Réforme territoriale : les élus ont gagné

par Michel DROUET
lundi 20 juillet 2015

… Et les citoyens ont perdu

Depuis 2012, le pouvoir en place nous annonçait monts et merveilles en matière de collectivités territoriales. Au bout du bout, c’est-à-dire après le vote de plusieurs lois - découpage des Régions, - mise en place de Métropoles, et cette fameuse dernière loi votée le 16 juillet (pendant les vacances pour qu’on ne disserte pas trop sur le vide sidéral de ce texte) – on ne peut que constater, une fois de plus les écarts entre les promesses et les lois votées (et pour leur application, on verra plus tard).

L’union sacrée

En principe, lorsque les parlementaires votent une loi, c’est pour le bien du Pays et des citoyens, (mais, je le concède, cette définition est discutable).

Pas de cela pour le vote de la loi NOTRe (Nouvelle Organisation du Territoire de la République), puisque ce texte voulu par le Gouvernement attaquait trop les intérêts des élus pour qu’il puisse être voté en l’état.

Pensez-donc, on avait prévu de supprimer les Conseils départementaux (ex-généraux), en transférant les compétences aux régions et aux intercommunalités, mais c’était sans compter sur le poids du lobby des élus départementaux et des radicaux de gauche qui ont combattu ce texte pour éviter d’en arriver à une telle extrémité, c’est-à-dire se faire Harakiri.

Le résultat est là, on conserve ce niveau de collectivité, mais lorsqu’on regarde les compétences qui lui restent on se dit qu’entretenir une assemblée d’élus entourée des cabinets et autres services de com, cela coûtera cher aux citoyens, mais cela ne fait rien, comme disent certains élus : « La démocratie a un coût ». A vous de voir si cela est justifié…

Pour l’intercommunalité, c’est à peu près la même chose, même si l’on constate des voies d’amélioration à terme (si le texte n’est pas revu entre temps).

Là ce sont les fameux « Maires ruraux » qui ont été à la manœuvre, appuyés par les parlementaires de tous bords, les sénateurs étant bien entendu en première ligne.

Pas question donc d’aller trop loin en matière de seuil pour les intercommunalités (on sera finalement à 15000 habitants, mais de nombreuses exceptions sont prévues…), ni en matière de vote au suffrage universel des déléguées intercommunautaires (refusé), les Maires des petites communes rurales ont été vent debout contre de trop grandes avancées, aidés en cela par les Sénateurs qui sont leurs grands électeurs, ne l’oublions pas ! Tout cela favorise un système dans lequel gauche et droite confondues tirent leur épingle du jeu.

Ils veulent notre bonheur

Et ils nous disent que c’est pour notre bien que l’on maintien le mille-feuille territorial, que la proximité est plébiscitée par les citoyens. Certes, les citoyens aiment bien avoir un élu de proximité, ne serait-ce que pour avoir un conseil ou pour donner son avis sur ce qui ne va pas dans la commune, mais faut-il pour cela maintenir 540 000 élus (dont une très grande majorité sont des élus communaux) dans notre Pays qui détient le record en la matière ?

Une seule raison justifie ce système : le clientélisme entre élus des différents niveaux et le rôle des partis politiques qui voient dans ce système de grosses opportunités de placer leurs poulains.

En gros, le saupoudrage judicieux de la réserve parlementaire entre plusieurs petites communes rurales, assurera au sénateur la bienveillance des grands électeurs que sont les Maires et la subvention du Conseil Départemental pour le rond-point pourra se traduire par une campagne du Maire en faveur du Conseiller.

Interrogez-vous

Maintenant que vous savez comment ça marche, que votre argent (puisque c’est l’argent des contribuables qui permet ce système) est aussi utilisé à des fins électorales, à assurer le cumul des mandats et une retraite dorée aux sénateurs, à payer les indemnités des élus, leur communication, etc…, demandez-vous si on ne pourrait pas faire mieux avec moins d’élus.

Pour moi, la réponse est évidente : c’est par l’intercommunalité que les choses doivent évoluer, pas celle où on maintient les choses en l’état, mais celle où le citoyen conserverait des Maires de proximité uniquement pour la gestion courante pour toutes les communes de moins de 400 habitants (18 000 sur 36 300, tout de même !) et où les autres décisions seraient prises au niveau intercommunal, une intercommunalité chargée également du plan d’urbanisme intercommunal pour toutes les communes quelle que soit leur taille, afin d’éviter les égoïsmes et les querelles de clocher sur l’implantation de logements sociaux, par exemple. Une intercommunalité, enfin, qui ne nécessiterait plus le maintien du Conseil Départemental, la Région les soutenant au titre de l’aménagement du territoire.

Nous en sommes loin et beaucoup de citoyens, peu avertis du fonctionnement que je décris et surtout de la captation du système par des élus au détriment de l’intérêt collectif, continueront à se battre bec et ongles pour que les choses restent en l’état, fusse au prix (ce qu’ils ignorent souvent) d’une fiscalité locale élevée.

Mais comme le citoyen pense que son vote sert encore à quelque chose, malgré le déni de démocratie du référendum de 2005 et de ce qui se passe actuellement en Grèce, il continuera à faire confiance à des élites autoproclamées qui cherchent avant tout à se maintenir en place et à plébisciter un système ruineux. 


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