La base aérienne d’Orange... partira, partira pas ?
par Dominique LIN
samedi 7 juin 2008
Voilà des années que l’avenir de la base d’Orange fait l’objet d’articles à sensation dans la presse locale ou nationale. Pour ceux qui ne savent pas, Orange ne vit que sur la présence militaire où tous les corps (ou presque) sont représentés. Base aérienne de surveillance du territoire, police nationale, police municipale, gendarmerie nationale, gendarmerie mobile, légion étrangère, cela fait du monde et du képi dans les commerces. L’économie locale est exangue et dès qu’on éternue la possibilité de voir partir la base (cela fait des années qu’on en parle), la ville s’enrhume. Chaque fois, nous avons droit au même scénario :
Cette fois-ci, c’est dans le magazine Valeurs actuelles qui consacre un dossier complet intitulé :
Séisme dans les armées - Le Livre Blanc sur la défense dont un paragraphe sur l’armée de l’air :
"L’armée de l’air (65 000 personnels) serait la plus affectée par le maelström, avec une réduction de 25 % de son format, presque autant que la Délégation générale pour l’armement (moins 30 %).Pour les aviateurs, le “seuil stratégique” des 300 avions de combat a été revu à 250 appareils. Quelques bases doivent fermer : Reims, Luxeuil,Colmar,Cambrai, Orange et Dijon sont citées (notre carte page 15). Il y aura moins de Rafale et l’arrivée des Airbus A400M sera retardée, malgré l’âge vénérable des Transall (30 à 40 ans), déjà à la limite de leur potentiel."
La Provence : Orange : la base aérienne 115 pourrait bel et bien disparaître !
Comme d’habitude, le maire interrogé s’en est ému, a commenté vaguement l’information car il n’en a pas. Il s’est empressé d’écrire une lettre au ministre concerné, comme à chaque fois (image © la Provence)
3) La grande muette reste... muette
La Provence titre encore :
Base aérienne : les militaires "confiants" sur son maintien
Comme le dit la brève : "Le lieutenant-colonel Georges Perrignon, s’est dit aujourd’hui "confiant" dans la pérennité de cette installation. Interrogé sur France Bleu Vaucluse, à propos de l’article, il a répondu : "Je pense qu’il s’agit d’une rumeur, je reste confiant"." Traduction : je ne sais rien et je le fais savoir. On m’a demandé de ne rien dire, c’est ce que je fais. L’armée a toujours raison, c’est pourquoi j’ai confiance...
Qu’en penser après tant d’années ? Nous sommes habitués à cette série orangeoise, jusqu’au jour où la base fermera. A force de crier au loup, chacun connaît la suite.
La presse dans son ensemble fera un historique, on dira "c’était prévu". Le maire (si c’est le même) accusera le gouvernement, sortira ses lettres, plaindra les Orangeois.
Le député Mariani sera sûrement en Europe de l’est et sera fidèle à son silence obligé.
Les militaires de la base seront muets et mutés, donc continueront à s’exercer, voler, atterrir, s’envoler, boire un coup au mess... Restera Orange, ses commerces, ses structures, ses Orangeois. Nous serons en 2009, 2012, 2020, ... ?
Que fait M. Bompard (le maire d’Orange) en attendant ? Quel plan de remplacement est mis en œuvre pour que l’économie de la ville ne tombe encore plus bas ? Et même si la base reste, l’économie de la ville n’a-t-elle pas besoin d’être relancée, réanimée, sortie du coma ?
Le dernier scrutin municipal a adoubé M. Bompard dès le premier tour à 61%.
Pas de programme, pas de projets, si ce n’est celui de bétonner des hectares pour installer des grandes surfaces qui ne pourront pas rester faute de développement démographique. Orange voit sa population baisser, ce qui est un comble en Provence. Nous avions l’exclusivité d’un maire d’extrême droite, en voilà une deuxième fort dommageable.
Parmi ses originalités, Orange possède aussi l’obligation, pour les chefs d’entreprise qui souhaitent s’y implanter, de s’interroger sur le risque d’identifier leur société à la ville d’Orange. Car de l’extérieur, on se demande le patron est d’accord avec les idées du Maire.
L’histoire a montré que de nombreuses entreprises étaient partie à cause de lui, donc si on y vient, c’est qu’on est solidaire ! Oui, de nombreux cas se sont répétés.
Une entreprise qui s’implante à Orange perd des clients pour raison d’étiquette politique. Triste privilège quand on sait que toutes les villes de France cherchent à attirer, séduire, fidéliser les créateurs d’emploi.
Les quelques employeurs de la ville ont donc une position de force face aux autorités, permettant à certaines de lâcher des polluants ou des odeurs disgracieuses sur toute la ville en toute impunité : "Si on m’embête, je m’en vais !"
Ce qui me dérange fortement dans le discours du Maire, que ce soit pour la base, pour la déviation (projet de + de 20 ans), pour Mistral Habitat (logements sociaux), pour tous les sujets où sont mêlés des intervenants extérieurs (collectivités terroriales et l’état), c’est qu’il fait aveu d’impuissance à gérer les chantiers ou les problèmes en collaboration avec l’extérieur, d’où l’isolement d’Orange.
A chaque fois, le même discours : "voilà des années que je demande, que j’essaie, que j’écris, que j’interpelle, que je dénonce, que j’invective..." On est en droit de se demander pourquoi cela ne marche jamais.
L’important pour l’Orangeois, c’est le résultat.
Pas de déviation, pas de rénovation des quartiers, pas de partenariats (ou très peu), pas de grands chantiers structurants. La seule exception est le plan de rénovation du patrimoine romain initié par la Région grâce auquel le Théâtre antique et l’Arc de triomphe sont en rénovation, dans lesquels la Mairie ne participe qu’à faible hauteur tout en étant maître d’œuvre.
Alors, si pour la base aérienne, il est vrai que ni la commune, ni le département, ni la Région ne peuvent faire quoi que ce soit, il semble que pour bien d’autres domaines de l’avenir d’Orange, le Maire pourrait en faire beaucoup plus et surtout beaucoup plus efficacement.
A force de rejeter la faute sur les autres, il pourrait remettre en cause sa capacité à fédérer les financements, les actions, les énergies, les projets. S’isoler, c’est mourir, Orange en est un exemple —vivant allais-je dire— flagrant.
Mais en attendant, on ergote sur un financement d’association, un mot de trop de l’opposition. On distille le budget municipal au bon gré des amitiés sous-jacentes.
Pendant que les associations caritatives peinent à tenir leur rôle dans la ville, M. le Maire s’octroie 11000 € de frais de représentation sans se donner la peine de les justifier auprès du conseil municipal. En cumulant son salaire + deux formes de remboursements de frais, ses émoluments de Maire montent à 5600€/mois environ + son indemnité de cnseiller général... pour une vile de moins de 30000 habitants ! Sa voiture de fonction est un monospace de 6 places, parmi les plus gros pollueurs, très souvent utilisé pour ne déplacer qu’une seule personne.
Que lui importe, l’avenir de la ville, la misère des habitants, les difficultés quotidiennes, les jeux pour enfants.
Alors, la base aérienne, qu’elle reste ou qu’elle parte, pour beaucoup d’Orangeois, cela ne pourra être pire qu’aujourd’hui.