L’ANAEM accueille une migrante

par JB Rouquin
lundi 8 décembre 2008

 Khadija est étrangère. Née en mai 1990 au Maroc, elle est arrivée en France avec sa famille en juillet 1990. Elle a depuis toujours vécu en région parisienne et suivi une scolarité normale dans les écoles de la République. Elle est aujourd’hui en Terminale et vient d’avoir 18 ans.

Devenue majeure, elle a dû faire sa première demande de carte de séjour. Etant entrée en France avant 13 ans et ayant été scolarisée pendant au moins 5 ans, elle peut prétendre à l’obtention de plein droit d’une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » d’une durée de… un an. Pour la carte de 10 ans, il faudra attendre 5 ans…

En attendant, comme tout étranger qui sollicite une première carte de séjour, elle a dû se rendre à l’Agence nationale d’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) pour passer une visite médicale et signer le Contrat d’accueil et d’intégration (CAI). Le CAI, dont la signature est désormais obligatoire (art. 311-9 du CESEDA), est censé permettre à l’étranger de « préparer son intégration républicaine dans la société française ». Il impose au signataire de suivre une formation civique et, si besoin, une formation linguistique ainsi qu’une session d’information sur la vie en France. Certaines catégories d’étrangers sont cependant dispensées de la signature de ce contrat (qui n’a d’ailleurs de contrat que le nom puisqu’il est obligatoire !). Ainsi, l’étranger né et scolarisé en France pouvant prétendre de plein droit à la nationalité ou « l’étranger ayant effectué sa scolarité dans un établissement d’enseignement secondaire français à l’étranger pendant au moins trois ans » en sont dispensés. On peut en effet raisonnablement penser qu’ils parlent français et connaissent les « institutions et les valeurs de la République, notamment l’égalité entre les hommes et les femmes et la laïcité ».

Mais Khadija n’est pas née en France (elle ne peut donc prétendre de plein droit à la nationalité) et elle n’a pas suivi sa scolarité dans un établissement d’enseignement secondaire français « à l’étranger » mais dans un établissement d’enseignement secondaire français… en France. Pour l’ANAEM, elle n’entre donc pas dans les catégories d’étrangers dispensés de la signature du CAI ! Elle a par conséquent signé le CAI au cours d’un entretien avec un auditeur social de l’ANAEM. Ce dernier lui a fait passer un test de français, à l’issue duquel il l’a dispensée de formation linguistique (c’est bien le moins !), lui a posé quelques questions pour s’assurer qu’elle n’avait pas besoin d’une « session d’information sur la vie en France » et lui a remis une convocation pour se rendre à la journée de formation civique obligatoire. Il l’a également prévenue qu’en cas de non-respect de ce « contrat » signé avec le préfet (c’est-à-dire si elle sèche la formation civique), celui-ci pourra alors lui refuser le renouvellement de son titre de séjour…

Et si on la surprend à siffler la Marseillaise, ce sera l’expulsion ?


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