L’ agonie d’un système

par Markoff
jeudi 26 mars 2009

Dans quelle économie vivons-nous exactement ?
Officiellement, nous sommes toujours en régime capitaliste, un régime que nous préférons appeler "libéralisme économique" ou encore "libre échange", ces deux expressions évoquant le mot "liberté" qui flatte nos oreilles républicaines.
Mais cette liberté, en matière économique, c’est devenu celle du renard dans le poulailler...

Sauf que la volaille (nous), non contente de se faire plumer, engraisse et protège son prédateur. Autrement dit, le capitalisme, ce système sans foi ni loi qui fait "des riches de plus en plus riches et des pauvres de plus en plus pauvres" selon une formule bien connue, ce système inique, lorsqu’il se met en danger par ses propres excés, est soutenu, consolidé, sauvé par la volaille qui constitue le gros bataillon des états.
Jusqu’à présent, du moins, car les choses pourraient changer grâce (si l’on peut dire...) à l’ampleur de la crise actuelle. Elles changeront si les dirigeants du monde prennent conscience du danger qui pointe à l’horizon. Dans le cas contraire, le pire est à venir pour aboutir, quand même, à un changement inévitable.

Pourquoi les états soutiènnent encore le régime libéral-capitaliste à l’agonie ?
Il y a plusieurs réponses possibles à celà :

Il y a l’idée, fausse mais entretenue par tous ceux qui en profitent, qu’il n’y a rien de possible entre le libéralisme économique et le défunt communisme. Ce qui est faux, bien entendu. Mais ce mensonge protège les intérêts des rapaces qui détiennent le vrai pouvoir occulte, celui de la finance, vous savez, ceux qui n’en ont jamais assez et jamais trop....

Il y a aussi ce que l’on pourrait appeler "le conformisme culturel", hérité d’un lointain passé et qui fait considérer comme "naturel" et immuable ce qu’on a toujours connu, comme la société structurée en riches et en pauvres, avec, entre les deux, une classe moyenne. Cette classe moyenne, consciente de ses petits privilèges lorsqu’elle se compare à la classe inférieure misérable, est le meilleur soutien du système dominant.
Un autre soutien de la structure traditionnelle de la société, ce sont les religions et particulièrement les monothéistes, qui ont toujours pactisé implicitement avec les pouvoirs en place (et explicitement au temps des royautés), en valorisant spirituellement la pauvreté à laquelle on a fait miroiter l’espoir d’un éden futur et hypothétique...


Un autre conformisme, c’est l’idéal de la réussite individuelle, importé par l’oncle Sam et qui explique, en somme, "si vous réussissez, soit par le travail, soit avec la chance (et on pourrait rajouter : par le talent, la spéculation, voire les trafics en tous genres, ou encore l’escroquerie "légale" basée sur les failles administratives et juridiques), c’est que vous le méritez et vous avez bien raison d’en profiter"...

Il y a là, surtout depuis le milieu du XXè Siècle, un dévoiement complet de la notion de "mérite". Ainsi, aucun homme sur terre ne mérite de gagner 1000 fois ce que gagne un autre homme en travaillant, ni même 100 fois. Toutes les fortunes sont - ou devraient être - illégales.
Comme le disait déjà Balzac : "à l’origine de toute fortune, il y a un crime qu’on ignore". Il ne s’agit pas forcément d’un crime de sang, il y a bien d’autres façons d’être un criminel social... Je vous épargne les exemples.

Le plus triste dans cette histoire, c’est que ce sont souvent les plus humbles qui soutiennent le principe des grandes richesses, en bavant d’admiration devant les "idoles qui le méritent bien" puisque : ils savent taper dans un ballon, ils savent spéculer avec de l’argent qui ne leur appartient pas, ils savent bien chanter, ils savent, bien ou mal, diriger une usine ou une banque...etc.
Or, le mérite n’a plus aucun sens, tel qu’on le conçoit, dans une société qui a perdu complètement ses repères et la mesure des choses.

Mais revenons à notre crise qui n’est pas seulement une crise financière, mais aussi une crise sociétale qui nous entraîne vers une crise de civilisation. Autant dire que la résolution en sera longue et difficile, si toutefois les décideurs mondiaux prennent conscience de la gravité et des enjeux du phénomène.
C’est qu’un simple replâtrage du système actuel est voué à l’échec et à un effondrement dramatique de l’ensemble des économies, dans un temps plus proche qu’on ne le croit, bientôt suivi de ce que certains appellent déjà "la révolte de la pauvreté". Révolte qui sera, soyons-en certains, trés violente.
Car les classes moyennes, qui soutiennent encore le système, sont et seront de plus en plus touchées. Et elles changeront de camp.

La gravité de la situation est, heureusement, perçue par de plus en plus de monde, y compris chez beaucoup d’intellectuels. Par contre, dans le milieu politique traditionnel, droite et gauche confondues, on refuse encore de remettre en cause le sacro-saint libéralisme économique, en dépit de belles paroles que l’on n’avait, il est vrai, pas l’habitude d’entendre dans certaines bouches... Il ne manque plus que le courage, une vertu oubliée depuis longtemps quand il s’agit de mettre en chantier une véritable révolution culturelle...
Mais parler de "moraliser le capitalisme", c’est se foutre du monde !
Le capitalisme est, par nature, immoral et amoral. C’est pourquoi il est condamné à disparaître, victime de ses excés et de ses contradictions. Il faut revisiter Marx et sa clairvoyance car ce qu’il avait prédit est en train de s’accomplir sous nos yeux. Même si la bête va chercher à survivre dans des soubresauts dévastateurs...
Il faudra aussi revisiter et s’inspirer des économistes réformistes et utopistes ( Mill, Sismondi, Saint Simon, Proudhon, Owen...). Ils ont encore des choses à nous apprendre sur l’équité et le partage.

Les commentateurs, politiques et journalistes, conformistes et en mal d’imagination, reprochent bêtement à Besancenot et son NPA d’avoir un discours stérile, dans la mesure où ils ne souhaitent pas participer au pouvoir... Or, dans le contexte économique mondial tel qu’il existe aujourd’hui, Besancenot a bien raison de ne pas s’inscrire dans un pouvoir qui ne fait que gérer la crise dans le seul but de maintenir un système condamné à terme.
Un capitalisme toujours néfaste et presque virtuel puisqu’il est soutenu à coup de milliards par les états qui soutiennent par ailleurs l’économie réelle avec d’autres milliards, et qui consacre encore d’autres milliards pour le social, afin d’éviter le pire : la révolution.
Mais les milliards aussi sont virtuels puisqu’ils ne les ont pas....
L’état est partout pour colmater les brèches du système décadent qu’il défend.

Je reviens à ma question première : dans quelle économie vivons-nous ?
( à suivre...)


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