Gamelle, gabelle et game-over

par JDCh
vendredi 20 octobre 2006

Notre sémillant ministre du Budget JFC a attiré en ce début de semaine les caméras de télévision à Saint-Ouen pour le filmer en train de jouer au baby-foot. Ce nano-événement correspond à une réforme "fondamentale" de notre fiscalité, la baisse de la taxe d’Etat sur les baby-foots, flippers, jeux de fléchettes, billards et autres jeux automatiques installés dans les lieux publics !

Cette pico-mesure est censée compenser, au moins partiellement, le manque à gagner créé par l’interdiction à venir de fumer dans tous les lieux publics, y compris les bars accueillant ces machines automatiques...

Avant de fustiger le caractère anecdotique de cette annonce et d’en profiter pour montrer, une fois encore, via cet exemple dérisoire, l’absurdité de notre système fiscal, rappelons les faits...

Cette taxe par appareil, acquittée par l’achat d’une vignette auprès des services de douanes, a été pérennisée en 1968, en assimilant ces machines à des "spectacles de 5e catégorie", et correspond à un montant allant de 16 euros à 368 euros suivant la taille de la commune et la commune d’installation elle-même : nos fiscalistes ont fait simple, comme toujours...

Sachant que l’établissement accueillant la machine perçoit entre 20% et 50% des sommes insérées dans ladite machine (le reste étant gardé par l’exploitant du parc de machines), qu’il doit acquitter la TVA à 19,6% sur ces gains et cette fameuse taxe sur les spectacles de 5e catégorie, on s’aperçoit qu’un flipper coûte de l’argent à l’établissement l’accueillant, dans les cas les plus défavorables et si mes calculs sont justes, s’il ne permet pas la réalisation d’un chiffres d’affaires minimal de 2300 euros par an. Dorénavant, la taxe étant portée à 5 euros par an, le point d’équilibre se trouve vers 30 euros !

Le déclin de cette industrie du jeu automatique a été vertigineux au cours des trente dernières années : la filière comptait 16 000 emplois en 1970 pour moins de 3000 aujourd’hui, chaque jour 55 machines (on en compte encore environ 100 000) retournent dans les ateliers, faute d’avoir trouvé la rentabilité dans un bistrot d’accueil, et chaque semaine quatre sociétés d’exploitation de jeux automatiques font faillite...

Cette désaffection pour le baby-foot ou le flipper n’est certes pas un phénomène purement fiscal. Nos lycéens et étudiants actuels leur préfèrent, en effet, les consoles de jeux (de salon ou portable), mais la "pression fiscale" présentée plus haut n’a fait qu’accélérer la disparition des machines et, par conséquence, des habitudes de jeu.

Toute cette histoire appelle les remarques suivantes :

Petite histoire, petits montants, nano-réforme, vertigineux déclin d’un petit business, mais plus d’une dizaine de milliers de jobs détruits et, surtout, excellente illustration de cette mort lente à petit feu, ordonnée, pour la France entière, par son administration fiscale, et malheureusement inéluctable, vu l’impuissance réformatrice de nos hommes politiques.

Tilt ! Game over !


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