L’Europe va à sa perte malgré l’existence de solutions monétaires éthiques
par Bernard Dugué
mardi 24 juillet 2012
En Espagne, il n’y a pas que la forêt qui brûle puisque les marchés flambent et comme la finance est interconnectée, l’incendie se propage, on ne sait pas où précisément mais ce sera en Italie, ou en France, ou même en Allemagne, pays inébranlable, financièrement sain mais tout de même placé dans le collimateur de Moody qui pourrait enlever à la première économie européenne son triple A. Tout ça à cause d’un autre incendie financier qui a commencé il y a quelques années en Grèce et que les pompiers de l’Europe, réunis en sommets incessants, se sont employé à contenir. Rien de tel que des liquidités pour arroser les banques et les emprunts souverains. La BCE a joué le jeu sans grand enthousiasme. Quelques mille milliards d’euro à 1% ont été proposés aux banques pour un emprunt de trois ans. Ce qui logiquement aurait dû permettre aux états de souffler à court terme. Ce fut en effet le cas. Mais le problème, ce sont les emprunts sur plus de cinq ans et là, Italie et Espagne sont dans une situation délicate. Ces pays sont mis dans une position où les prêts sont conçus de telle manière qu’ils mettent les Etats dans une situation où ils risquent de ne pas pouvoir les rembourser, à moins de faire payer les contribuables. Au final, les populations vont s’appauvrir et ces emprunts à 5%, voire même 7, sont une bombe à retardement. Il se dit qu’en Italie, la rentrée scolaire risque d’être différée faute de moyens financiers, du moins dans certaines régions au bord de la faillite. Et voilà donc l’Europe au bord de la faillite morale ou éthique. L’Europe, ce continent fondé sur les savoirs et l’instruction peine à donner un enseignement à ses enfants.
En fait, on connaît le problème. C’est la concentration de l’argent. La stratégie visant à renforcer les banques ne sert à rien. Prenons le cas de l’Espagne. Ce ne sont pas les banques qu’il faut renflouer mais les populations afin qu’elle puissent acheter les logements vides à des prix raisonnables et là, les banques s’y retrouveront à la faveur d’un circuit financier vertueux car il sert l’économie réelle, celle qui permet à des millions de gens d’acquérir des biens et de bénéficier de quelques services publics. Les dirigeants européens se plantent complètement. La seule solution pour sauver l’Europe de son effritement durable, c’est de pratiquer la méthode du renflouement des ménages dotés de bas revenus en faisant fonctionner une planche à billet pour générer un impôt négatif de grande envergure. J’en ai déjà parlé mais l’idée est trop audacieuse et peut-être trop généreuses pour les plus démunis. On ne l’a jamais noté, ni déclaré, mais la société actuelle n’a pas pour ressort essentiel la générosité. Et c’est pour cette raison que l’Europe est vouée à sa perte et à accomplir son destin de malédiction qu’elle épouse sans qu’elle l’ait choisi délibérément. Juste un effet systémique de classe. Les plus favorisés captent les revenus et augmentent leur patrimoine.
C’est assez incroyable car beaucoup d’économistes distingués, notamment à Londres, savent que la politique monétaire actuelle conduit les Etats dans le mur et promet l’Europe à un sous-développement durable. Tout ça parce que la monnaie n’est pas injectée au bon endroit, chez les plus démunis, des gens qui dépenseront le moindre euro car ils ont des tas de besoins à satisfaire et s’il achètent des biens, alors l’économie repart avec une croissance équitable. A l’inverse, si les liquidités sont injectées dans les banques, l’argent ne sait pas où se placer, les riches continuent à épargner, quitte à jouer sur la spéculation, ce trou noir qui détruit la monnaie. Et l’économie réelle s’assèche, pas entièrement car quelques riches sont disposés à faire tourner l’économie, ils achètent des produits LVMH ou des Ferrari.
La question, c’est quand les dirigeants vont-ils prendre conscience qu’ils se trompent et qu’ils mènent leurs pays à la perte. Le mystery train de la vie en Europe finira par un terminus pour beaucoup. La civilisation occidentale prend une porte de sortie mais on ne sait pas où elle va entrer.