Fausses révélations sur les couples Royal et Sarkozy

par raphaelric
lundi 18 juin 2007

Cet article pourrait s’appeler « Les Coulisses des coulisses d’une défaite » et s’interroge sur le cynisme avec lequel les personnages politiques mentent sur leur vie privée.

Comme vous le savez maintenant, Ségolène Royal n’est plus la campagne de François Hollande. Elle a ainsi percé un ballon de baudruche d’une façon peu élégante pour celle qui prétend faire de la transparence un des axes politiques majeurs.

Avertissement : cet article a été écrit par un sympathisant de gauche, adhérent au Parti socialiste depuis juin 2006 (aussi appelé "adhérent à 20 euros").

Avertissement 2 : cet article est probablement un tissu de mensonges lui aussi (précaution oratoire indispensable pour ne pas être attaqué en diffamation par l’un des couples politiques mis en cause dans cet article).

Posons-le dès maintenant : Ségolène Royal est séparée de François Hollande depuis au moins début 2006, soit dix-huit mois avant sa révélation, même si elle refuse de l’avouer dans "Coulisses d’une défaite".

Comment l’ai-je appris ? D’une relation professionnelle qui connait des journalistes. J’ai, ainsi, appris que la séparation entre François Hollande et Ségolène Royal faisait partie de ce qui se disait depuis près de deux ans.

L’ambiguité, qui s’est à maintes reprises transformée en totale hypocrisie, que Ségolène Royal entretenait avant "sa défaite", sur sa relation avec François Hollande, m’a très rapidement convaincu que je ne devrais pas voter pour la candidate de mon parti.

Une femme qui se positionne en tant que défenderesse de la morale, comme les socialistes ont toujours trop tendance à le faire, mais qui en a aussi fait un axe structurant de sa campagne, ne peut se permettre de mentir sur l’état de sa relation avec un autre dirigeant du parti auquel elle adhère.

Aucune entreprise ne tolèrerait cela car on sait les dangers que cela comporte. En politique, c’est admis, mais c’est inadmissible.

Le débat avec Sarkozy de l’entre-deux-tours était, d’ailleurs, édifiant à cet égard. En face, dans l’arène :

- Nicolas Sarkozy, pur enfant de Mai 68 qui emmènera deux semaines plus tard une femme, Cecilia Sarkozy, avec qui il ne vit plus, à l’Elysée pour son intronisation, tout en crachant sur Mai 68, alors qu’il est officiellement à la tête d’un foyer triplement recomposé et qu’il a épousé une femme qu’il a marié des années auparavant à l’animateur Jacques Martin ;

- Ségolène Royal, mère de quatre enfants hors mariage feignant encore qu’il existe une relation avec son ancien compagnon, François Hollande.

On appréciera tout particulièrement le cynisme du passage durant lequel Nicolas Sarkozy tente de destabiliser Ségolène Royal en lui demandant pourquoi elle tient des propos contradictoires de ceux de son compagnon officiel, François Hollande. A trois reprises, Nicolas Sarkozy revient à la charge. Au final, Ségolène Royal lâche que les positions de son mari sont ce qu’elles sont et que les siennes sont distinctes, se désolidarisant officiellement de son compagnon à l’affiche.

On appréciera le goût du risque de Nicolas Sarkozy : il sait que Ségolène Royal est séparée officiellement de François Hollande, mais surtout il sait que Ségolène Royal sait que son couple avec Cécilia Sarkozy n’est lui aussi qu’un couple de facade et que s’il destabilise trop Ségolène Royal, cette dernière pourrait le questionner sur le type d’accord qu’il a passé avec Cécilia "Sarkozy" pour qu’elle accepte de continuer à feindre le couple, afin, en échange, de bénéficier des avantages que lui confèrera peut-être le statut de première dame de France.

Dans le petit monde des gens influents de Paris, tout cela se fait depuis bien longtemps. Sans cela, le petit cadre supérieur que je suis n’en aurait pas eu vent.

Evidemment, ce n’est ni la séparation entre Nicolas et Cécilia, ni la séparation entre Ségolène et François qui est problématique.

Ce n’est pas non plus le fait que ces personnages publics souhaitent protéger leur vie privée. Je ne fais pas partie de ceux qui posent que la vie d’une personne publique doive être intégralement publiée.

Non, ce qui pose problème, c’est le manque de constance et de cohérence.

Ce qui pose problème, c’est le cynisme avec lequel celle qui veut "moraliser" la vie publique continue à faire croire que François Hollande est toujours son compagnon et cache qu’elle a commencé, depuis longtemps, une relation avec un autre personnage public. Ce cynisme vaut celui de Nicolas Sarkozy qui, d’après des sources non confirmées aurat probablement négocié durement avec les avocats de sa femme les arrangements qui prévaudraient une fois qu’il serait élu afin qu’elle bénéficie d’avantages substantiels en échange de faire croire à l’opinion qu’elle est toujours sa femme dans les faits.

Pourquoi ne pas simplement dire qu’ils sont officiellement séparés ?

Pour Sarkozy, il s’agit de protéger son électorat senior, présumé moins ouvert sur le statut familial qu’il exige d’un président, que la moyenne des Français et qui pourrait en partie se détourner de lui. Or, Sarkozy a autant besoin des voix du troisième âge que Chirac avait besoin des voix des paysans pour être élu.

Quant à mère Morale, elle ne veut pas renoncer à son image de madone et peut-être pourvoir, en toute discrétion, exercer des pressions privées sur François Hollande afin d’obtenir des soutiens politiques, que cela est évoqué dans le livre des auteurs de "La Femme fatale", Ariane Chemin et Raphaëlle Bacqué.

Ces cachotteries sont compréhensibles à court terme mais constituent de mauvais calculs à moyen terme car ces mensonges entâcheront leur capital "confiance", gage de longévité en politique. Je ne parle évidement pas du capital "sincérité" et encore moins du capital "authenticité" qui sont hors sujet. Mentir en politique est un bon calcul si l’on a l’assurance qu’il ne sera jamais découvert ou qu’il sera découvert très longtemps après les faits.

Nous savons tous que les hommes politiques qui arrivent à un certain niveau sont des gens qui cultivent le goût du pouvoir à un tel point qu’ils font passer ce dernier avant tout.

Deux siècles de démocratie nous l’ont appris : nous ne votons plus pour des personnes dont nous croyons en la sincérité, nous votons pour ceux qui ont le plus de chances de faire avancer la société dans la direction qui nous désagrée le moins.

Nous savons qu’il y a désormais une décorrélation partielle ou majeure entre, d’une part, le discours d’un candidat qui est conditionné par des calculs statistiques d’impact dans l’opinion et, d’autre part, les véritables projets que le candidat a en tête, eux-mêmes savante fusion entre l’influence qu’il souhaite avoir sur la société et les ascenceurs qu’il doit renvoyer aux vassaux qui le soutiennent.

C’est déjà suffisament cynique.

Je ne demande pas que les hommes politiques soient plus vertueux que vous ou moi. Nous ne sommes pas parfaits, nous mentons, nous nous séparons, nous trichons même parfois.

Je demande seulement que les hommes politiques des partis modérés limitent leur dose de cynisme. Ils nous mentent sur les sujets de fond, autant parce que nous ne souhaitons pas toujours entendre la vérité que parce qu’ils manquent de courage politique. Dont acte.

Mais ils ne faut pas qu’ils donnent l’impression qu’ils se moquent totalement de la vérité et que les mots qu’ils nous adressent n’ont pas de valeur.

C’est ce qui explique que j’ai voté pour François Bayrou alors que je suis encarté au PS.

Aussi dur que Ségolène Royal lorsqu’elle préside son conseil régional et aussi arriviste que Nicolas Sarkozy, Bayrou a jonglé avec la communication autant que l’on fait les deux autres. Mais il a moins menti qu’eux.

Un tout petit peu moins.


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