Crisis ? What Crisis ?

par Tzecoatl
mardi 28 octobre 2008

Quels salariés, patrons victimes de la mondialisation n’ont pas rêvé de voir s’effondrer l’architecture idéologique néo-libérale qui confinait ces derniers temps à de la lobotomie, de constater qu’actuellement la plupart des hedge-funds et autres LBO mettent la clé sous la porte ?

Beaucoup d’entre nous en avions rêvé, les marchés financiers l’ont fait.

Oh, bien sûr, c’est sans compter sur un probable stop-loss nommé Barack Obama (rien ne va plus, les jeux sont faits). Si cette association de mots semble baroque, au bas mot, on peut assez prudemment pronostiquer une chute des places boursières et financières pour encore une semaine maximum, affichant un rebond de façade ou de bienvenue pour le retour aux affaires des démocrates à Washington. Il est probable que ceux qui devront encaisser leurs pertes ou leurs banqueroutes sur les marchés financiers seront alors relégués à l’anonymat, étant renvoyés au réexamen de leur éthique ou de leurs prétentions pour quelque temps.

Pour l’heure, la faillite ultralibérale financière a laissé place au traditionnel étatisme clientéliste, dans l’urgence. On pourrait constater que la place d’idéologie hégémonique est vacante, mais les prétendants agissent en ordre dispersé, le retournement de vestes ou un pragmatisme idéologiquement invertébré suffisant largement à assurer l’intérim.

Cependant, cette crise a permis de mettre un terme à la légitimité des tentatives suivantes :

- retraites par capitalisation ;

- privatisation de l’école, de la santé, du réseau routier, de la police et de la justice, de l’air que nous respirons ;

- crédit hypothécaire à la française ;

- manipulation consistant à justifier la désétatisation au prétexte que les caisses sont vides, alors que l’on trouve les centaines de milliards (du moins comme caution) pour sauver le sommet de la chaîne alimentaire.

Cependant, cette crise ne mettra pas un terme :



- aux paradis fiscaux. On peut bien avoir la vocation politique sans pour autant être désireux d’y jouer sa vie ou ses relations ;

- à une monnaie européenne basée sur l’asservissement du travail au profit d’un capital ex-nihilo ;

- à un secret bancaire dont les quelques qualités permettent de dissimuler toutes les manipulations.

Nous rentrons dans une ère où l’étatisme malmené depuis longtemps risque de décevoir, quand bien même il constituera un paravent au tout libéral. L’Etat n’est-il pas le meilleur garant des privilèges, là où le libéralisme est le meilleur garant des situations de propriété dominante ?

Cependant, l’étatisme français a la particularité de préserver la capacité des individus (éducation, santé, etc.) au détriment de la prétendue liberté libérale, qui n’est qu’un piètre cache-sexe à la défense de la propriété constituée par la fraude, les relations, ou le privilège, et qui n’attend que la régénération de la pauvreté et de l’inculture pour mieux l’exploiter. Du moins, cette crise permettra-t-elle sans doute de préserver ce pilier de la société française (la capacité donc), fortement rogné par les sirènes libérales lors des années précédentes.

Par ailleurs, le libéralisme défendant la liberté individuelle est incapable de démontrer que celle-ci n’entraîne que la responsabilité de l’individu exerçant sa liberté, et non de tout ou partie de la collectivité (c’est la justification essentielle de l’interventionnisme ou de la régulation).
Il suffit qu’une agence de notation soit irresponsable du fait d’un conflit d’intérêt, puisque les banques les rémunèrent pour les produits financiers qu’elles notent, pour que toute l’économie mondiale aient quasiment tous ses indicateurs dans le rouge. Autant la liberté de l’un s’arrête où celle de l’autre commence, autant la responsabilité ou plutôt l’irresponsabilité de l’un ou l’autre est rapidement contaminante.

Extrait de commentaires via mail à Standard & Poors, à propos des produits titrisés incluant des certificats subprimes :

« Espérons que nous soyons tous riches et en retraite le jour où ce château de carte s’écroulera ».

Ou encore :

«  Ce contrat est ridicule.
 Je sais. Le modèle utilisé ne décrit même pas la moitié du risque.
 Nous ne devrions pas lui attribuer de note.
 Nous attribuons une note à tous les contrats.
 Il pourrait avoir été rédigé par une vache, nous lui en donnerions une. »


Source : contreinfo.info/rubrique.php3

Pour conclure, l’inflexion idéologique qu’a permise la crise actuelle autorise de pousser un énorme "Ouf !" de soulagement.
S’il s’agit effectivement d’une crise économique, celle-ci s’accompagne d’une guérison idéologique.
Cependant, les tares rédhibitoires du libéral-étatisme qui sert aujourd’hui d’ersatz sont bien trop connues pour se permettre de baisser la garde.


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