L’Etat aime l’économie... mais pas au lycée !

par Aimé FAY
mercredi 10 décembre 2008

A quoi servirait-il d’enseigner au lycée une matière jugée inutile pour le peuple ? L’Etat l’a bien compris et a donc décidé de rendre facultatif l’enseignement de l’économie au lycée. Toujours aussi pertinent dans ses choix structurels depuis dix-huit mois, l’Etat se dit peut-être que cette matière ne mène à rien, comme le grec, le latin ou tout autre patois régional. Qu’il est donc inutile d’y allouer des moyens, surtout en temps de crise ! Pourquoi l’Etat a-t-il une telle aversion envers l’enseignement de la matière économique ?
Est-ce pour tenir le citoyen dans l’ignorance des tenants et des aboutissants qui sont censés, dans les pays modernes, développer une conscience politique et économique chez tout individu en devenir ?
 
Est-ce pour faire en sorte que la matière que manipule, au sens propre et figuré, tous les jours la classe politique, reste la plus obscure possible pour les millions de Françaises et de Français qui n’ont pas eu la chance d’accéder à l’enseignement supérieur pour l’apprendre ?
 
Est-ce pour maintenir l’électeur dans l’ignorance des éléments qui lui permettraient de choisir, en conscience, ses élus lors des très nombreux scrutins auxquels il est convié ?
 
En fait ... l’économie est-elle jugée inutile pour le peuple car trop utile à l’Etat et à la classe politique ?
 
Ces questions sont peut-être outrancières, mais revêtent aujourd’hui une grande légitimité.
 
L’Etat sait très bien que le monde dans lequel nous vivons n’est plus compréhensible si l’on ne dispose pas de quelques bases économiques, qui permettent de révéler le sens de termes devenus courants aujourd’hui, tels que : relance, investissement, consommation, travail, emploi, pouvoir d’achat, croissance, inflation, dette, déflation, commerce extérieur, PIB, temps partiel, chômage technique, partage de la valeur ajoutée, capitalisme, libéralisme, socialisme, actionnaire, entrepreneur, création / destruction d’emploi, bien, service, …
 
Pourquoi ne plus vouloir permettre aux lycéens d’avoir connaissance des définitions de ces mots ? L’Etat doit absolument apporter une répondre à cette question !
 
Bien sûr, l’Etat pourra avancer que tout ne peut pas être enseigné et qu’il faut faire des choix. Que ces choix lui appartiennent et qu’il a été élu pour cela. Que gouverner c’est agir.

C’est vrai, mais gouverner c’est aussi prévoir, anticiper, préparer l’avenir du pays à moyen et long terme afin de ne pas obérer sa compétitivité dans un monde de plus en plus concurrentiel.
 
L’Etat sait-il que dans le commerce international tous les acteurs parlent couramment économie et que c’est le bagage de base minimum à partir duquel la vraie compétition commence ?
 
Pourquoi scolariser un enfant si c’est pour ne pas lui permettre d’être demain un citoyen à part entière, apte à saisir les enjeux économiques et sociaux du monde qui l’entoure et dans lequel il devra se battre pour être compétitif et le rester.
 
Chacun sait que le milieu socio-économique dans lequel est élevé un enfant est le déterminant essentiel de son avenir.
 
Faudra-t-il, dès 2009, dire que cet enfant a eu aussi la malchance être scolarisé en France plutôt qu’en Finlande, en Norvège, en Allemagne ... ?
 
Alors, maintenir la suppression de l’enseignement de l’économie est une catastrophe annoncée. L’Etat en portera l’entière responsabilité et le nom du ministre de l’éducation nationale entrera effectivement à jamais dans l’histoire de notre pays.


Photo : AFP

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