Qui veut la peau d’Internet ?
par olivier cabanel
samedi 13 février 2010
Depuis quelques temps, des négociations sont menées en grand secret au sein d’un « comité mondial » afin de contrôler Internet.
Après Hadopi, (paix à son âme) et la LOPPSI (qui va finalement être discutée en urgence à partir du 27 janvier. lien) un nouveau danger menace Internet.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que le silence est quasi total dans les médias sur cette initiative.
Ce danger s’appelle ACTA (Anti-Counterfeiting Trade Agreement / traité de lutte contre la contrefaçon) et il va encore plus loin qu’HADOPI dans sa version première.
Il s’agit en principe de protéger les droits d’auteur, et le copyright.
Mais derrière ces mesures, c’est aussi Internet qui est visé. lien
Un des volets concerne le téléchargement illégal.
Il permettrait d’obliger les fournisseurs de service sur internet à faire eux même la police, sous peine de sanctions.
(Une vidéo allemande pleine d’humour réalisée par Alexander Lehman nous montre ce que nous pourrait être le monde de demain).
Les négociations se déroulent à huis clos.
La commission européenne a prétendu en novembre 2008 qu’aucun texte n’avait été publié, pourtant une fuite à permis de prouver le contraire, même si la commission affirme maintenant qu’il ne s’agit que d’un « brouillon ». lien (il date du 29 octobre 2009)
Le traité permettrait aussi que les supports informatiques soient inspectés aux frontières, et ceux qui contiendraient des fichiers téléchargés illégalement seraient détruits.
Quand aux possesseurs de ces supports informatiques (disques dur, mp3, etc.) ils écoperaient d’une amende. lien
Ce traité permettrait aussi à ceux qui supposent avoir été victimes de téléchargements illégaux d’accéder aux informations personnelles d’un internaute, sans passer par la case justice.
Ces négociations ont commencé dans le plus grand secret en octobre 2007 entre les USA, la commission Européenne, la Suisse et le Japon.
Depuis, l’Australie, le Canada, l’Union Européenne la Jordanie, le Mexique, le Maroc, la Nouvelle Zélande, la Corée, Singapour et les Emirats Arabes Unis les ont rejoints. lien
Une négociation a eu lieu en Janvier au Mexique, et la prochaine rencontre devrait se tenir vers le 15 avril en Nouvelle Zélande, et l’accord définitif devrait voir le jour à la fin 2010.
Jérémie Zimmerman, cofondateur de la Quadrature du Net s’est exprimé longuement sur le sujet dans l’émission de France Culture, place de la toile, le vendredi 12 février, à 11 h. lien
Ecoutons le : « C’est le véritable prolongement de que l’on appelle la « guerre contre le partage », guerre menée par les industries du divertissement, que l’on a vu à l’œuvre lors du projet adopi.
Ils tentent de les contrôler, et ils veulent s’accaparer le réseau internet pour mieux le contrôler, ils tentent de pratiquer le « blanchiment législatif » : lorsqu’ils s’aperçoivent qu’il y a des réticences au niveau de l’opinion publique, ou du pouvoir politique, ils contournent le processus démocratique par un grand accord international exécutif multilatéral, sans aucune règle de transparence.
Le but c’est d’inciter les fournisseurs d’accès, les plates formes, à des accords volontaires, extra judiciaires, pour régler les questions de contre façon, ce qui permet de contourner le juge.
Ils veulent faire en sorte que les fournisseurs d’accès coopèrent gentiment avec les industries du divertissement, et de l’autre coté, ils mettent en place un outil juridique pour les obliger à coopérer, en faisant augmenter leur responsabilité juridique, sur la transmission ou le stockage de contenus, soumis au copyright,
En gros, si vous êtes un fournisseur d’accès, tout ce que vos utilisateurs vont faire pourra vous être reproché, et vous deviendrez de fait des « auxiliaires de police ». podcast de l’émission
En Italie, avant même la signature du traité, le gouvernement à décidé que pour mettre une vidéo en ligne, il faudra obtenir une autorisation sous forme de licence, auprès du ministère des communications. lien
L’opposition italienne monte au créneau et Paolo Gentiloni a déclaré : « c’est une limitation incroyable de la façon dont l’Internet a fonctionné jusqu’ici ».
L’article 4 de la loi entrera en vigueur en Italie à la fin février et il précise : « la diffusion et la distribution sur internet d’images animées, nécessitera désormais une autorisation ministérielle ».
Déjà en 2008, Frédéric Lefebvre avait tenté de faire passer un amendement prévoyant que le CSA ait un contrôle sur les images et les contenus qui sont sur Internet par rapport à la protection des enfants.
Celui-ci avait été repoussé de justesse, la présidente de la commission, qui était socialiste, ayant participé au vote (ce qui est tout a fait inhabituel) afin de permettre l’équivalence des voix. vidéo
Les associations de défense des libertés ont commencé à organiser la riposte, et proposent déjà plusieurs actions. lien
Certains ont imaginé ce que deviendrait notre monde si ACTA voyait effectivement le jour. lien
Car comme disait mon vieil ami africain : « On peut tuer le coq, mais pas empêcher le soleil de se lever ».