Essayons d’améliorer ensemble les commentaires sur AgoraVox
par Carlo Revelli
jeudi 2 novembre 2006
AgoraVox remporte un succès grandissant auprès des internautes, tant en termes d'audience, de qualité des articles, que d'impact médiatique. En octobre, nous avons dépassé les 650 000 visiteurs. Si on additionne ceux qui nous lisent via Yahoo Actualités et par RSS, nous dépassons le million de lecteurs par mois. Pas mal, après à peine seize mois d'existence...
A ce jour, nous avons environ 6.200 rédacteurs inscrits, et nous publions en moyenne 600 articles par mois. Ces chiffres sont en constante augmentation.
Par ailleurs, les médias traditionnels citent et reprennent de plus en plus des extraits d'articles provenant d'AgoraVox. Tout ceci n'est naturellement pas
sans conséquences. La première conséquence palpable est que l'approche
de la présidentielle amène son lot de coup bas : tentatives d'intimidation, menaces, attaques informatiques, propagations de rumeurs, etc. Nous y reviendrons probablement dans un prochain article...
La deuxième conséquence est liée au fonctionnement mêmed'AgoraVox qui permet la publication immédiate de commentaires libres et souvent anonymes. Les dérapages et les attaques gratuites sont devenus le pain quotidien de beaucoup d'articles. J'ai beau expliquer aux rédacteurs concernés que c'est le prix à payer pour toucher un large auditoire, nombre de nos rédacteurs initiaux se sont découragés et ont diminué leurs contributions.
Comment les blâmer ? Qui aime se faire insulter par un anonyme qui ne souhaite pas rentrer dans le débat mais uniquement le perturber ?
Cela dit, lecteurs et rédacteurs devraient se sentir davantage responsables des commentaires qui sont postés dans les articles et ne pas hésiter à signaler des abus via le formulaire correspondant qui est traité très rapidement. Il est également regrettable qu'un auteur se plaigne de la qualité des commentaires qu'il reçoit sans même faire l'effort de les signaler comme des abus (à moins qu'il n'ose le faire)
!
AgoraVox étant un média citoyen qui appartient à tout le monde, chacun doit veiller, et chaque rédacteur devrait considérer l'article qu'il publie sur AgoraVox comme s'il était sur son propre site. Il en va de même pour les lecteurs qui se sentent choqués. Au lieu d'écrire un commentaire pour manifester leur désapprobation et ajouter ainsi de l'huile sur le feu, il serait bien plus utile de cliquer sur le formulaire qui permet de signaler un abus en cinq secondes...
En même temps, un média citoyen doit permettre les commentaires anonymes constructifs car la liberté d'expression n'est pas sans risques, même en France, et surtout en ce moment...
Cela fait donc un moment que je réfléchis aux moyens efficaces de lutter contre les commentaires haineux, racistes, diffamatoires et autres trolls. Un bon point de départ a été cet article, que nous avons publié cet été, et qui a permis d'engager la réflexion grâce à vos nombreux et précieux commentaires : Les trolls et le problème des commentaires sur AgoraVox
A l'époque, j'ai expliqué pourquoi j'attachais beaucoup d'importance aux commentaires pour équilibrer, enrichir, valider ou invalider un article, en me basant sur notre politique éditoriale : "AgoraVox prône un processus d'intelligence collective pour fiabiliser les informations mises en ligne. Ce processus se base sur les commentaires des lecteurs. Dès qu'un article est publié, tout lecteur peut intervenir librement pour le commenter, le critiquer, le compléter, l'enrichir ou le dénoncer. L'auteur et l'Equipe AgoraVox peuvent interagir ainsi avec les lecteurs afin de compléter et d'améliorer l'article. Comme le dit le journaliste blogueur Dan Gillmor : mes lecteurs sont souvent mieux informés que moi."
Depuis, nous avons testé beaucoup de moyens différents, mais je suis arrivé à la conclusion qu'aucune solution miracle n'existe, que la censure ne marche pas, ni les mots de passe, ni l'interdiction d'une IP, ni l'obligation de laisser un nom. Je passe un temps fou à analyser certains commentaires et à suivre les abus signalés. On a également une personne qui surveille tout ce qui est manifestement raciste ou hors la loi. Mais je ne désespère pas dans cette lutte pour la qualité du débat citoyen.
J'ai pensé à la solution suivante, que je vous invite à tester et qui s'inspire, entre autres, de l'expérience du célèbre site Slashdot et de son système l'autorégulation.
ll s'agit d'une double approche visuelle, avec d'une part des codes couleurs différents, et d'autre part la possibilité de faire pratiquement disparaître un message non apprécié par la communauté.
Voici l'idée générale :
- Un rédacteur publie un article sur AgoraVox
-
Quand ce rédacteur poste un commentaire, celui-ci apparaît encadré en vert (à condition qu'il se soit identifié au préalable). Cela existe déjà
actuellement
Pour les autres commentateurs, nous avons suivi la même logique :
-
Si le commentateur a déjà écrit un article sur AgoraVox, son commentaire apparaît encadré en bleu (à condition qu'il se soit identifié au préalable)
-
Si le commentateur est inscrit, mais n'a pas encore publié d'article sur AgoraVox, son commentaire apparaît encadré en gris (à condition qu'il se soit identifié au préalable)
-
Enfin, si le commentateur est anonyme, son commentaire apparaît en fond blanc (comme actuellement)
mais avec une police légèrement plusCe sera le cas aussi des rédacteurs qui oublient de s'identifier...
petite...
Nous avons donc quatre codes couleurs : vert pour l'auteur de l'article, bleu pour les rédacteurs qui ont déjà publié, gris pour les nouveaux rédacteurs et blanc pour les anonymes ou les distraits. Cela peut paraître excessif, mais on s'y habitue assez vite, je trouve. Ensuite, chaque lecteur peut évaluer par vote n'importe quel commentaire avec un système très simple (pouce vers le haut ou pouce vers le bas). Si un commentaire a trop de votes négatifs, il n'est ni déplacé ni détruit (sauf abus). Il est tout simplement replié sur lui-même. On ne verra que le titre, et éventuellement la vignette de l'auteur. Ainsi, pour le lire, le lecteur devra faire la démarche volontaire de cliquer sur le lien intitulé [montrer le texte].
Par ailleurs, les votes qui permettent de replier un commentaire varient en fonction des profils des commentateurs.
-
Il faut qu'un commentaire anonyme (blanc) ait atteint le score de -7 pour se replier sur lui-même et perdre donc en visibilité
-
le commentaire d'un nouveau rédacteur (gris) doit atteindre -10 pour
se replier pour un rédacteur qui a déjà publié (bleu) il faut atteindre -12 - et enfin pour cacher un commentaire de l'auteur lui-même (vert) il faut atteindre -15
Naturellement, ces chiffres peuvent être modifiés. On verra après quelques essais, et en fonction du nombre de votants.
Il s'agit d'une version beta, il se peut donc que des dysfonctionnements existent. Merci de les signaler ici. Je sais aussi que la résistance au changement est toujours forte, surtout quand on a pris des habitudes... Mais à ce stade, le statu quo n'est plus une solution envisageable. Les articles doivent engager un débat constructif et ne doivent plus être perturbés de manière intempestive. Merci donc de prendre le temps de tester tranquillement le système avant de le critiquer trop vite.
Je sais bien que ce n'est pas une solution miracle mais à ce stade, je pense que c'est la moins mauvaise.
Enfin, toutes ces mesures n'ont un sens que si on les replace dans le contexte d'une démarche éthique et respectueuse des droits et devoirs de tous les internautes et blogueurs. Pour cette raison, nous adhérons implicitement à la philosophie qui est derrière la netiquette, et plus particulièrement la charte néthique.