La CNIL n’a plus les moyens nécessaires pour assurer sa mission
par Voris : compte fermé
lundi 30 juillet 2007
Le pouvoir de la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) est quasiment nul, et c’est volontaire ! Le gouvernement français laisse délibérément dépérir cette institution et, depuis quelques années, la prive de ses moyens d’assurer la protection des données de la vie privée, lui retire des pouvoirs, se passe de ses avis...
Des moyens dérisoires face à des enjeux cruciaux :
La CNIL ne dispose en effet que de 95 postes budgétaires, contre 270 à l’équivalent britannique de la commission. Celle-ci dispose d’un budget de communication de trois millions d’euros, la CNIL doit s’arranger avec 90 000 €. Le budget de la CNIL rapporté à la population française le classe dernier en Europe. Ce qui n’a pas empêché l’Assemblée nationale, l’an passé, de chercher à amputer son budget de fonctionnement de moitié ! Les autres États européens ont su se doter d’autorités de protection de la vie privée de leurs citoyens. Pas nous !
Pourtant, l’utilité de la commission se prouve chaque jour. Elle débusque, par exemple, depuis 2001, un taux croissant d’erreurs dans les fichiers de la police : 25 % en 2001 ; 44 % en 2005 !
Pourtant aussi, son activité augmente de façon considérable et elle est appelée à gonfler encore dans les années à venir : 570 % d’augmentation de son activité en trois ans (2003 à 2006). En 2006, la CNIL a aussi enregistré 880 déclarations de mise en place de systèmes de vidéosurveillance, contre 300 en 2005 (+ 293 %). À l’avenir, cela va empirer. Un seul exemple : le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG), initialement créé pour ficher les seuls délinquants sexuels, concerne aujourd’hui la quasi-totalité des crimes et délits, et répertorie à ce jour quelque 500 000 identifiants ADN et il continuera de s’étendre.
La CNIL, ne disposant que d’un poste et demi pour traiter toutes les demandes d’accès aux fichiers policiers, a accumulé un retard de 3 000 demandes d’accès en attente. Certaines remontent à 2003.
Les contrôles aux mains de l’État :
Rappelons que, dès 1995, Charles Pasqua avait écarté la CNIL du contrôle de la quasi-totalité des systèmes de vidéosurveillance. Ce contrôle a été confié à des commissions placées sous l’autorité des préfets. Alex Türk demande une séparation entre acteurs et contrôleurs de la vidéosurveillance : "Il faut bien déconnecter celui qui agit et celui qui contrôle." Car, sinon, qui contrôle ceux qui contrôlent (et qui commettant des abus et des erreurs) ? Personne !
Le pouvoir de la CNIL se réduit à peau de chagrin :
En 2004, la refonte de la loi informatique et libertés a retiré à la CNIL ses pouvoirs de contrôle préalable et de sanction des fichiers policiers, gouvernementaux, ou portant sur la totalité de la population. Or, depuis 2002, la France n’a cessé de voter des lois sécuritaires (une dizaine).
La CNIL n’assure plus convenablement la protection des données sur les citoyens :
Elle est dépassée ! En 2006, elle a enregistré 880 déclarations de mise en place de systèmes de vidéosurveillance, contre 300 en 2005, soit une augmentation de 293 %. Le nombre de demandes de mise en place de systèmes biométriques est quant à lui passé de 40 à 360 en un an (+ 900 %).
Faute de contrôle et de transparence de la part des commissions préfectorales, qui servent l’État, il est impossible, à ce jour, de connaître le nombre des caméras, ni de savoir combien sont conformes à la loi.
Alerte à la société de surveillance !
"Alerte à la société de surveillance !" est le titre du rapport 2006 de la CNIL et, nous l’avons vu, il n’est pas alarmiste sans raison. Alex Türk, président de la commission, n’a de cesse de le répéter : "Si vous croyez que le monde ressemblera un jour à celui de Big Brother, détrompez-vous... Vous êtes en plein dedans !"
Ce cri lancé, il énonce un certain nombre de propositions élémentaires et urgentes : "Il faut que les citoyens soient informés de la présence d’une caméra de vidéosurveillance, qu’ils sachent qui est le destinataire des informations et qu’ils aient un droit d’accès et de rectification. Et la conservation des enregistrements doit être effectivement limitée dans le temps, a souhaité le président de la CNIL. Il a en outre demandé que le système soit évalué par une autorité indépendante au bout de deux-trois ans".
Il appelle de ses vœux la création d’une convention universelle de protection des données, "instrument juridique contraignant qui devrait être une grande déclaration de droits, consacrant la reconnaissance d’un droit universel à la protection des données et à la vie privée".
Quelques liens vers deux article parus sur Agoravox sur ce thème :
"Fichiers privés ou publics, vos informations personnelles ont de la valeur, ne vous en fichez pas !", par Nicolas Sarmacq, juriste TIC et membre de l’AFCDP.
"On est fichés et on s’en fiche !", par la Taverne des poètes.
"Souriez, vous êtes filmé", un article du QUID.