La « Chapelle-Darblay » : avec autant de vertus écologiques ce site doit être sauvé !

par Daniel MARTIN
lundi 3 août 2020

La Chapelle-Darblay : Dans cette commune de Grand-Couronne près de Rouen, c’était un site unique de recyclage et d’économie circulaire à multiples facettes, avec une usine qui produisait, entre autre, le seul papier journal 100% recyclé en France. Cette usine est désormais fermée avec 218 personnes licenciées.

Rappel historique des moments critiques qu’a connu cette entreprise au cours de près de siècle d’existence

En plus de 90 ans, l’usine Chapelle-Darblay a connu bien des hauts et des bas, mais grâce à la pugnacité de ses salariés, elle s'est toujours relevée. Quand elle voit le jour en 1927, la papeterie s'appelle Sonopa. C'est dans les années 1930 l'une des plus importantes de France. En 1959, suite à son rachat, elle devient Darblay. Puis, en 1968, avec la fusion entre Chapelle et Darblay, elle adopte ce nom qui lui colle encore, en dépit des multiples repreneurs qui ont suivi. 

Au début des années 80, la papeterie lutte pour sa survie. Déjà à cette époque, la direction veut fermer le site de Grand Couronne. Les salariés, après une occupation de 3 mois, où ils avaient continuer à faire tourner la machine et livrer directement le papier dans les imprimeries parisiennes, c'est une victoire car, la direction renonce à la fermeture et fait moderniser l'usine. C'est ici, à Grand Couronne, qu'est inventé et mis en place le procédé de désencrage et de recyclage des journaux. A partir de 1999, le site fabrique du papier à 100% recyclé.

Entre horizon qui s’obscurcit et espoir d’un retour d’horizon au beau fixe

Dans les années 2000, l'horizon s'obscurcit à nouveau. Depuis l'avènement d'Internet et les nouvelles forme de « lecture journalistique », la consommation de papier journal diminue chaque année de 7 à 8%. A partir de 2009, les plans sociaux se multiplient à Chapelle Darblay. En septembre dernier, UPM porte le coup de grâce à l'usine presque centenaire. UPM le groupe Finlendais, numéro un mondial du papier ne la trouve plus assez rentable et annonce sa mise vente...

Chapelle Darblay n'a officiellement jamais trouvé preneur. Des négociations avancées ont eu lieu avec le groupe belge VPK Packaging, spécialisé dans l'emballage carton, mais la crise du COVID-19 a tout fait stopper. Il n’est toutefois pas exclu qu’il pourrait se montrer de nouveau intéressé dans les mois qui viennent, en fonction de l'évolution de la situation économique. Vu l’évolution des problématiques économiques qui se posent, on a de quoi être pessimiste pour une reprise de cette entreprise dans le « monde d’après » qui se dessine dans une économie, même moins libérale...

Lundi 15 juin 2020, le plan social, actant la fermeture du site et le licenciement des 228 salariés, est présenté, mais signera-t-il pour autant l'acte de fin d’activité définitif de la papeterie UPM Chapelle – Darblay, dont la date de fermeture est effective depuis le 16 juillet 2020  ?

Les salariés de Chapelle Darblay tentent pourtant de garder espoir. Ils ne peuvent imaginer qu'aujourd'hui la seule usine en France à faire du papier journal 100% recyclé disparaisse. C'est pour eux contraire au "monde d'après résolument écologique" vanté encore le 5 juin dernier sur Twitter par Emmanuel Macron. 

Des arguments pour le moins controversés pour justifier cette fermeture d’usine

Lorsque le groupe finlandais UPM a fermé l'usine le 16 Juillet 2020, il a évoqué une « perte de compétitivité due à la crise de la presse  ». Alors que l’usine présentait de multiples facettes avec, notamment, une puissance de recyclage du tri de 24 millions d’habitants, une chaudière biomasse pouvant chauffer une ville de 20.000 habitants et une station d’épuration pouvant subvenir aux besoins de 400.000 personnes. L’usine normande produisait surtout le seul papier journal 100% recyclé en France.

Un site avec autant de vertus écologiques et industrielles doit faire l’objet d’une intervention directe de l’État pour le sauver

Malgré une baisse de la demande de papier journal, il est difficile d’admettre qu’ un site avec autant de vertus écologiques et industrielles ou de perspectives de diversification d’activités dans ce sens, avec 98% des matières entrantes qui étaient revalorisées ne fasse pas l’objet d’une initiative de rachat par l’État et de mise en gestion par partenariat : collectivité territoriale - salariés. Nicolas Mayer-Rossignol, le président de la Métropole Rouen Normandie, maire de la ville-centre et Julie Lesage, la nouvelle maire PS de Grand Couronne qui « ne comptent rien lâcher pour sauver la Chapelle Darblay » avaient d’ailleurs sollicité une audience pour travailler avec le Gouvernement sur le sujet.

Recyclage, économie circulaire avec diversification des activités dans ce sens, un atout unique en France

Comme le faisait par ailleurs observer le délégué CGT Mr. Cyril Briffault faisant allusion à la diversification des activités, toujours en recyclage et économie circulaire « on peut faire de la ouate de cellulose, de l’isolation, de la pâte marchande du papier ondulé et toujours du papier journal »… Lui aussi attend un appui fort du gouvernement.

Tout espoir n’est pas perdu 

Les ex salariés ont obtenu d'UPM la préservation du site pendant un an (dans l’espoir d’un nouveau repreneur ou d’une action spécifique de l’État) et comptent sur la déclaration exprimé le 5 juin dernier sur Twitter par Emmanuel Macron : « Le monde d'après sera résolument écologique. Je m'y engage. Nous le bâtirons ensemble. Nous avons une opportunité historique de reconstruire notre économie et notre société sur de nouvelles bases, de nous réinventer, d’investir dans un avenir décarboné ». C’est exactement ce que faisaient les « Chapelle-Darblay »... 

Pour conclure

Faute de repreneur sérieux le gouvernement doit d’agir pour faire revivre ce site de recyclage et d’économie circulaire qui était unique en France, sans compter les perspectives de diversification des activités dans ce sens. La formule de rachat par l’État et ensuite un montage de partenariat pour la gestion de l’entreprise sous forme de coopérative entre les collectivités territoriales et les salariés permettrait de mettre en acte le discours présidentiel avec la nouvelle urgence économique en regard des exigences de l’écologie.


Lire l'article complet, et les commentaires