Aider les TPE, c’est efficace. Nouveau : on a des preuves !

par Benoît Granger
mercredi 18 mai 2005

Nombre de Conseils régionaux en France sont en train d’affûter leurs décisions. Prochainement, la plupart des aides publiques aux entreprises vont leur être transférées par l’Etat. Il leur faudra faire des choix. Donc la question préalable est : les aides sont elles efficaces ? Des coups de pouce ciblés avec de l’argent public donnent-ils des résultats mesurables ? Plus familièrement : en aurons nous pour notre argent ?

Des études récentes prouvent que vis à vis des créateurs d’entreprises et des TPE, les très petites entreprises, cette efficacité est réelle et se mesure.

C’est la démonstration apportée par des analyses économétriques récentes portant sur une génération de créateurs d’entreprise. En 1994, l’INSEE a démarré une grosse enquête sur les créateurs d’entreprise de l’année, puis les a suivis pendant 5 ans. Bien sûr, on sait que nombre d’entre eux ont arrêté (volontairement ou non) leur exploitation ; c’est le fameux « taux de casse », dans lequel on confond d’ailleurs souvent ceux qui « échouent » involontairement, peu nombreux, et ceux qui décident de mener d’autres projets.

Aide publique + emprunt bancaire = succès

Les données de l’enquête permettent de comparer ceux qui ont démarré avec une aide publique à ceux qui ont démarré sans. Et la démonstration est claire, y compris en tenant compte de nombreuses autres variables. Cinq ans après, ceux qui ont démarré avec une aide publique sont plutôt en meilleure forme que les autres (c’est vrai pour les chômeurs-créateurs et même pour les chômeurs de longue durée) ; et ceux qui ont démarré avec une aide et un emprunt bancaire vont encore mieux. Donc les études économétriques démontrent qu’il y a un lien de cause à effet entre le fait de recevoir une aide, et le fait de créer, à 5 ans, des emplois et des richesses significatives.

Les entrepreneurs aidés sont aussi plus dynamiques que les autres

Une autre étude récente, beaucoup plus empirique, consistait à demander à des patrons de TPE s’ils avaient reçu une aide publique et laquelle ; puis de comparer leurs résultats économiques avec ceux de TPE disant n’avoir bénéficié de rien . Là encore, on mesure une différence de résultats. Ces entreprises aidées ont plus embauché et embauché plus souvent que les autres ; elles ont un solde en emplois supérieur ; elles ont plus souvent un chiffre d’affaires en progression (alors qu’il est resté stable sur 5 ans pour les autres) ; elles ont plus souvent investi, et elles déclarent plus souvent avoir des problèmes financiers. Bref, ces entreprises sont managées par des entrepreneurs ambitieux, dynamiques, qui veulent développer et prennent des risques.

Ces derniers disent apprécier l’aide dont ils ont bénéficié. Mais l’ingratitude étant la qualité préférée des gens heureux, ils estiment que l’aide (qu’ils disent avoir apprécié) ne leur a pas été « d’une grande utilité » ! —même s’ils sont prêts à la recommander à leurs collègues chefs d’entreprises...

Ainsi, ces résultats convergents devraient être utilisés par les décideurs politiques. Qui craignent deux choses : le syndrome « cash and carry » (je prends l’argent, et je ferme la boutique), et le syndrome « mer de sable » (l’aide se perd dans l’océan des difficultés de l’entreprise). Les deux sont faux ; très majoritairement.

(L’analyse de cette étude figure dans le rapport « Les aides publiques aux TPE », Commissariat général du Plan, paru à la Documentation française début 2005.

mesurer la rentabilité macro-économique ?

Reste un point à élucider, qui demandera des travaux longs et passionnants, c’est la rentabilité globale, macro-économique, de l’opération. Pour résumer : si je mets 100€ d’argent public dans 100 TPE en création ou en développement, vais-je récupérer, à terme, plus de 100€ en richesses créées au profit de mon territoire ? Un début de réponse figure dans une remarquable étude macro économique faite en pays de Loire par un cabinet spécialisé, Opus 3. L’étude mesure tout ce qui entre dans les entreprises (aides, exonérations, etc...) et tout ce qui sort (cotisations sociales, impôts, etc...) au profit de la collectivité, le résultat est très positif ; et pourtant il s’agit d’entreprises d’insertion. Voilà qui peut permettre de se faire une idée de leur rentabilité !

Voir : Dominique Redor et Madeleine Andreff, Université de Marne La Vallée :« L’aide publique au développement des firmes créées par les chômeurs », Communication au colloque AFSE 18 mai 2004.

Benoît Granger


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