Le RIC : espoir ou rêve ?

par Marcel MONIN
vendredi 5 novembre 2021

 

 Le RIC : espoir ou rêve ?

 

Le référendum d’initiative citoyenne est une notion qui est… populaire.

Car si les dirigeants actuels étaient vertueux, intelligents, et oeuvraient dans le sens de l’intérêt général (c’est-à-dire en tenant compte, aussi, de la situation des gens modestes), personne ne penserait à mettre en place un RIC.

 

Il se trouve que les dirigeants, contre la politique habituelle desquels ces référendums auraient une utilité, ne semblent pas s’en offusquer.

Et parfois même, lesdits dirigeants intègrent cette revendication dans leurs discours électoraux (comme E. Macron). Alors même que cette revendication émane de gens habituellement méprisés, « appartenant à un autre monde » qu’eux, et qui descendent dans la rue où ils se font éborgner, pour protester contre les conséquences qu’ils subissent de la politique de l’élite politico-économique (portée par le même E. Macron).

 

Pourquoi un tel paradoxe ?

 

Tout simplement parce que les conditions de mise en œuvre d’un référendum venant « du bas », ne pourraient nécessairement pas être réunies compte tenu des conditions (nombre important de demandeurs, répartis dans un nombre important de circonscriptions) dont la mise en œuvre serait assortie. Ne serait-ce que pour éviter l’organisation de référendums hebdomadaires.

Sans compter que les campagnes médiatiques (qui permettent de faire élire tel candidat choisi par quelque cénacle qui dispose dans ses fichiers de volontaires dans à peu près tous les partis – Macron, exemple idéal-typique – et qui en font détester tel autre, quoi que ce dernier dise – Zemmour, exemple idéal-typique –), peuvent, de la même manière faire rejeter aisément le texte.

 

Imaginons maintenant que l’on organise un autre type de « référendum-citoyen ». « Efficace ».

Par exemple, pour les besoins de la démonstration, un référendum qui serait organisé au niveau de la commune. Et qui permettrait aux citoyens d’écarter pour leur commune la mise en œuvre d’une réforme que le gouvernement aurait fait voter par sa majorité parlementaire. (Concrètement par des femmes et des hommes, souriants et systématiquement convaincus en reconnaissance du fait qu’ils ont eu une investiture).

 

Ce ne serait pas tellement nouveau. Sous l’Ancien Régime, c’est ce qui se passait. Les édits et les ordonnances du roi, ne s’appliquaient dans une province, que si les Parlements (cour de justice) les enregistraient. Ce qui fait, que selon le cas, on parlait de provinces « dans l’obéissance du / le roi » ou de « provinces hors l’obéissance du / le roi ».

 

Si l’on avait un système de référendum qui fasse que l’on ait des territoires « dans l’obéissance Macron », et d’autres, « hors l’obéissance Macron », il y a peu de chance que l’actuel président de la République, bien qu’il aime à se déplacer pour se faire apprécier et photographier, envisage de devoir faire ses selfies à l’occasion de déplacements tenant lieu de  lits de justice (1). Il n’y aurait sans doute pas plus de chances, que tel ou tel de ses ministres aille montrer, là où les citoyens risqueraient de dire « ça suffit », comment mettre le masque en pleine campagne ; ou comment présenter son QR code en entrant dans un restaurant ou dans un train, mais comment ne pas le présenter en entrant dans une grande surface alimentaire ou dans le métro.

 

En tous cas, et pour revenir à notre propos, les dirigeants actuels seraient-ils d’accord avec une telle formule donnant une « efficacité » au référendum ? 

Qui mettrait à bas ici et là le système politique tel qu’il fonctionne. Avec la poignée d’acteurs qui veillent, en utilisant les prérogatives attachées aux fonctions, à ce l’idéologie économico-financière (monnaie créée par les banques sous forme de prêts ; dérégulation généralisée, etc…) progresse vers la mondialisation heureuse gérée par un gouvernement mondial. Le tout dans le cadre d’une redéfinition de la relation avec le peuple, au moins telle que Lincoln l’avait posée à Gettysburg.

 

Certainement pas !

 

Ce qui amène à conclure que si certains veulent redonner la parole au peuple dans le cadre français, il faut qu’ils trouvent autre chose. 

NB. Et évidemment qu’ils lisent les traités européens, et l’article XV de la constitution puisque les normes européennes sont supérieures aux lois françaises et (même s’il n’y avait pas de titre XV dans la constitution) à la constitution (2).

 

 

Marcel-M. MONIN

m. de conf. hon. des universités.

 

(1) Pour surmonter le refus d’un parlement d’enregistrer, le roi devait se déplacer, selon la coutume du moment, au siège de ladite cour de justice pour ordonner à cette dernière d’enregistrer. C’est ce qu’on appelait le « lit de justice ». A la veille de la Révolution, les Parlements qui n’avaient plus peur de rien, estimaient que lorsque le roi se déplaçait, c’était pour venir discuter de la réforme avec eux.

(2) Sur les décisions de la CJCE affirmant que le droit communautaire l’emporte sur le droit national, y compris CONSTITUTIONNEL : CJCE, 5 février 1963, van Gend en Loos ; CJCE, 15 juillet 1964, Costa c. ENEL ; CJCE, 9 mars 1978 Simmenthal c. administration des finances ; CJCE, 17 décembre 1979, Internationale Handelsgesellschaft ; les juridictions nationales doivent l’appliquer CJCE, 19 novembre 1991, Andrea Francovitch ( cités dans notre recueil : « Arrêts Fondamentaux du Droit Administratif » - Ed. Ellipses)


Lire l'article complet, et les commentaires