Alstom : à quand une 3ème solution, autre que le démantèlement ?

par Laurent Herblay
mardi 13 mai 2014

Depuis quinze jours, la France assiste au bal des charognards du capitalisme au dessus d’Alstom. Pourtant, l’entreprise est bien vivante, comme le révèlent ses derniers résultats financiers. Contrairement à ce que disent certains, nous n’avons pas à nous résoudre au démantèlement de l’entreprise.

La peste et le choléra
 
Jusqu’à présent, le gouvernement, comme la majorité des médias, au premier rang desquels le Monde, présentent le futur d’Alstom comme une simple alternative entre General Electric et Siemens. Pourtant, cela revient à accepter de facto le démantèlement de l’entreprise, une chose paradoxale sachant qu’elle continue de gagner de l’argent. Car il y a un point commun dans les offres des deux entreprises évoquées, à savoir le fait de récupérer tous les actifs de l’entreprise dans l’énergie, soit 70% de son activité. Ce faisant, ce serait un Alstom considérablement réduit qui continuerait à opérer depuis la France, l’essentiel de ses actifs étant alors passés sous pavillon étranger, dans une filière pourtant stratégique.
 
Il est assez choquant de voir Arnaud Montebourg prendre ouvertement partie pour Siemens, en critiquant l’offre de GE, puis en allant en Allemagne pour soutenir Siemens. Bien sûr, si General Electric a une activité importante en France, il faut bien reconnaître que seul l’intérêt de ses actionnaires serait pris en compte si l’entreprise mettait la main sur Alstom et ce n’est pas la cession d’une partie de ses activités transports qui changerait grand chose car l’activité énergie pèse beaucoup plus lourd. L’option Siemens semble presque pire tant les échanges d’activité ressemble à un marché de dupe pour Alstom puisque la division transport de Siemens pèse plus de deux fois moins que l’activité énergie d’Alstom (6 milliards de chiffre d’affaires vs 14), et qu’elle perd de l’argent (448 millions d’euros sur le dernier exercice).
 
Une troisième voie existe

Patrick Kron, PDG d’Alstom, soutient que les résultats d’Alstom justifient la cession de ses activités dans l’énergie. Mais le détail des résultats dit autre chose. Certes, le bénéfice net a baissé de 28% et le flux de trésorerie est devenu négatif. Mais il faut noter que l’entreprise a quand même gagné 556 millions d’euros, pour un chiffre d’affaires stable, au-delà de 20 milliards d’euros. Mieux, le résultat opérationnel n’a baissé que de 3%, la chute du résultat net s’expliquant par des frais de restructuration exceptionnels (dont on peut se demander s’ils ne sont pas utiles pour justifier le démantèlement de l’entreprise, ce que peut indiquer le flux de trésorerie qui s’est fortement redressé au second semestre).

Face à deux options, GE comme Siemens, qui reviendraient toutes les deux à un démantèlement d’Alstom, puisque le prédateur engloutirait plus de deux-tiers de l’activité de notre champion national, il y a urgence à trouver une 3ème option, ce qui ne devrait pas être si difficile pour une entreprise qui fait 20 milliards d’euros de chiffres d’affaires, qui reste sensiblement profitable et dispose d’un beau carnet de commandes. Si elle a besoin de grandir pour réussir, le gouvernement a le devoir de travailler sur une alliance avec une entreprise française, comme Areva, ce qui permettrait à l’ensemble d’atteindre une taille plus conséquente encore sur la filière énergétique. Si cela n’est pas possible, l’Etat doit aider Alstom à continuer son chemin seul, même si cela nécessite à nouveau une prise de participation publique au capital.
 
Il est ridicule de dire qu’il n’y a que deux issues pour Alstom : être croqué par GE ou Siemens. L’exemple de 2004 montre qu’il est parfaitement possible pour l’Etat de prendre une participation temporaire pour aider l’entreprise. Et cela serait bien plus facile aujourd’hui puisque l’entreprise va bien mieux qu’alors.

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