La Fadaise sur le gāteau

par C’est Nabum
vendredi 6 janvier 2017

Les rois de la République.

Oh la belle tradition que voilà ! La galette assèche les comptes de la nation et de nos associations. On se presse pour tirer les rois de la soirée. On joue avec délectation aux rois mages, Melchior l’Européen, Gaspard l’Asiatique, et Bathalzar l’Africain, sans être en mesure d’apporter l’or, l’encens et la myrrhe. La fève a cessé d’annoncer la fin des haricots, on l’a remplacée par des porcelaines à collectionner, des décors qui sont si gros qu’ils menacent l’intégrité de vos éventuels plombages.

Mais revenons à cette Epiphanie à l’historicité douteuse, totalement intégrée dans une tradition catholique de bon aloi. Cela ne semble pas contrarier les chantres de la laïcité, ils peuvent repousser l’idée des crèches, ces vestiges d’une naissance dans le dénuement, redoutant sans doute d’être pris pour des ânes devant tant de niaiseries, mais surtout pas se priver de leur indécrottable cérémonie des vœux.

Poussez pas, on n’est pas des bœufs ! Vous nous mettez sur la paille mais avez toujours quelques sous pour mettre dans vos mangeoires galettes et boissons pétillantes. Il est vrai que depuis quelque temps, vous avez mis de l’eau dans votre vin en délaissant le champagne, trop dispendieux et, hélas, alcoolisé au profit de jus de fruits gazéifiés.

Pressez, pressez et continuez de nous prendre pour des pommes. Vous allez nous tenir des discours lénifiants, nous promettant la lune sans préciser qu’il s’agit toujours, avec vous, de la face cachée de notre satellite. Les vœux, cérémonie d’ancien régime, sont l’expression absolue du crétinisme ambiant. Les miettes tombent de la galette tout autant que des propos sans intérêt des maîtres de cérémonies.

La galette est fourrée ; c’est d’ailleurs la grande tendance de l’époque. On y glisse tout ce qu’on veut : frangipane, compote, chocolat, pâte d’amandes ou bien de noisettes. Tout fait corps pour gonfler le gâteau, lui donner l’illusion d’une belle pâtisserie. Pourtant rien ne change véritablement, le feuillage est une affaire de tours, de vilains tours que nos bons décideurs vont nous jouer une fois la belle part avalée.

Ne nous y trompons pas : le peuple aura toujours la portion congrue. La couronne ne vient jamais orner la tête des humbles et des miséreux. Elle restera posée sur les têtes de ceux qui se prétendent représentants d’un peuple depuis toujours méprisé et écarté. Cette démocratie des lustres et des palais est une honte indigeste qui trouve son expression parfaite dans la fadaise de la galette et des vœux.

Les gueux se passent très bien de toutes ces simagrées honteuses qui occupent tout le mois de janvier. C’est le bal des ambassadeurs, des têtes couronnées, des corps constitués, des journalistes et autres corporations qui comptent pour maintenir ce système oligarchique. Comment pouvez-vous prétendre parler en notre nom alors que vous le faites la bouche pleine ? Quelle indélicatesse ! Quel manque d’éducation et de dignité !

Rien ne change vraiment au pays des jocrisses. L’état d’urgence ne vous empêche nullement de poursuivre les bonnes vieilles habitudes d’une féodalité insidieuse. Je vous souhaite de faire grandes et belles indigestions avec ce bel étouffe-chrétien fourré à l’hypocrisie républicaine. Puissiez-vous ne jamais vous remettre de la chose ! Il est grand temps de briser les couronnes et les rois de la fête.

Ils nous prennent depuis si longtemps pour des fèves qu’il serait grand temps de leur clouer le bec, d’investir ces manifestations honteuses et de leur demander d’y mettre fin. Tous les gens à la rue seraient ravis de partager une part de la fameuse galette. Mon Dieu, quelle horrible idée ! Je devine que vous ne supporteriez pas pareille cohabitation ; l’entre-soi vous va si bien.

Exaspérément vôtre.


Lire l'article complet, et les commentaires