeunes entrepreneurs du Mantois (plus de 200 membres) puis de Jeunes entrepreneurs de France, il se bat, chaque jour, pour le développement de son quartier et de sa ville (voir son site).
Il a 29 ans, il est grand et souriant, et dispose déjà du charisme et de l’énergie de l’entrepreneur qui a fait ses preuves.
C’est sa réussite et son culot qui l’ont amené à être sous les feux de l’actualité, mais surtout, c’est un homme réfléchi, qui donne du sens à sa vie et à ses engagements citoyens.
Mardi 18 avril, nous avons conversé par téléphone, ce fut ma première « interview » au cours de laquelle M. Senni est revenu sur l’incident rapporté par Le Parisien.
Ce qui l’a choqué tout d’abord, c’est le procédé. Aziz Senni le répète, il n’est pas encarté dans un parti, mais s’investit volontiers sur les sujets qui lui tiennent à cœur. « Pourquoi, dit-il, dois-je me faire discret ? Le salon n’était pas un salon politique, mais un salon d’affaires, et en tant que dirigeant de ATA France, j’y avais ma place ». Il ajoute qu’il n’a pas de vision dogmatique et regrette le comportement des politiques qui restent sur une ligne de parti et qui, finalement, refusent le débat avec les citoyens actifs.
« Un fonds d’investissement avec les grands du CAC 40 »
Pour Aziz Senni, le problème vient de son interrogation sur l’augmentation du chômage, et en particulier au Val Fourré depuis 1995 (preuve d’un dysfonctionnement). Ses propositions sont simples, et elles concernent au niveau de Mantes la problématique de l’emploi :
- En favorisant l’emploi dans les entreprises
- par l’allègement de la fiscalité du travail pour les TPE et PME
- par la flexibilité dans un échange gagnant / gagnant
Le deuxième axe de travail concerne le développement des logements, aussi bien les logements sociaux, en aidant les locataires présents depuis plusieurs années pour l’accès à la propriété, que la construction dans le parc de logements privés.
"Le rôle du député est de faire du lobbying pour l’emploi, comment se fait-il qu’Aziz Senni réussisse à créer un fonds avec les entreprises du CAC 40 sans être à l’assemblée ?"
"Mon ambition : que ça change ! Notre génération est aussi capable de dessiner la société".
Autre pomme de discorde sans doute, Aziz Senni se prononce en faveur du droit de vote des étrangers aux élections, position qui gêne l’élu de l’UMP. Dernier coup de griffe, son militantisme pour un mandat unique non renouvelable, ce qui évitera à l’homme politique de manquer de courage et de s’accrocher coûte que coûte à son siège et à la ligne de son parti pour une investiture.
Dans son engagement, il veut faire preuve d’exemplarité, et pas seulement faire rêver, il est dans une « création dynamique » pour ouvrir le champ des possibles. Son combat concerne les banlieues et la concentration de la pauvreté, il n’est pas surpris de voir les banlieues s’embraser, ni de voir la violence monter d’un cran à chaque fois, simplement, peut-être, surpris que cela surprenne.
Entrepreneur libéral et solidaire, il sait se tourner vers le passé pour imaginer demain par le biais d’un nouvel ouvrage prévu pour janvier 2007, au titre évocateur : C’était mieux demain .