La Croissance, c’est aussi l’affaire de l’Etat !

par Aimé FAY
mardi 10 avril 2007

Depuis la nuit des temps, la croissance est au cœur de l’activité humaine. Or, ce facteur central de l’économie est paradoxalement assez méconnu par le monde syndical et aussi par celui de certains politiciens économistes.

La croissance est l’indice, exprimé en pourcentage, qui mesure l’augmentation du PIB (produit intérieur brut) d’une économie par rapport à la période précédente : le trimestre ou l’année.

Pour avoir de la croissance, il faut un PIB qui augmente d’une période sur l’autre. Comme le PIB, agrégat national, est aussi l’expression de la somme des valeurs ajoutées de toutes les entreprises, de tous les secteurs, il faut donc que ces valeurs ajoutées progressent pour qu’il y ait croissance. Mais comment ?

Sans entrer dans des détails ennuyeux, il convient de dire que la valeur ajoutée, pour une entreprise, est la différence entre son chiffre d’affaires et sa consommation intermédiaire, c’est-à-dire les biens et services qu’elle a achetés pour fabriquer les biens et services qu’elle a vendus (aux variations de stocks près). Donc, pour accroître sa valeur ajoutée et faire de la croissance, il faut notamment :

- soit augmenter son chiffre d’affaires, sans accroître sa consommation intermédiaire,

- soit augmenter son chiffre d’affaires, mais, plus vite que n’augmente sa consommation intermédiaire,

- soit augmenter son chiffre d’affaires tout en diminuant sa consommation intermédiaire,

- soit, à chiffre d’affaires constant, diminuer sa consommation intermédiaire,

- soit, à chiffre d’affaires baissier, diminuer encore plus sa consommation intermédiaire.

Sachant que le partage de la valeur ajoutée se fait selon les cinq éléments suivants : les salaires, les impôts et taxes, la rémunération des prêteurs, la rémunération des actionnaires et l’entreprise elle-même (amortissements et réserves), on voit l’importance qu’il y a d’augmenter l’agrégat à partager, afin de ne pas avoir à arbitrer une répartition drastique en cas de baisse.

La croissance de la valeur ajoutée est donc fondamentale. Par ailleurs, c’est tellement plus confortable quand elle augmente. L’entrepreneur en est conscient et il fait le nécessaire tous les jours pour cela. L’Etat doit aussi en être conscient et, au-delà des discours préélectoralistes ou post-électoralistes, faire le nécessaire, par la preuve, pour que la croissance soit au rendez-vous. Mais comment ?

1°- D’abord il convient de dire que, dans le cas de la France, cela ne devrait pas être a priori un objectif impossible. La planète a enregistré en 2006 une croissance rarement atteinte depuis que les statistiques mondiales existent. Et cela va continuer. Il faudrait donc que l’Etat soit particulièrement aveugle ou incompétent pour ne pas tirer profit de l’augmentation de la richesse mondiale. Mais ne préjugeons de rien. En 1996 et 1997, le gouvernement Juppé n’avait pas vu venir la croissance européenne. C’est le gouvernement Jospin qui en a profité, après la fameuse dissolution.

2°- L’Etat doit savoir donner confiance à court, moyen et long terme. L’entrepreneur a besoin de cette perspective. Comment pourrait-il parier sur l’avenir, proche ou moins proche, si l’Etat lui faisait apparaître celui-ci trop incertain ?

3°- L’Etat doit aussi tenir ses promesses en matière de fiscalisation des résultats mais aussi en termes de promotion de la recherche et du développement. L’entrepreneur doit savoir, à l’avance, si le poids de la fiscalité aura ou non tendance à obérer de plus en plus le partage de sa valeur ajoutée. Valeur ajoutée que son entreprise et ses salariés auront créée. Il doit aussi savoir si ses efforts en R & D seront reconnus, encouragés et valorisés.

3°- Ensuite, l’Etat doit promouvoir la création de nouvelles valeurs ajoutées, c’est-à-dire de nouvelles productions. Faire croître les valeurs ajoutée existantes c’est bien. Mais favoriser la création de nouvelles richesses c’est mieux, voire indispensable. Cela passe par l’encouragement des esprits au développement de nouveaux commerces, de nouveaux métiers, de nouveaux partenariats avec les pays qui demain seront les pilotes de l’économie planétaire, etc.

4°- Enfin, Croissance et formation sont étroitement liées. Indissociables. L’Etat doit comprendre que les dépenses de formation d’aujourd’hui sont les croissances de demain. Comment créer de nouvelles croissances sans bien connaître et comprendre les enjeux du monde dans lequel on est ? Comment connaître et comprendre sans avoir appris ? Ainsi, il convient, de manière urgente, d’introduire l’enseignement de l’économie dans le cursus scolaire, dès l’école primaire. L’apprentissage à la citoyenneté mondiale passe par une refonte totale des programmes de l’Education nationale. Ces programmes, structurés autour du latin, du grec, du patois régional et des guerres passées, ont été conçus à la fin des trente glorieuses et de l’ère industrielle occidentale finissante ? L’ère tertiaire est désormais notre quotidien. Le quaternaire, c’est déjà aujourd’hui et plus encore demain !

Alors oui, la croissance est bien l’affaire de l’Etat. Encore faut-il qu’il se donne les bons outils pour cela. Au bon moment et aux bons endroits ! Demain il sera trop tard. Les autres avancent sans attendre la France. Ni la "vieille" Europe. L’économie de notre nouvelle zone européenne doit être irriguée par la confiance de ceux qui gouvernent, des entrepreneurs bien sûr et aussi par une connaissance économique renforcée de tous ses citoyens. Combattre l’ignorance, quelle qu’elle soit et surtout celle de la matière économique, c’est parier favorablement sur l’avenir !

La connaissance devient un vrai capital. Capital porteur d’avenir. Indispensable pour vivre demain dans un monde choisi et non subi. Où il est préférable d’être associé aux décisions plutôt que d’avoir à les exécuter.

Alors, croissance, louons tes vertus à court et moyen terme ! Quant au long terme ... nous serons morts, comme disait J.M. Keynes.


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