Expatriation - le monde ne ressemble pas à la France économiquement

par Charles DEREEPER
vendredi 13 septembre 2013

La France est un pays communiste qui s'ignore (tellement facile de se dire qu'on est libre de dire et penser contrairement à la Russie et d'occulter le reste), dont l'Etat contrôle selon les rapports de la Cour des Comptes, 66% du PIB, soit autour de 1200 milliards sur 1800 milliards de PIB en mouvements. Officiellement, comme tous les pays communistes, les chiffres sur l'intervention de l'Etat sont loins de cette réalité. Mais quand on prend tout en compte, les centaines de taxes et prélèvements divers, on tombe sur ces 1200 milliards. Une économie capitaliste dont l'Etat contrôle les deux tiers des flux est une situation très rare à l'échelle mondiale. Moins d'une dizaine de pays sont dans cette extrêmité. Et il est bien difficile d'appeler cela du capitalisme...

Pour avoir parcouru le monde depuis plusieurs années, je porte un jugement mitigé moins extrême que par le passé. Il y a des avantages et des inconvénients à notre modèle. Le plus gros des avantages, c'est que la France fait partie des pays où il existe une demande stable pour l'achat de biens et services. En outre, bien que la violence soit présente, la pauvreté française n'a rien à voir avec la pauvreté extrême des pays émergents. Entre le Rmi et les aides au logement, le pauvre de France disposent d'un filet de sécurité qui n'existe pas dans la majorité du globe.

Le plus gros des inconvénients, c'est que comme toutes les tentatives communistes et collectivistes de l'histoire, cela se termine toujours par une banqueroute finale et un écroulement du modèle, des gens, du pays... les français finiront ruinés pour avoir gobé que l'Etat providence pouvait fonctionner sereinement... La Grèce, Chypre et les autres commencent à avoir un vague aperçu...

S'expatrier est dans l'air du temps. Seulement, l'expatriation est quelque chose d'exigeant. Prenons le volet économique.

Il existe deux types d'expatriation. L'expatriation en pays développés où les français peuvent s'adapter à merveille car ils retrouvent les grandes règles dans lesquelles ils ont été biberonnés. Et l'expatriation en pays émergents où là, pour au moins 95% d'entre eux, ils sont largués, décalés, ridicules et pathétiques à moins d'être retraités et débarrassés des contraintes financières.

Attention. Il existe de nombreux français qui survivent dans ces pays émergents. Mais ils font souvent partis des 5%. En effet, il n'est comptabilisé nulle part les millions de tentatives depuis des années qui échouent avec un retour en France au final.

Le Costa Rica (je partage ma vie entre Bangkok en Thaïlande et le Costa Rica) est un pays émergent. On pourrait discuter des différences au sein des pays émergents, mais en vérité, ce qui nous intéresse, c'est la solvabilité de la demande et la possibilité de bosser en local avec des perspectives de revenus intéressantes. Je classe comme émergent tous les pays où ces perspectives sont faibles car les oligarches au pouvoir absorbent (euh volent ?) le gros de l'argent et du pouvoir d'achat. En outre, dans certains pays, il n'y a tout simplement pas assez de valeur ajoutée en circulation pour espérer quoique ce soit.

Au Costa Rica comme dans de nombreux pays émergents, on trouve quelques rares français qui tirent super bien leurs épingles du jeu, de nombreux candidats qui rament financièrement plus ou moins fort, mais suffisamment pour avoir du mal à profiter des atouts des pays où ils sont expatriés et des déchets humains, alcoolisés ou drogués en mode survie.

A chaque fois au départ, de beaux rêves créent une impulsion aboutissant à la concrétisation d'un déménagement international. Je ne parle pas des gens qui veulent s'expatrier sans avoir même visité le pays en tant que simples vacanciers... Au tout départ, il y a forcément des vacances et un check sur le terrain avec des rencontres de français qui ont déjà sauté le pas.

La première erreur est donc la désinvolture avec laquelle le volet économique, donc la survie matérielle, est traité.

Un pays émergent n'offre pas ou très très peu de perspectives de travail en local à des conditions financières agréables. C'est la règle de base. Sinon, il ne serait pas émergent ! Le seul moyen de s'en sortir dans un émergent consiste à fabriquer des biens et des services et à les exporter sur le marché mondial, en priorité sur les marchés matures à solvabilité stable c'est à dire, les pays industrialisés.

Une très grande majorité de candidats à l'expatriation adoptent la logique inverse quand ils ne sont pas directement contaminés par le virus de trouver un travail local : ils arrivent et constatent que des besoins qu'ils connaissent dans leur expérience de vie d'un pays industrialisé, ne sont pas satisfaits et ils s'imposent alors importateur en se disant qu'ils ont flairé le filon que personne n'a vu. Ensuite, ils rament, rament et rament, à la recherche de clients qui n'existent tout simplement pas ou en trop petit nombre pour pouvoir ne pas ramer et vivre une vie confortable.

Au delà de ces pièges économiques, l'expatriation recèle des pièges affectifs nombreux que j'ai relaté ici (Vivre au Costa Rica ).

Après des années de vie en dehors de la France, je reste renversé par cette espèce d'évidence que les français ont tous, concernant le monde et son fonctionnement économique, persuadés que la terre entière tourne sur notre modèle, incapables d'imaginer que ce n'est pas le cas... 


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