Crise économico-financière : côté russe

par ÇaDérange
vendredi 14 novembre 2008

Nous avons tendance à croire que nous sommes les seuls, ou tout au moins les seuls à ce niveau, frappés par la crise financière et économique qui frappe le monde. Dans un article du 7 novembre, je vous faisais part des effets de cette crise économico- financière sur les pays producteurs de pétrole dans différentes parties du monde. Aujourd’hui je voudrais attirer votre attention sur les effets de la crise... en Russie.

La Russie vient de passer quelques années fastes à se développer rapidement sous la direction de Vladimr Poutine et via les fameux oligarques, une poignée de milliardaires dont la fortune s’est bâtie à la suite des nationalisations et qui contrôlent une bonne partie de l’économie nationale. Comme Oleg Deripaska qui contrôle Rusal, le géant russe de l’aluminium ou Alexei Miller qui dirige Gazprom ou Mikail Fridman.

Autre caractéristique russe, la dépendance du budget national de ses exportations de pétrole, mais surtout de gaz et donc de leur prix. La part du pétrole et du gaz représente en effet 70 % des exportations et un tiers du produit intérieur brut du pays. C’est dire que le passage du prix du baril de 150 dollars aux 65 d’aujourd’hui ne peut être que ressenti douloureusement en Russie. Or, la Russie a beaucoup dépensé ces dernières années pour rénover ses infrastructures, moderniser l’armée, se payer une guerre ou deux, mais pas trop investir dans l’accroissement de ses capacités de production. La baisse du prix du brut affecte donc sévèrement la Russie, même si pour le gaz, pour lequel les contrats sont à long terme, le véritable effet ne devrait se faire sentir qu’en 2009.

La Russie est par contre beaucoup plus affectée par la baisse brutale de la bourse. Une bourse de Moscou qui a dû être fermée au pire moment de la chute de Wall Street et dont la valeur des entreprises cotées à fondu dramatiquement. Son fleuron Gazprom est ainsi passé d’une valorisation de 365 milliards de dollars, troisième valorisation au monde derrière ExxonMobil et Petrochina à 115 aujourd’hui et 25e capitalisation mondiale seulement. Au grand dam de son PDG qui entrevoyait les 1 000 milliards de dollars de capitalisation et le premier rang mondial !

Conséquence de cette chute des capitalisations, la plupart des grandes sociétés ont dû faire face au "credit crunch", à la perte de confiance, à la chute de leurs programmes d’investissements et la difficulté de trouver à se refinancer. D’autant plus que les oligarques russes pratiquaient beaucoup les refinancements à court terme. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, l’Etat Russe a dû venir au secours de ces oligarques, un comble dans un pays où, lors de la dernière crise, en 1998, c’étaient les oligarques qui étaient venus au secours de l’Etat russe.

Vladimir Poutine a dû ainsi mettre en place un plan de quelque 200 milliards de dollars pour aider les sociétés desdits oligarques à se refinancer. Plan qui passera par trois banques publiques ou semi-publiques, la VEB, la Gazprombank et la Sherbank. Le premier bénéficiaire a été l’oligarque Oleg Deripaska et Rusal qui devaient en urgence rembourser un prêt de 4,5 milliards de dollars auprès de onze banques mondiales qui lui avait été accordé sur deux ans pour racheter le géant russe du Nickel Norilsk. En cas de défaut, c’était 25 % de Norislk qui passait entre les mains des banques occidentales !

Au total, les oligarques sont estimés devoir refinancer 363 milliards de dollars d’ici à mi-2009.

Le Russe moyen connaît peu la bourse et n’a donc pas été touché par sa chute brutale. Par contre, dans la foulée de sa chute du baril de brut, c’est le rouble qui a été fortement attaqué alors qu’il n’est en principe pas convertible. Le rouble est ainsi passé d’1 dollar pour 24 roubles à un pour 28. Et les queues ont commencé à se former... non pas à la porte des banques comme en Angleterre pour Northern Rocks, mais à celles des bureaux de changes. Au point que l’on parle aujourd’hui de... dévaluation du rouble.

On est ainsi revenu... à la boîte en fer blanc pour conserver chez soi ses économies en devises.


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