Déclin de la pensée occidentale

par Aspiral
jeudi 4 janvier 2007

La recherche des causes du mal qui rongent la civilisation en détruisant partout le lien social a transformé les cercles de discussion en tour de Babel. Il y a moyen de le penser autrement, mais il faut s’y exercer.

Pas besoin de faire un dessin : c’est un fait d’expérience commune ! La vie sociale est devenue un casino. Pas seulement la bourse, mais aussi le commerce, le mariage, la procréation... Mais dans un casino, on accepte de perdre ! C’est « logique ». Dans la vie sociale, par contre, chacun se croit autorisé à revendiquer le statut de « victime ». Le paradoxe du capitalisme postmoderne, privatisation des profits et socialisation des pertes, est devenu chez chacun de ses membres la source d’un vécu généralisé d’injustice.

Que s’est-il donc passé depuis le temps où les investisseurs investissaient vraiment, à leurs risques et périls personnels ? Un écrasement de l’espace et du temps par l’augmentation considérable des moyens de communication. Cette réduction du temps entre l’investissement et son bénéfice s’est réalisée insensiblement au fil du temps, jusqu’à pouvoir aujourd’hui investir en « live » au quatre coins du monde, et retirer son argent quasi aussitôt : les actionnaires sont donc devenus tout puissants, puisqu’il s’arrogent le droit de retirer leur argent illico s’ils ne reçoivent pas ce qu’ils espèrent comme bénéfice immédiat. Les prises d’otage et le terrorisme, ce n’est pas que « vu à la télévision » ; cela se vit ici au quotidien, sur un mode soft, bien sûr, politiquement correct.

Au début du capitalisme, les investisseurs investissaient à 10 ou 20 ans, comme par exemple dans la construction du chemin de fer russe. Les distances et les temps s’étant insensiblement réduits, on se trouve actuellement sans s’en être rendu compte dans la même situation que la grenouille qui meurt de chaud dans l’eau qui chauffe tout doucement.

La solution du stress et de la victimisation est donc toute simple : réintroduire une structure du temps et d’espace qui impose aux investisseurs de le redevenir. C’est clair qu’une telle mesure ne réjouira pas les pervers qui se sont emparés du capitalisme et en ont fait un leur terrain de jeu. C’est pour cette raison qu’il faudrait filtrer l’accès au « jeu » par une pyramide de la liberté : seuls ceux qui auraient fait leurs preuves au niveau du bon usage de leur liberté auraient accès à la bourse. Ce filtrage ne peut se décider que démocratiquement par les « politiques », c’est-à-dire en démocratie par le peuple ; de la même manière, on pourrait aussi envisager le filtrage de ceux qui risquent des abus de pouvoir en raison de l’impossibilité de contrôler l’honnêteté de leur métier, comme en médecine, dans l’enseignement, ou dans la filière judiciaire. Un permis de conduire certaines professions ou activités passerait par un certain nombre de critères spécifiques à cette profession. Est-il permis ou interdit par exemple, au nom de je ne sais quel respect, de refuser à des femmes policières de casser du manifestant ?

Il nous faut donc construire une échelle au temps ; la simplification des enterrements et des rites de passage, victime du complexe de Colomb (cfr texte ad hoc) qui qualifie de « folklore » les rituels sociaux dont le fond s’est perdu, a permis la présence au sommet de la société de gens qui « joueurs » sont incapables de penser en perspective et décider en conséquence de cause. Ils ne sont dans le meilleur des cas que des G. O., des gentils organisateurs, comme au Club Méditerranée. (Cfr, « La guerre des sexes »). Ce ne sont donc pas eux qui mettront un filtre dont ils ne peuvent connaître, par définition, l’utilité, d’autant plus que c’est justement cette méconnaissance qui leur a permis de se trouver à ce poste !

Seuls donc les groupes constitués peuvent mettre une limite, démocratiquement définie, à leur objet et à leur territoire d’efficacité : les exemples sont nombreux : les juges sont-ils habilités à juger des choix politiques concernant des expropriations, des vols d’avions au dessus de zones habitées, ou de gestion de déchets ? Les médecins sont-ils habilités à certifier mauvais pour un enfant un jugement concernant le droit de garde ? Qui va décider de l’avenir des méthodes médicalisées de procréation ? Les enseignants doivent-ils devenir des « éducateurs », voire des « soignants », pour tous ces enfants « mal élevés » que la médecine s’est appropriée en les qualifiant de « malades » ?...

L’urgence de mettre de l’ordre ne passera que par le refus de chaque groupe professionnel de s’occuper de ce qui ne le regarde pas, et cela même si cela crée un trou pénible pour les « victimes » et pour la société. Soulager les victimes d’une injustice n’est en effet pas lutter contre l’injustice qui leur est faite, mais bien souvent s’en rendre complice et la faire perdurer.


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