Chômeurs... population active : de quoi parle le gouvernement ?

par Aimé FAY
lundi 3 septembre 2007

Le gouvernement vient de publier les chiffres du chômage et la polémique continue encore. Reconnaissons que ces chiffres ne sont pas mauvais. Avec seulement 1 958 800 chômeurs, représentant 8 % de la population active, ces chiffres sont les meilleurs depuis plusieurs décennies. Mais, sont-ils les vrais chiffres ? Sont-ils vraiment ceux que possède l’Insee dans ses bases de données ?

La vérité est simple. Il suffit d’aller la voir sur le site Internet de cet organisme public ! Alors qu’est-ce qu’on y trouve ?

1° - D’abord des définitions. Celles au sens du BIT, de la qualité de chômeur et de la population active. Voici les définitions de l’Insee, reproduites in extenso.

Chômeur :

En application de la définition internationale adoptée en 1982 par le Bureau international du travail (BIT), un chômeur est une personne en âge de travailler (15 ans ou plus) qui répond simultanément à trois conditions :

- être sans emploi, c’est-à-dire ne pas avoir travaillé, ne serait-ce qu’une heure, durant une semaine de référence ;

- être disponible pour prendre un emploi dans les 15 jours ;

- chercher activement un emploi ou en avoir trouvé un qui commence ultérieurement.

Remarque  :

Un chômeur au sens du BIT n’est pas forcément inscrit à l’ANPE (et inversement).


Population active :

La population active regroupe la population active occupée (appelée aussi "population active ayant un emploi") et les chômeurs.

La mesure de la population active diffère selon l’observation statistique qui en est faite. On peut actuellement distinguer trois approches principales : au sens du BIT, au sens du recensement de la population, au sens de la Comptabilité nationale.

 

2° - Ensuite, on trouve aussi des chiffres dans le site de l’Insee et notamment ceux sur la population active au sens du BIT (en milliers) :

2002

2003

2004

2005

2006

27 096

27 373

27 518

27 637

pas encore connus

Le matériel mis à notre disposition par l’Institut est tout à fait remarquable. Tous les économistes sérieux s’en inspirent et les étudiants aussi. Alors, pourquoi pas notre gouvernement ?

S’il y a vraiment 8 % de chômeurs par rapport à la population active, il y a donc, au minimum, 2 210 000 chômeurs (27 637 000 x 8 %). Or le gouvernement annonce seulement 1 958 800 personnes au chômage. La différence est quand même de taille ! Il est vrai que psychologiquement être au-dessous de la barre de 2 millions des chômeurs, c’est bien.

La méthode Coué est vraiment devenue le fil directeur qui structure la communication de nos dirigeants. Mais alors, pourquoi ne pas aller jusqu’au bout de la démarche et dire que le taux de chômage, en France, est de 7 % seulement ? Il suffit pour cela de comparer le prétendu nombre de chômeurs, 1 958 800, à la population active (cf. supra), pour avoir seulement 7 % de Français en recherche d’emploi (1 958 800 / 27 637 000 x 100 = 7 %).

Cette méthode est-elle bien sérieuse ? Privilégier la forme sur le fond, la parole sur l’action, le maquillage sur la réalité... ne peut durer indéfiniment. Aujourd’hui, en attendant l’aubaine d’une grosse croissance hypothétique, le gouvernement met le paquet pour laisser croire que la France va bien et que, s’il y a des points négatifs c’est de la faute des autres : à l’euro, aux marchés financiers américains, à la concurrence chinoise, à la pénurie de blé due à la sécheresse, etc.

Beaucoup de pays ont déjà utilisé une telle méthode, bourrée d’artifices. Tous en sont revenus plus affaiblis qu’ils ne l’étaient avant.

Il faudra bien qu’un jour, nos dirigeants, de droite comme de gauche, aient le courage de ne plus nous considérer comme des demeurés en sciences économiques à qui on ne peut jamais dire la vérité sur les chiffres.


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