Je m’excuse

par Emmanuel Glais
vendredi 30 octobre 2015

  On se croirait au Moyen-Âge à Paris en 2015. Ou dans le Notre-Dame de Hugo. La cour des miracles partout s'est répandue. Chacun laisse un autre mourir à côté. A la vue de tous, tremble cette dame âgée appuyée sur sa canne, les pieds dans des sacs plastiques bleus transparents. Elle est près du mur, dans l'ombre, et regarde le spectacle des passants qui la regardent, apeurés par leur couardise. Il faudrait faire quelque chose. Les regards fuient, les pas accélèrent dans l'immédiate promiscuité de la mort. Elle s'en ira cette nuit s'il fait froid ou humide. Si personne ne fait rien. Ce que tout le monde s'empresse de faire. L’État devrait le faire. Ou l’Église, pense Duflot du haut de son appart' haussmannien. Aussitôt passé, encore tremblant, le passant pense à ses vacances aux Seychelles, qu'il hésite à booker le soir même pour changer de la grisaille mouillée.

  L’État n'a plus les moyens. Et nous ? On se plaint pour légitimer notre égoïsme. Notre piaule sera vide, après demain, quand on ira sécher sur une île nos regrets. Panser notre faiblesse en nous demandant si on a bien éteint le chauffage, pour l'amour de la planète et de sa bourse.

  Il ferait bien de piquer aux bourses, l’État, pour parer à son indigence. 480 personnes au minimum, à 49 ans en moyenne, sont morts dans la rue en 2014 d'après le collectif Les morts de la rue. Une bagatelle ou un massacre ?

  Qui instruira un tribunal pénal national ? Que fait le parquet ? Qui sera condamné ?

  Moi, je me contente d'écrire mon « J'accuse », et comme vous, je laisse untel et dix minutes plus tard, unetelle, crever à petit feu. Sans même un dieu auprès duquel dire « je m'excuse ». 


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