Immobilier : Recherche objectivité désespérément
par Matt2pari
samedi 26 février 2011
Des fantasmes de réplique de Krach de 1991 aux fervents défenseurs de la hausse illimitée, des rentiers familiaux aux smicars-locataires in æternam, la direction du marché immobilier inonde depuis plusieurs années les actualités du net et de la presse papier. On y lit de tout pour bien souvent n'en tirer qu'à peu près rien, sinon, trop souvent, une forte brise de parti pris. Mais où en sommes nous vraiment, et où allons-nous ?
Tout d'abord les faits : plus de 100% de hausse en une dizaine d'années. La plupart des placements bancaires ou boursiers peuvent en rougir, incapables de soutenir de telles performances, notamment sur la durée. Mais qu'en est-il vraiment ? Que penser du marché actuel et de ce que l'on peut en lire partout sur la toile. Pas un jour n'est exempt d'un ou plusieurs articles sur le sujet, avec pour trait commun un cruel manque d'objectivité, dans le refus de traiter le sujet dans sa globalité. Tâchons d'appliquer ici le contraire :
En guise d'introduction, rappelons que le marché immobilier, comme son nom l'indique, est tout d'abord un marché. Certes pas un marché comme les autres mais cette remarque est inutile, dans la mesure où il n'existe pas de "marché comme les autres". Or la règle d'or demeure celle de l'offre et de la demande. Et nous nous accordons au moins à dire que le marché français est marqué d'un côté par une pénurie de logement et de l'autre par la culture française qui aspire avant tout à la propriété... Ces faits semblent suffisamment objectifs, justement, pour servir de base de réflexion.
Or d'aucun explique souvent la hausse que nous connaissons par ces arguments. Mais une question simple devrait se poser : bien qu'elle ait naturellement augmentée, la population française a-t-elle doublée en 10 ans, et par là peut-elle à elle seule justifier la hausse de plus de 100% du prix d'un bien moyen ? La réponse est évidemment non. Mais c'est la nature même d'un marché, agglomérat chaotique d'une multitude d'actions humaines, que de prendre une certaine direction, pour seulement ensuite se voir expliqué et justifié par des arguments en tout genre. Juger la direction d'un marché n'a finalement aucun sens : on ne peut que constater son évolution. Estimer les actes de ceux qui y participent en a un peu plus.
Partons donc du postulat que la hausse a démarré un beau jour pour une raison quelconque et Tâchons de décrire les différents paramètres qui l'ont soutenue :
- tout d’abord et comme expliqué plus haut, la répétition sans relâche que la France est victime d'un déficit structurel de logements, et les caresses dans le sens du poil de l'appétit français pour la pierre. Les articles traitant du marché immobilier se comptent par centaines sur la toile, et sont généralement assortis d'une longue liste de commentaires d'internautes, s'insultant parfois gentiment mais s'expliquant toujours a eux même comment leurs rêves pourraient un jour devenir réalité. On y trouve souvent cette bonne foi toute française du vendeur qui exclue de baisser son prix de 10.000 euros supplémentaires, là où le même prix a augmenté de 130.000 euros sur les 7 dernières années, sans effort ni valeur ajoutée de sa part. Ainsi va la vie.
- ensuite, différentes aides d'Etat, notamment celles à l'investissement locatif, car là où l'état permet à un particulier de gagner 20% du prix d'achat sous quelque forme que ce soit, certains promoteurs gonflent rapidement leur prix pour rattraper la majeure partie de ce gain, n'en laissant en réalité qu'une maigre portion à l'investisseur en question. A l'origine, il s'agit là d'un soutien pour l'industrie du bâtiment, ce qui est une bonne chose : mais il devient inadmissible de ne pas en souligner l'effet pervers,
- inutile de rappeler que les taux d'intérêts ont historiquement baissé, dans une économie mondiale de plus en plus consciente de son besoin viscéral de création de monnaie par le crédit. Plus l'on achetait, plus les prix montaient, plus les taux descendaient... et plus l'on achetait. La BCE semble encore aujourd'hui avoir les mains liées sur ce paramètre, même si le sens unique vers la remontée est déjà engagé.
- un autre argument beaucoup mois apparent : pour une raison encore inconnue, les français se sont peu à peu habitués a s'entendre dire - placidement - que le marché se portait bien, tant que leur solvabilité en faisait autant. Peut-être auraient-ils réagis différemment s'ils s'étaient entendus dire : « ne vous plaignez pas de la hausse, la majeure partie d'entre vous a encore les moyens de payer ! ». Car il s'agit bien de cela, d'une argumentation commerciale certes déplorable, mais visiblement efficace. Lorsque les taux baissent, on vous explique que c'est une bonne nouvelle, car vous pourrez emprunter plus, sur une durée identique. Lorsque les taux remontent, on vous recommande de compenser en empruntant sur une durée plus longue... La liste des arguments semble sans fin pour le lecteur moyen.
- enfin, il serait dommage de ne pas souligner que la plupart des informations ci-dessus sont émises par des acteurs - financièrement impliqués - du secteur : on ne peut reprocher à personne de prêcher pour sa paroisse. Par contre, voir se développer une véritable astrologie du marché immobilier, pure spéculation souvent à sens unique, prévoyant par exemple une baisse de 2% sur trois mois suivie d'une hausse de 8 à 10%... laisse songeur, notamment pour ses similitudes avec les prédictions des cabinets de conseil sur les marchés boursiers, sachant où tout cela nous a mené récemment.
Tout ceci étant dit, où en sommes nous ? Un statut quo relativement inconfortable. Avec d'un côté, pour ne parler que des plus valeureux partisans, les derniers acheteurs sur le marché, qui défendront les prix immobiliers à celui de leur propre vie, incapables bien sûr de s'entendre dire que la valeur de leur bien pourrait baisser, compte tenu de tous les sacrifices engagés. De l'autre, les aspirants à la sacro-sainte primo-accession, population sans cesse grandissante, misérable spectatrice d'un marché qui la considère persona non grata. Sans patrimoine familial ou revenus largement supérieurs a la moyenne, elle est condamnée à l'étroitesse ou à l'exil, voire aux deux.
Doucement mais sûrement, quoi que l'on en dise, le marché se fige. Et comme toujours dans ce genre de cas, la direction sera donnée par les premiers à craquer : mais bien imprudents sont ceux qui s'aventurent à les montrer du doigt.
Deux choses sont certaines : il est toujours possible de gagner moins d'argent sur une vente immobilière. Mais il est d'impossible d'en créer lorsque l'on en manque et que le système du crédit a atteint ses limites. A bon entendeur.