Chute de la bourse chinoise : krach ou simple correction ?

par Laurent Herblay
mercredi 5 août 2015

Les variations de la bourse de Shanghai occupent l’actualité économique depuis mi-juin. Avec une baisse de 30% en moins d’un mois, cela ressemble à un krach, qui pourrait même peser sur l’économie mondiale. Mais une prise de recul amène à relativiser ces hoquets venus d’Asie.

 

Exubérance irrationnelle venue de l’Est
 
Les hoquets de la bourse de Shanghai sont impressionnants. Cette chute de 30% en un mois ressemble aux krachs de 1929 ou 2008. Pas moins de 3500 milliards de dollars se sont évaporés. Mais il faut néanmoins la mettre en perspective avec la progression des mois précédents. En effet, malgré cette correction, sur un an, l’indice de la bourse de Shanghai est quand même en progression de plus de 70%, puisqu’il était à peine au-delà de 2000 points l’été dernier, avant de dépasser le cap des 5000 points ce printemps, soit 150% de hausse en moins d’un an, avant d’osciller entre 3373 et 4317 points en un mois, chaque hoquet provoquant une nouvelle vague d’angoisses dans bien des médias.
 
Le fait que le marché soit encore 70% plus élevé qu’il y a un an relativise la chute des dernières semaines, une prise de bénéfice, une correction après une forte progression. La violence de la correction n’est que le produit de la violence de la hausse passée. A l’exubérance irrationnelle de la hausse réplique l’exubérance irrationnelle de la baisse. Tant que la chute reste à ce niveau, il y a peu de danger pour l’économie chinoise, et encore moins mondiale. En outre, The Economist rappelle aussi que la valeur des actions échangeables ne représente qu’un tiers du PIB Chinois, contre plus de 100% dans la plupart des pays, et que les actions représentent seulement 15% du patrimoine des ménages.
 
Quel avenir pour la Chine et le monde ?
 
Cette crise boursière est intéressante à plus d’un titre. D’abord, elle montre bien que, sur le plan financier, Shanghai se rapproche du mode de fonctionnement des autres économies, avec des marchés libérés au point que l’on retrouve les mêmes mécanismes aux sources des krachs de 1929 ou de 2008, comme le financement à la marge, qui représentait 12% des échanges, chiffre sous-estimé par le fait qu’il existe un marché de l’ombre développé… Mais parallèlement, la Chine conserve un mode de fonctionnement moins libéral puisque l’Etat est intervenu vigoureusement pour stopper la chute du cours des actions, suspendant la cotation de pas moins de 90% des actions début juillet.
 
Mais même si la baisse actuelle n’est pas si préoccupante et si l’Etat semble conserver des moyens d’agir sur les marchés, ces évènements n’en restent pas moins inquiétants à plus long terme. En effet, le Chinext, qui rassemble les actions de la nouvelle économie, capitalisait 147 fois ses bénéfices début juin, un niveau comparable à celui de la bulle Internet du tournant du siècle. Et même après la baisse, ce ratio rejoint les niveaux totalement délirants de valorisation de la nouvelle économie, tel Uber, qui vaudrait 50 milliards en réalisant à peine 415 millions de chiffres d’affaires pour 470 millions de pertes. Difficile de ne pas penser qu’un jour, la bulle financière chinoise finira par exploser.
 
Pour le moment, la baisse du marché chinois, si elle démontre les dangers de la libéralisation financière de la Chine, avec tous les dangers que cela amène, n’est pas préoccupante. Il s’agit sans doute d’une simple correction, aussi forte que la hausse récente, et non pas un krach.

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