Burqa. Et le débat accoucha d’une souris
par Julie Dep
mardi 26 janvier 2010
Pas de loi d’interdiction totale dans le texte que déposeront demain, à l’issue de six mois d’auditions, les élus chargés du sort de la burqa dans l’espace public. Celle-ci sera bannie des administrations, transports, hôpitaux et écoles, si leur conseil est suivi, mais pourra continuer de circuler sans rien voir. Au lieu de l’amende dissuasive proposée par Coppé, jugée inapplicable par MAM, et « stigmatisante » par Hamon, la sanction sera le refus du service demandé à quiconque aura le visage masqué.
Soucieux, en tant qu’élus, de ne pas froisser de potentiels électeurs, ainsi sans doute que de ne pas chatouiller d’éventuels terroristes, les rédacteurs du projet préconisent en effet une "disposition interdisant de dissimuler son visage dans les services publics", visant tous les publics. Plus question, donc, d’entrer dans une mairie sans ôter son heaume, son masque d’Halloween, ou sa cagoule du Ku Klux Klan... Compte tenu du nombre de citoyens concernés, on peut conclure avec le gros des politiques à l’inutilité d’un débat qui fut aussi long que mouvementé.
Le symbole occulté
Alors que les premières conclusions de la commission, loin de passer sous silence le symbole que représente l’accoutrement, y voyait "la partie émergée de l’iceberg intégriste", voilà que l’emblème de la révolution islamique, dénoncé par tous, mais pas au point de s’y opposer formellement, est mis au même plan qu’un casque de moto ou qu’un masque de Mickey.
Faux argument
Toujours aussi attaché aux droits des femmes, qu’il en ait ou non à sa tête, le PC s’oppose à la loi comme il s’opposa jadis à leur droit de vote - cette fois encore, bien entendu, "dans l’intérêt général" - ; le PS, quant à lui, voit dans ce camouflage une liberté relative pour les musulmanes, qui sans quoi, paraît-il, ne seraient même pas autorisées à mettre le nez dehors. Ce "mieux que rien", argument déjà utilisé par Martine Aubry pour créer à Lille des horaires de piscines séparés, et avant elle par un certain nombre de hauts responsables français sous l’Occupation, est indigne mais surtout, en l’occurrence, inefficace : pensent-ils réellement, ces élus de droite, de gauche ou plutôt, pour paraphraser Finkielkraut, "du sens du poil", qu’un mari intégriste, plutôt que de voir jeté en pâture le visage de sa femme, préférera se taper jour après jour la sortie de l’école, pour y attendre ses rejetons tenus, rappelons-le, d’y aller ? S’entretenir avec leurs instits, passer au square, leur donner à goûter, les torcher ? Qui ira au supermarché, si ce n’est sa femme, dévoilée en cas de loi ?
NPNS soupçonné d’arrière-pensées électorales
La réaction la plus embarrassante pour nos frileux vient peut-être des NPNS (Ni putes ni soumises), filles des cités rebelles à leur culture d’origine, seules, désormais, à oser faire entendre les revendications féministes dans l’Hexagone. Choquées par l’attitude du "1er parti laïque de France", elles ont manifesté ce lundi 25 devant le siège du PS, lequel y a vu "une instrumentalisation du pouvoir en place", incarnée par la fondatrice du mouvement, Fadela Amara. "Reviens, Marianne !!" criaient les manifestants. "Ils sont devenus fous !"