Condition de la femme arabe : la règle et l’exception

par Dr. Souad Chater
jeudi 1er décembre 2005

L’auteur se penche sur la condition de la femme arabe et présente l’itinéraire des progrès de l’exception tunisienne, avec les perspectives qu’elle ouvre vers une « sortie du harem ».

Éclipse de tout espace publique, univers de huis clos, sinon de harem, la condition de la femme a longtemps défini l’aire musulmane. Cette image traditionnelle occulte certes une complexité de modes, marquées par les diversités locales et régionales, les genres de vie et les héritages socioculturelles. Mais la réduction du champ d’activités des femmes à l’espace privé, leur claustration, ou du moins leur "marginalisation" par rapport à la vie publique, constituent, dans une large mesure, une spécificité de la civilisation arabo-musulmane. Des mutations historiques, des itinéraires de progrès, mais aussi de contrecoups, et des évolutions contrecarrées exercent leurs effets sur le paysage socioculturel musulman. Ils opèrent des changements et provoquent des décalages. Ils tracent - le statut des femmes étant pris en considération comme indicateur- une ligne de démarcation géopolitique, au sein de notre aire. Au Maroc, la Moudawwana rénovée, courageusement engagée par le souverain marocain annonce, certes, une dynamique de progrès. Mais il s’agit d’un premier pas, qui espérons-le sera rapidement dépassé, pour inscrire les mesures annoncées dans un projet de société égalitaire, à même d’accompagner les mutations internationales et d’ériger la femme en partenaire de plein droit, dans la famille et dans la société.

Par un concours combiné d’acquis juridiques et de promotion sociale, les femmes tunisiennes ont, dès les premiers mois de l’indépendance, en 1956, élargi leurs horizons et conquis de nouvelles frontières. Étudiant le cas tunisien, on définit volontiers sa promotion féminine comme "spécificité d’exception" dans l’aire arabo-musulmane. Nous nous trouvons, en fait, en face d’une réalité féminine nouvelle et d’une révolution sociale certaine. L’image que les femmes ont d’elles-mêmes, et celle qu’elles renvoient dans l’esprit des autres ont certainement changé. Cependant, sont-elles réellement venues à bout de tous les tabous qui, des siècles durant, ont régi leur vie ? Dans un précédent travail, j’ai défini les femmes tunisiennes comme des "émancipées du Harem". J’estime maintenant, à l’aube du XXIe siècle, qu’elles ont élargi davantage leurs horizons et leurs espaces d’activités, et qu’elles ont conquis de nouvelles frontières. « La percée tunisienne », qui s’accomplit lentement depuis l’adoption du Code du statut personnel - l’acte fondateur du projet de société tunisienne - constitue un fait unique dans cette aire. Elle doit initier une dynamique de promotion continue. Peut-on souhaiter que la conscientisation des femmes arabes soit en mesure de mettre en échec les combats d’arrière-garde de ceux qui veulent perpétuer un passé révolu ?


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