Avis de reprise illusoire pour 2014

par Laurent Herblay
mercredi 31 juillet 2013

Le 14 juillet, François Hollande s’est attiré beaucoup d’ironies en proclamant la sortie de crise. C’est que si techniquement, la France devrait bien sortir de la récession, comme je l’annonçais il y a 6 mois, il ne s’agira que d’une timide éclaircie dont l’immense majorité de la population ne le ressentira pas.

La croissance, c’est maintenant ?
 
La prévision économique est un sport délicat, mais il y a six mois, j’avais publié un papier qui pronostiquait « une reprise en 2014 (certes) aussi faible qu’illusoire pour la grande majorité de la population » et que « si l’année 2013 a toutes les chances d’être une nouvelle année de crise, cela est moins évident pour 2014. En effet, un certain nombre de facteurs semblent indiquer que nos économies pourraient légèrement repartir », ce qui avait été confirmé en mars par la publication d’indicateurs positifs, malgré la poursuite de la récession au premier trimestre, et probablement au second pour la zone euro.
 
Je crois qu’il est essentiel d’avoir un regard équilibré sur la situation, sous peine de perdre de la crédibilité en faisant des prévisions trop catastrophistes. A ce titre, le bulletin du GEAB devient chaque jour plus ridicule  : ils annoncent pour les trois à six mois à venir une crise encore plus forte que celle de 2008 chaque trimestre depuis le printemps 2009. Bien sûr, un jour, ils auront sans doute raison, mais à force d’avoir crier au loup… Pour ma part, je persiste à croire que la zone euro va sortir de la récession en 2014 et probablement dès le second semestre 2013, pour les mêmes raisons qu’il y a 6 mois.
 
Les indicateurs avancés de sentiment économique confirment en effet les anticipation d’il y a six mois. Il y a trois raisons pour cela. Tout d’abord, les économies européennes ont tellement souffert que le rebond sera en partie mécanique (après 6 ans de baisse, en 2014, le marché automobile devrait au moins être stable). Ensuite, devant l’échec patent des politiques d’austérité, la vitesse de réduction des déficits sera un peu moins grande, ce qui donnera un peu d’air aux économies. Enfin, malgré des performances décevantes, la croissance pourrait repartir dans les pays émergents.
 
Une croissance aussi maigre qu’illusoire
 

Malgré tout, les perspectives pour 2014 ne sont guère riantes. Elles font état de 0,8% de croissance, pas assez pour amorcer une décrue du nombre de chômeurs si on ne compte pas sur les emplois aidés et les radiations… Mais quelle sera la réaction alors ? Après plus de trois années de crise de la zone euro, il est aussi possible que cette amélioration (certes très relative) de la situation soit une vraie bouffée d’oxygène pour tous les acteurs économiques qui pourraient, lentement mais sûrement, devenir moins pessimistes. Cela pourrait engendrer un cercle vertueux de croissance.

 
Bien sûr, il ne faut pas en attendre grand chose. Dans le contexte actuel de la mondialisation et d’une course suicidaire à la compétitivité, il est bien évident que la demande restera faible. Néanmoins, avec des taux d’intérêts extrêmement bas, le crédit pourrait reprendre, comme il l’a déjà fait en Grande-Bretagne, boostant la croissance au 2ème trimestre à 0,6% (2,4% en rythme annuel). Dans ce scénario, une nouvelle bulle de crédit, provoquée par les politiques monétaires ultra-accomodantes, pourraient apporter de l’eau au moulin et nous permettre de sortir de la récession.
 
Cependant, nous ne sommes pas à l’abri d’une rechute du fait des incertitudes politiques en Grèce, au Portugal ou en Italie. Et surtout, cette reprise illusoire ne règle aucun des problèmes posés par la crise de 2008, à savoir l’effet dépressif de la mondialisation sur le niveau de l’emploi et du pouvoir d’achat dans les pays dits développés, ni la spéculation délirante du monde financier, ou l’accroissement des inégalités sur l’ensemble de la planète. Bref, alors qu’il faut changer de politiques, elle pourrait apporter une petite bulle d’oxygène aux dirigeants usés et fatigués de notre pays.
 

Malgré tout, il est aussi probable que cette reprise soit tellement illusoire et le discours de nos dirigeants tellement décalé avec le sentiment de la population que cette sortie de récession ne calme pas les velléités de changement de nos compatriotes. C’est ce que l’on peut souhaiter pour l’avenir.


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