Chômage, CAC 40 : la grande divergence

par Laurent Herblay
mercredi 13 août 2014

Envolée de 18% des profits des entreprises du CAC 40 au premier semestre, légère baisse du déficit commercial, nouveau record du nombre de chômeurs  : l’aggrégation de ces dernières données estivales démontrent remarquablement tout ce qui ne va pas dans le système économique actuel.

Champagne en haut, ceinture en bas
 
Bien sûr, l’énorme amende que BNP Paribas a négocié et accepté de la justice étasunienne fait que les profits du CAC 40 affichent une baisse de 5,2% au premier semestre 2014, mais si on exclut cet élément exceptionnel, alors, les profits de l’élite du capitalisme français se sont envolés de pas moins de 18% ! Cela semble totalement surréaliste alors que que la croissance économique est en berne depuis si longtemps, et que tant d’autres indicateurs sont dans le rouge, mais il n’est pas inintéressant de constater que la marge opérationnelle est passée de 8,2 à 9,2% dans une période pourtant difficile sur tous les plans, avec une faible demande, mais aussi des augmentations d’impôts. Cette performance est d’autant plus stupéfiante que nos champions hexagonaux ont souffert de la cherté de l’euro.
 
 
Parallèlement, le déficit commercial est au plus bas depuis 4 ans, à 29,2 milliards d’euros, soit 2,7 de moins que l’an dernier. Mais cette bonne nouvelle n’est qu’apparente car les exportations sont en baisse et qu’ils sont surtout le produit du recul des importations, et notamment des hydrocarbures, du fait de la mauvaise conjoncture. Mauvaise conjoncture qui se retrouve dans la hausse continue du niveau du chômage, qui a atteint un nouveau record en juin, comme le souligne Jacques Sapir sur son blog. Officiellement, on parle de 11,8% de taux de chômage. Mais si on compte les personnes dispensées et celles qui ont travaillé moins de 70 heures et qui cherchent un temps plein, alors, on monte officiellement à 15,1%. Jacques Sapir note que les radiations permettent sans doute de gagner 1,4 points.
 
Un système condamné
 
Sapir note que si l’on compte toutes les catégories officielles, à savoir les personnes qui ont travaillé plus de 70 heures mais recherchent un emploi ou les contrats aidés, alors on atteint 19,9%, sans compter les radiations abusives. Bref, en réalité, c’est un Français sur cinq qui est aujourd’hui en difficulté sur le marché du travail. Comme le dit l’économiste, « on ne dira jamais assez les drames qui se cachent derrière ces chiffres, les vies brisées, les espoirs enfuis, les couples saccagés, et les suicides, certainement plus nombreux par mois, que les 54 morts de la catastrophe du vol AH5017  ». Philippe Séguin avait bien raison de dénoncer le « Munich social  », qui se perpétue depuis 20 ans.
 
Il y a tout de même quelque chose d’indécent à voir le décalage colossal et sans cesse croissant entre la fortune d’une petite minorité et les difficultés grandissantes d’une immense majorité, soumise au chômage, à la précarité croissante du marché du travail et à une baisse du pouvoir d’achat, masquée dans la moyenne par l’envolée des très hautes rémunérations. Mais cette grande divergence finira tôt ou tard par provoquer une remise en cause profonde de notre système économique, comme Roosevelt l’avait fait dans les années 1930, pour en créer un nouveau qui profitera de nouveau à tous.
 
Quelle meilleure illustration du fait que le système économique actuel s’apparente à la loi de la jungle. Dans une période où les ressources sont stables, la petite minorité des plus forts continuent à avoir toujours plus, au détriment de la grande majorité, qui n’est plus protégée par l’Etat.

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