L’échec patent de l’austérité

par Laurent Herblay
lundi 28 juillet 2014

Certains (Sapir en France, Krugman aux Etats-Unis) avaient prévenu que l’austérité n’est pas la voie pour sortir de la crise, qu’elle casserait la croissance et donc n’aurait qu’une efficacité très limitée puisque ce qui serait gagné d’une main serait perdu d’une autre. Nouvelle illustration avec un rapport de l’Assemblée.

La France et l’Europe victimes de l’austérité
 
Valérie Rabaud prolonge le débat déjà lancé il y a près d’un an par le Monde, qui avait dénombré par moins de 84 impôts nouveaux créés par Nicolas Sarkozy et François Hollande de 2011 à 2013. Elle a chiffré la hausse des prélèvements depuis 2008 et atteint le chiffre colossal de 69 milliards d’euros entre 2011 et 2013, à mettre en regard avec une baisse du déficit de seulement 16 milliards sur la même période. Le rapport chiffre précisément la hausse des prélèvements : 18 milliards pour 2011, 22 pour 2012 et 29 pour 2013. Il n’est pas peu piquant de constater le montant colossal des hausses d’impôts décidées par François Hollande, lui qui s’était fait élire pour davantage soutenir la croissance.
 
Voici donc une nouvelle preuve du manque de l’inefficacité criante de ces politiques d’austérité, aux si mauvais rendements. En effet, le déficit n’a baissé que de 16 milliards de 2011 à 2013, pour plus de 50 milliards de prélèvements additionnels (sans même compter les restrictions de dépenses avec le gel des rémunérations de la fonction publique), soit un rendement dérisoire d’environ 30%. La raison de cet échec est simple : le multiplicateur budgétaire. Comme l’admet même le FMI aujourd’hui, les mesures de baisses de déficit provoquent une baisse du PIB (pour un rapport compris entre 0,9 et 1,7), ce qui réduit les recettes fiscales, et donc réduit fortement la baisse des déficits initialement prévue.
 
Une leçon qui n’est pas tirée

La situation est encore plus frappante en Espagne ou en Grèce, où malgré des politiques drastiques de réduction des déficits publics (baisse des prestations et hausse des impôts), il y a beaucoup de déperditions en ligne, avec une baisse bien moins importante des déficits publics que prévu (encore -5,7% du PIB pour Madrid en 2014 et -11,5% à Athènes) et une envolée de la dette publique encore accélérée par la baisse du PIB, qui fait remonter mécaniquement le poids de la dette. Et encore, la baisse des taux limite un peu la casse. Ces pays offrent une démonstration patente de l’improductivité des politiques d’austérité, outre l’énorme casse sociale qu’elles provoquent, qui les disqualifie à elle seule.

Bien sûr, devant l’échec des politiques suivies, reconnu par le FMI, l’Union Européenne a mis un tout petit peu d’eau dans son vin et admet désormais un rythme de réduction des déficits un peu moins irréaliste. Mais même s’ils y vont un peu moins lentement, cela ne change pas le fait que les pays européens vont dans le mur ! Car l’Allemagne, qui refuse que la BCE aille plus loin, met la pression, par la voix de Jens Weidmann, de la Bundesbank, pour qui « la politique monétaire a permis aux gouvernements de gagner du temps pour mettre en œuvre des réformes structurelles et consolider leurs budgets, en partie en outrepassant son mandat (…) Si ce délai n’est pas utilisé, la crise pourrait ressurgir rapidement  ».
 
Il y a tout de même quelque chose d’effarant à voir que quelque part, le PS parvient en partie à reconnaître la réalité, à savoir l’échec des politiques d’austérité qu’il a mis en place, tout en étant incapable de penser une politique alternative. Encore un signe du délitement intellectuel complet de la majorité.

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