10 ans après (5/6) : une nouvelle bulle prête à exploser

par Laurent Herblay
vendredi 25 janvier 2019

Ce qu’il y a d’extraordinaire aujourd’hui, c’est que tout le monde s’attend à un nouveau krach financier, signe ultime de la conscience que les leçons n’ont pas été tirées et que notre modèle économique reste totalement déséquilibréBien des nouvelles semblent pouvoir faire vasciller le château carte financier. Paradoxalement, malgré les bulles existantes, les quelques coups de grisou pourraient repousser l’issue.

 

Des marchés façon cocotte minute proche de l’explosion
 
Cela fait quelques années que les marchés tremblent : crise de la zone euro, recul de la croissance en Chinehausse de 2,9% des salaires aux Etats-Unis (sic), ou déclarations protectionnistes de Donald Trump  : les marchés financiers semblent presque toujours au bord de la crise de nerf, malgré les résultats financiers historiques qui se succèdent. Il faut dire que la bible des marchés évoque déjà la prochaine récession. Les raisons sont innombrables. En premier lieu, les bulles délirantes qui se créent autour des valeurs de la nouvelle économie. Certes, Apple, Google ou Facebook génèrent aujourd’hui des profits absolument délirants, mais tout le monde n’y parviendra pas également.
 
Du coup, l’année 2018 a été marqué par l’explosion d’une première bulle : celle des crypto-monnaies. Le bitcoin, qui approchait les 20 000 dollars en décembre 2017, a terminé l’année en baisse de plus de 80%, sous les 4 000 dollars. Quelques gogos y auront perdus des plumes du fait de l’effarant laisser-faire de dirigeants qui autorisaient une promotion extravagante de cette fausse-monnaie, que même la patronne du FMI avait défendue… Mais cette explosion est pour l’instant trop circonscrite. Nous ne sommes pas encore en 2001 et les licornes se portent bien, pour l’instant. Tesla a même réussi à gagner de l’argent au troisième trimestre, même si sa valorisation reste totalement délirante.
 
 
Et, de manière totalement abracadabrantesque, Uber a vu sa valorisation atteindre le cap de 120 milliards de dollars, alors même que l’entreprise a perdu plus d’un milliard au 3ème trimestre, sur un chiffre d’affaires de 3 milliards ! Le modèle d’affaire croisant Attila et sangsue de ces jouets sous stéroïdes financiers des marchés n’en reste pas moins fragile, et il est difficile de ne pas penser que 2001 pourrait se répéter… En effet, il faut rappeler que le prix des actions est extrêmement élevé, plus qu’en 2008 ou qu’en 1929, seulement inférieur au niveau de 2001, ce qui en dit long… Les allumettes semblent nombreuses qui pourraient mettre le feu au château de cartes financier de l’époque.
 
Bien sûr, certains justifient ces niveaux par la faiblesse des taux d’intérêt ou les niveaux raisonnables des valorisations en Europe, mais les taux remontent aux Etats-Unis. Et le passé laisse penser que les marchés ne savent pas se restreindre. En outre, la réglementation est insuffisante, d’autant plus que le comité Bâle peut du jour au lendemain alléger de moitié les exigences de fonds propres. Pire, subsiste toujours le risque de la « finance de l’ombre  », peu régulée et qui s’est développée en Chine au point d’y représenter plus de 10 000 milliards de dollars d’actifs… La Banque de France évoquait un quasi-triplement des actifs exposés à un risque de sortie massive depuis 2007, à 32 300 milliards de dollars, 75% des actifs du système financier parallèle. On se demande bien pourquoi rien n’a été fait depuis…
 
 
Et pour couronner le tout, le FMI et la Fed se sont inquiétés de l’envolée des prêts à effets de levier, qui ont eu le mauvais goût de dépasser les records d’émission de 2007 en 2017 et dont le montant total dépasse les 1 200 milliards de dollars, 50% de plus qu’en 2008… Tout ceci s’ajoute aux nombreux instruments qui semblent déjà depuis plusieurs années faire peser un sérieux risque, du trading informatisé, qui a déjà provoqué des krachs, ou différents fonds qui font terriblement penser aux montages à l’origine de la crise de 2008. Car le principe est le même à chaque fois :une bulle de dettes incontrôlée qui augmente la demande d’actifs, et donc leur prix, au-delà de leur valeur véritable, avant une prise de conscience des excès, qui vient souvent trop tard et provoque donc un krach.
 
 
En un sens, le coup de grisou de la fin de l’année n’est pas forcément annonciateur d’un krach à court terme. La pression pourrait seulement avoir baissé d’un cran, baissant la garde de marchés pourtant inquiets et les vagues de résultats 2018 pourraient propulser les marchés plus hauts, en attendant une autre hausse des taux ou la faillite d’une licorne, déséquilibrant le château de cartes, d’ici quelque temps
 

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