Démocratie participative, la sixième République ?

par Cypri1
jeudi 23 novembre 2006

A l’heure où les médias se passionnent, à juste titre, pour la madone des sondages, je m’interroge sur l’une des mesures clés de la candidate socialiste. Passons sur le flou qui entoure sa mise en œuvre et sur son périmètre d’application... Qu’est-ce donc que ces jurys populaires, que dis-je, ces jurys citoyens, des lieux de vindicte, ou de débats décentralisés ? Révolution civilisée, ou anarchie institutionnalisée ? Mesure gadget, ou tremblement de terre démocratique ? Risque, ou opportunité pour notre démocratie ?

Disons-le tout de suite, souhaiter mettre en place de telles instances, c’est déjà admettre que les politiques élus ne représentent pas les citoyens, puisqu’il y aurait un abîme entre ce que proposent les élites élues et ce que veulent les citoyens ! Diable ! Notre démocratie est donc en danger !

Effectivement, si on se dit que nos représentants une fois élus n’ont plus à rendre de compte de leurs actes aux citoyens le temps de leur mandat... Effectivement, si on se dit que politique peut être un métier à vie.. Effectivement, si les élus n’ont que faire du programme qui a servi à les élire... Effectivement, si on considère qu’au moins 40 % des Français ne sont pas représentés à l’Assemblée nationale. Effectivement, si on considère que la rue a systématiquement raison face aux gouvernements et aux institutions...

Sur le papier tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes, puisque par ce biais les citoyens seront invités à débattre régulièrement de grands sujets de sociétés qui, par nature, intéressent notre avenir collectif, et qui seraient aujourd’hui monopolisés par quelques élites et par le petit milieu informé et intéressé.


Les formalités et les thèmes restent à définir : quelles sont les règles du jeu, qui synthétise les débats, qui censure quoi, et surtout, qui, in fine, décidera de mettre en œuvre telle ou telle mesure, et sur quelle base ? Le politique ne serait donc plus qu’un analyste qui exploite des boîtes à idées.
Et cela peut fonctionner ! Ce site en est un parfait exemple, le travail collaboratif sur les logiciels libres en est un autre exemple remarquable.

On peut aussi imaginer que, puisque le débat a eu lieu et qu’un consensus plus ou moins mou s’est dégagé, les décisions prises vont s’imposer à tous ! N’est-ce pas un merveilleux moyen de réformer en passant outre les intérêts minoritaires ?

Mais dans ce modèle où le politique n’est plus (et officiellement) qu’un statisticien calculateur, qui, finalement, va dans le sens du vent ? Est-ce un habile nuage de fumée qui permet d’appliquer telle ou telle idée en ne prenant comme support que les avis qui l’intéressent et sous couvert de démocratie ?

Et d’ailleurs, qui va participer à ces échanges ? Sans doute le CSP+ ou lobbyiste avec ordinateur, Internet, qui se sent impliqué et qui mesure les enjeux de tel ou tel débat ? Où est la représentativité dans ce nouveau modèle ?

La vraie question sous-jacente est la suivante : est-ce que le peuple a toujours raison ? La somme des citoyens serait plus intelligente que la somme des politiques élus ?
Oser poser cette question est sans doute choquant pour un démocrate, mais est-ce aussi grave que de renier le courage politique à débattre, à convaincre et à appliquer ses choix une fois élu ?

Clairement, avec ce genre de principe, la peine de mort et le droit d’avorter n’auraient pas été votés en France. D’ailleurs, avec des trucs comme ça, on a voté non au projet de constitution européenne, et je ne suis pas sûr que les citoyens aient eu raison, ce jour là.


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