Vivons-nous encore en démocratie en France ?
par Carreau G
jeudi 25 août 2011
Les Indignés se lèvent pour crier leur colère partout en Europe et dans le Monde. Partout ? Non. Un pays résiste encore et toujours à l’indignation. Le pays des droits de l’homme, de la révolution, etc
Six points pour étudier notre Démocratie Française à moins d’un an de l’élection présidentielle. Devons nous aussi nous indigner ou pas ?
Pendant ce temps les « indignés » se réveillent partout (sauf chez nous justement) en demandant notamment à ce que leurs droits et leurs pouvoirs de décision leur soient rendus, pour qu’un autre avenir se profile.
Pendant ce temps la jeunesse des pays Arabes se réveille, trop compressée sous l’étau d’un gouvernement qu’ils ne reconnaissent plus comme étant le leur, ils initient un feu de brousse que plus rien n’arrête.
Election, résistance ou révolution… en France nous avons déjà tout eu. A croire qu’on a déjà tout vu… et fier comme des paons d’habiter dans le pays des droits de l’homme nous ne regardons même plus quelle démocratie est la notre et surtout ce qu’on en fait au quotidien. Mais sommes-nous seulement encore en démocratie ?
Selon la définition de démocratie [récupéré sur le-dictionnaire.com, très semblable à celle du Larousse ou du petit robert], il s’agit d’un « régime politique dans lequel les citoyens exercent leur souveraineté et dispose du pouvoir », ou bien, « d’un régime politique dans lequel le peuple élit ses représentants. ».
Examinons ensemble 6 points qui, au regard des évènements actuels, posent la question de savoir si nous sommes encore dans une démocratie.
1. Un gouvernement légitime ?
Si on reprend les statistiques d’abstention :
· Présidentielle de 2007 : 16% au premier tour (83.77% de participation)
· Législative de 2007 : 39.6% au premier tour et 39.7 au second tour
· Régionale de 2010 : 53.65%
· Cantonale de 2011 : 55% d’abstention
On se rend compte que cette abstention ne cesse de croitre. Alors évidemment, les enjeux ne sont pas les mêmes pour chacune de ces élections, et il faudra attendre les élections de 2012 pour voir ce qu’il en est lors d’un scrutin majeur.
Toujours est-il qu’en regardant ces chiffres ce qui est le plus intéressant (à mon sens) c’est qu’à tout moment, les abstentionnistes auraient pu faire basculer ces scrutins dans un sens ou dans l’autre !
A quand un candidat avec l’étiquette abstentionniste ?!
Quand un gouvernement ne doit sa place qu’au désintérêt d’une majorité, peut on dire qu’il est légitime ?
Lorsque Jacques Chirac en 2002 avait été élu avec plus de voix de la gauche au second tour qu’avec des voix de droite, tout en appliquant une politique de droite, peut on dire qu’il était légitime ?
Question subsidiaire, est ce vraiment un désintérêt de la vie politique ? ne pourrait on pas parler de dégout, désillusion, désenchantement, ou « x »x autres synonymes signifiant que les gens n’y croient tout simplement plus ? Ou encore que le tout un chacun ne trouve pas chaussure à son pied et préfère ne pas voter par défaut alors que son sentiment profond le pousse à voter par conviction ?
2. Un peuple souverain ?
Cela dit, on se demande comment on pourrait croire que nos voix comptent et que la volonté du peuple souverain compte lorsque sa volonté est prise à revers.
A mon sens un référendum est une magnifique preuve de gouvernance du peuple. Des représentants élus, demandent (normalement sans a priori ni parti prit) l’avis de leurs concitoyens pour prendre la meilleure décision. Ou si ce n’est la meilleure au moins celle qu’ils veulent !
Lors du référendum de 2005 sur le traité de constitution européenne, 69 % de votant, et 55% de NON. Sauf erreur, non n’est pas un mot si difficile à comprendre que ça. C’est ce mot qui permet, selon Freud, de construire le Surmoi qui fera de l’enfant plein de pulsions et de désirs quelqu’un de raisonnable capable de se contrôler en fonction de normes et de règles.
Ce « non » n’a pas été entendu, et le bon peuple Français a été traité comme un gosse mal élevé qui ne sait pas ce qui est bon pour lui.
Selon wikipédia « Depuis 1958, le référendum est reconnu, avec le mode représentatif, comme l'une des deux modalités d'expression de la souveraineté nationale »
Et bien non, c’est un fait nous ne sommes pas souverain dans notre propre pays.
3. Les représentants du peuple ?
Pour en revenir à notre définition première de démocratie : le peuple élit ses représentants. Sauf erreur majeure, un représentant est quelqu’un qui représente : triste lapalissade, dans le cas présent. Lorsqu’on regarde notre gouvernement et plus largement nos élus, nous représentent-ils ? Ou bien question plus pertinente, sont-ils représentatif de la société Française ?
Sont-ils issus de la classe moyenne, des classes défavorisés, ou ont-ils plutôt tendance à naître du bon coté du portefeuille ?
Parlons-en de ces tendances lorsque Jean Louis Debré écrit un livre vantant les « Dynasties Républicaines ». Ne devrait-on pas plutôt se navrer qu’il n’existe plus de système de promotion sociale et que finalement, les postes clés de la gouvernance politique se transmettent de père en fils. J’avais cru comprendre que nous avions fait la révolution contre ce système. Belle réussite !
Cela dit, il ne faut pas désespérer, peut-être aurons nous un jour un ministre issu des minorités visibles (comme c’est si souvent dit), qui sera placé ailleurs qu’au sport, à la jeunesse, ou à l’intégration des minorités ou un autre équivalent.
Sans doute, un matin nous aurons un ministre raciste comme un bon dixième de notre population… ah non, je retire, nous avons déjà eu.
Ceux qui font des abus de bien sociaux ? On a aussi…
Des adeptes du népotisme ? Ça aussi on a…
Quelle belle représentation du peuple français !
Je ne sais pas vous, mais très très personnellement, je ne me sens pas représenté par l’actuelle classe politique (ou devrait on parler de Caste politique ?)
4. Trois pouvoirs bien distincts ?
Presque uniquement pour le plaisir, trois citations de Montesquieu :
Il n'y a point encore de liberté si la puissance de juger n'est pas séparée de la puissance législative et de l'exécutrice (De l'esprit des lois)
C'est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser ; il va jusqu'à ce qu'il trouve des limites. (De l'esprit des lois)
Il faut que par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir (De l'esprit des lois)
Ces citations parlent d’elles-mêmes et grâce à ce mode de pensée en France, le législatif est séparé de l’exécutif qui est séparé du judiciaire.
Si ce n’est que l’argument de campagne des législatives de 2007 a été : « vous nous avez élu, pour qu’on puisse faire ce qu’on a dit, il faut que le parlement soit de notre coté ». En conséquence, on a aujourd’hui un législatif complètement sous le joug d’un exécutif débordant de pouvoir.
Heureusement, la justice est là pour réguler le tout et mettre en balance l’exécutif. Si ce n’est qu’elle est lente à agir, qu’elle hésite à attaquer les gens de pouvoir et que lorsqu’elle le fait c’est sous les pressions et les menaces.
Mr Strauss Kahn aurait il seulement été inquiété une seconde si les faits qui lui sont reprochés s’étaient déroulés en France ?
En dehors des réalités mesurables, l’impression généralement ressentie est qu’il existe une justice à « x » vitesses, « x » représentant les actifs financiers ou le pouvoir politique et relationnel du présumé innocent.
5. Tous égaux dans nos voix : une voix, un vote ?
On assiste en ce moment à une démarche des Richissimes concitoyens qui dans un élan d’altruisme merveilleux demandent au gouvernement de les taxer plus de façon exceptionnelle ?
Je n’ai pas mémoire, mais peut-être Alzheimer m’atteint, que l’état ai attendu ma permission pour m’imposer un impôt…
Sans tomber dans le sarcastique ou l’ironie soldée, il faut reconnaitre l’abnégation dont sont capables toutes ses grandes fortunes après qu’on leur ait offert le bouclier fiscal, qu’on envisage une baisse / suppression de l’ISF, alors même qu’ils peuvent embaucher les Rois des Comptables pour diminuer la note via de sombres magouilles lorsque les Impôts tombent.
D’ailleurs, ce n’est pas :
- Comme si la crise durait depuis 2008
- Comme s’ils n’étaient pas largement à l’abri du besoin, des surendettements qui ont augmenté de 11% cette année etc
- Comme si la crise n’était pas due à une sphère économique immorale et pensant à court terme, sphère sur laquelle ils se sont largement appuyés pour construire leurs richesses
La question au point où on en est, est plutôt, pourquoi ne les a-t-on pas taxés plus tôt ? Est ce que la sphère politique attendait leur permission ? Bel exemple de souveraineté nationale !
Un naïf et idéaliste électeur se demanderait si le pouvoir n’est pas entre leurs mains plutôt que dans les siennes, si petites qu’elles ne peuvent porter qu’une seule voix lors d’un vote.
6. Le pouvoir appartient-il à un peuple éduqué, capable de jugement critique !
Quand on regarde les élections, on peut se dire, tant pis pour les abstentionnistes, s’ils veulent exercer leur pouvoir qu’ils le fassent. Mais parlons des votants. Depuis que notre Omniprésident est au pouvoir, qui n’a pas entendu « ah j’ai voté pour lui, mais je le regrette maintenant ! », ou « j’aurai su, j’aurai voté pour quelqu’un d’autre » ou d’autres formules du même ordre ?
D’une certaine façon, et si cela ne concernait qu’eux, on pourrait dire un « bien fait », qui aurait le mérite de soulager, parfois. Mais est-ce vraiment bien fait ?
Dans une démocratie idéale, un monde parfait qui pour une fois ne serait pas celui des Bisounours ou des Télétubbies, nous serions des citoyens, votants, capables de jugements critiques, d’aller rechercher l’information, d’approfondir cette information, et même de la comprendre (j’ai bien dit idéalement J). Nous serions des citoyens au fait de la complexité du monde, de ses enjeux, des tenants et aboutissant de ses actes etc.
A la place, comme le disait si bien Georges Frêche avant d’être élu : « En France il y a plus de cons que de gens intelligents, alors moi je fais campagne pour les cons ! » le fait qu’il ait été élu en dit long.
D’une certaine manière nous sommes tous coupables. Mais, n’est-ce pas le gouvernement qui programme une bonne part de notre éducation ? Pour mieux conduire un troupeau dans le sens que l’on souhaite, n’est-ce pas plus simple si tout le monde suit, sans réfléchir, sans se poser de question ?
« Ah les bons cons » doivent-ils parfois se dire une fois leurs fesses prestigieuses posées sur un siège d’élu !
Sans devoir appeler Mulder ou Scully pour rechercher la vérité, il y a sans doute de quoi s’inquiéter un peu. Non ?