La crise souveraine de cet été, suite au défaut grec et à la dégradation de la note de la dette publique américaine, place la problématique de la solvabilité des Etats au centre des débats politiques de la rentrée. Dans cette note, Guillaume Hannezo montre que seule une meilleure intégration permettra de garantir la solvabilité de l'Europe. Le contrôle de l'endettement, donc des déficits, doit être au coeur de la nouvelle donne européenne, en échange d'une communautarisation progressive de la dette. Doit être définie pour ce faire une trajectoire de rétablissement des finances publiques contraignante, réaliste et adaptable aux variations de la situation économique. Les progressistes, défenseurs naturels de la solvabilité de l'Etat, patrimoine des plus faibles, doivent s'atteler dès aujourd'hui à cette mission et à sa mise en oeuvre.
Quelques considérations de politique économique pour une « note de rentrée » faisant le point des enjeux de la crise financière qui s’est approfondie au cours de l’été.
Le krach de l’été ne vient ni d’une surévaluation des marchés, comme en 1987 ou en 2001, ni de l’anticipation d’un credit crunch, comme en 2008. Il est fait de main d’homme, d’homme politique : indécision des Européens, qui ont accepté le défaut partiel de la Grèce en provoquant une perte de confiance et une hausse des taux qui coûtera plus cher que les 37 milliards à hauteur desquels contribue le secteur privé ; irresponsabilité des Américains, dont le système politique bloqué a rendu envisageable le défaut de la seule dette occidentale que le marché était prêt à absorber en quantité illimitée ; amateurisme des agences.
Il nous amène au point où la solvabilité des Etats va être l’enjeu principal des débats politiques, où l’Europe est la première victime née d’un rebondissement de la crise aux Etats–Unis, et où les marchés spéculent sur le pire – même s’il n’est pas le plus probable. Et le pire n’est pas que les pays du Sud sortent de la zone euro, ce qui est pratiquement impossible, mais que l’Allemagne envisage de le faire, si elle épuise tous les autres choix.
Or, l’Europe est très solvable si elle est mieux intégrée. Le cœur d’un nouveau Traité européen, au périmètre de la zone euro ou entre certains Etats seulement, c’est d’assurer institutionnellement le respect d’une feuille de route de contrôle des déficits budgétaires, contre une garantie mutuelle, progressive et conditionnelle d’une partie des émissions de dette souveraine au fur et à mesure de leur renouvellement. Cet accord devra tenir compte des inquiétudes légitimes de l’Allemagne. Il peut être complété par de nouvelles responsabilités de la banque centrale et la mise en place de ressources communautaires. Mais les Etats de la zone euro devront un jour, maintenant qu’ils ont ouvert la boîte de Pandore du défaut grec, tracer la « ligne dans le sable » entre les dettes souveraines qui peuvent faire défaut et les autres. S’ils le font, la spéculation s’arrêtera sur cette ligne.
D’ici là, les progressistes, défenseurs naturels de la solvabilité de l’Etat, patrimoine des plus faibles, devront adopter une attitude de plus en plus proactive sur les enjeux de ce débat : définir une vraie « règle d’or », garantissant une procédure budgétaire réaliste autant que des engagements chiffrés ; proposer les mesures qui permettront d’engager dès aujourd’hui le redressement, sans risque excessif sur la croissance – mesures qui consistent à maîtriser les dépenses, mais aussi à revenir sur la politique fiscale des dix dernières années, plus nettement que le gouvernement actuel n’a commencé à le faire.