La nouvelle stratégie du choc du coronavirus

par Décoder l’éco
lundi 20 avril 2020

 

Comme l’a rappelé Naomi Klein dans sa dernière vidéo, le choc du Covid19 va engendrer de gros changements dans nos sociétés. Dans son livre la stratégie du choc, Naomi explique comment après un choc, les luttes d’influences se forment et comment dans de nombreux cas, les néolibéraux en profitent pour prendre le pouvoir.

Les luttes de pouvoir sont déjà engagés entre les néolibéraux actuellement au pouvoir en Europe avec le soutien de la finance et tous ceux qui souhaiteraient leur reprendre le contrôle pour redonner du sens à l’économie.

Les néolibéraux de la commission européenne, du gouvernement français et de la banque centrale européenne, vont tout faire pour nous faire croire que leur solution est la bonne et qu’ils font cela dans notre intérêt. Ils vont appliquer les mêmes recettes qu’après la crise de 2008 en amenant un maximum de monde vers l’austérité.

La seule manière de lutter contre ce pouvoir c’est d’informer les gens. Ils faut que chacun comprenne ce qui se passe pour être capable de comprendre qu’il s’agit juste d’un choix. C’est aussi l’analyse de Naomi Klein dans sa dernière vidéo.

Les décideurs sont en train de douter aujourd’hui il faut absolument leur mettre la pression pour avoir une chance que les décisions se prennent dans le bon sens.

 

Lien vesr la vidéo : https://youtu.be/oh140UNlCA0

 

Le pouvoir des banques : le contrôle de la monnaie

La seule chose qu’il faut bien avoir en tête pour comprendre le pouvoir des financiers c’est d’où vient l’argent. Vous entendez chaque jour des discours comme quoi, il faut faire des efforts, la dette c’est mal et l’argent ne tombe pas du ciel. Il n’y a rien de plus faux.

Prenons un exemple avec un particulier qui va voir sa banque pour monter son entreprise. Il lui faut 1 million d’euro. Il demande donc un crédit de 1 million d’euro à sa banque, dans le langage courant les gens appellent cela un prêt. Ces 1 million d’euro ne sont pas dans les coffres de la banque. Quand la banque accorde le prêt ou plutôt le crédit, elle crée cette monnaie. Elle écrit sur le compte du particulier 1 millions d’euros, et elle écrit dans ses livres de compte -1 million d’euro. À aucun moment elle n’a transféré de l’argent de ses coffres vers le particulier, elle a juste rajouté 1 million d’euro. Cela s’appelle faire de la création monétaire, c’est pour cela qu’il faut mieux appeler ça un crédit plutôt qu’un prêt. On ne peut pas prêter ce qu’on n’a pas.

C’est la dette du particulier qui a créé le 1 million d’euro. Quasiment tout l’argent qui circule aujourd’hui a été créé par une dette. La monnaie que vous avec dans votre portefeuille, il y a quelqu’un quelque part qui a créé une dette pour que vous puissiez l’avoir. Les particuliers ont des dettes, les entreprises ont des dettes, et toutes les administrations, communes, départements, région et États ont des dettes. Leurs dettes permettent d’avoir de l’argent qui circule, sans dette il n’y a pas d’argent.

D’ailleurs, quand on rembourse la dette, cela fait autant d’argent en moins qui circule. Si on veut plus d’argent qui circule, il faut plus de dette. Les banques ont pour rôle de créer la monnaie quand elles accordent un crédit et ensuite de détruire la monnaie en s’assurant que le crédit est remboursé. Le but est que ça circule. Elle injecte la monnaie et la récupère.

Leur rôle des banques est donc hyper puissant. Ce sont les banques qui décident ce qui mérite d’avoir un investissement. Puisque les banques privées ont pour but de gagner de l’argent, cela signifie qu’elles ne prêtent qu’au personnes, entreprises ou États qui leurs garantissent que leur activité est rentable. Autrement dit les banques privées refusent de financer tout ce qui pourrait être bon pour la société mais ne rapporte pas d’argent puisque c’est à perte.

Une banque n’accordera jamais de crédit à un hôpital gratuit puisque l’argent créé ne reviendra pas.

 

La puissance des banques face aux États

Maintenant, voyons simplement ce qui se passe pour les États. En Europe, nous avons la Banque Centrale Européenne. La BCE a le pouvoir de créer de la monnaie. Autant qu’elle le souhaite. Elle ne s’en prive pas depuis 2015, la monnaie qu’elle a créée est phénoménale, mais ça n’a jamais profité aux États.

En effet, depuis les accords de Maastricht, il est interdit que la BCE prête directement aux États membres. Ce n’est pas inefficace, ce n’est pas impossible. Par exemple en France jusqu’en 1973, c’est la Banque de France qui majoritairement prêtait à l’État français.

C’est interdit, juste pour une question d’idéologie néolibérale. Les politiques européens qui sont néolibéraux, ne veulent pas que l’on puisse se mettre d’accord pour financer un bien commun. Ils refusent que les États puissent aller voir la BCE et demander des crédits pour construire des hôpitaux, des EHPADs ou pour financer une transition énergétique ou écologique. Les néolibéraux défendent l’idée que seul le marché doit décider de ce qui est juste. Le marché finance ce qui est rentable, donc seul ce qui est rentable est juste et mérite d’être financé.

Donc seuls les banques privées ont le droit de prêter aux États. Elles ne prêtent que pour financer des activités rentables. Ce pouvoir leur permet d’avoir une influence énorme. Les États vivent sous la menace que les banques refusent de leur prêter de l’argent.

 

Les marchés financiers se servent du pouvoir des banques

La partie de la banque qui prête de l’argent aux États s’appellent la banque de dépôt. Il y a une autre fonction assurée par les banques, c’est l’investissement sur les marchés financiers, le fait de jouer en bourse. Cela s’appelle la banque d’investissement. Les banques d’investissements et de dépôts ne sont plus séparées depuis 1999. Depuis cette date, elles ont à la fois le pouvoir de contrôler la monnaie et en plus de jouer sur les marchés financiers. Cela leur donne une capacité énorme de faire n’importe quoi sur les marchés financiers. C’est ce duo qui a créé la crise de 1929 et la crise de 2008.

En 2008, les États et la BCE ont racheté les titres pourris des banques qui ne valaient plus rien de façon à les sauver. Pour racheter tout ça, les États se sont endettés.

En 2010, les banques ont menacé les États de ne plus leur accorder de crédit s’ils n’appliquaient pas une politique d’austérité. C’est ce qu’on a appelé, la crise de la dette.

Plutôt que d’aider les États à sortir de cette impasse, les politiques européens, ont refusé de changer la loi pour que la BSE puisse prêter aux États et se sont tous mis à faire de l’austérité.

L’austérité, cela consiste à limiter les dépenses et les recettes des États. Vous avez certainement remarqué que les recettes qu’on a enlevé en France, concernaient surtout les grandes fortunes de la finance. L’ISF pour la partie financière a été supprimée et Emmanuel Macron a créé la Flat Tax pour diminuer les impôts sur les dividendes.

Du côté des dépenses, tous les pays comme l’Italie, la Grèce ou l’Espagne ont privatisé une grande partie de leurs biens publics. Ce sont les banques d’investissements qui en ont profité.

Cette moindre participation de l’État a l’économie a ralenti l’économie européenne, au point que l’économie réelle n’arrive plus depuis 2015 à donner assez d’argent aux marchés financiers pour payer les dettes de tout le monde. Plutôt que de revoir ce système, la BCE, soit-disant pour soutenir l’Europe a donné aux marché financiers 2700 milliards d’euros supplémentaires depuis 2015.

Pour résumer les banques de dépôts menacent les États de ne pas leur prêter de l’argent. Les États appliquent alors l’austérité qui permet aux financiers de ne plus payer d’impôts et aux banques d’investissements de prendre le contrôle des biens publics.

Quand la situation devient intenable parce qu’il n’y a plus assez d’argent qui circule, la BCE en donne plus aux financiers.

Il est temps de reprendre le contrôle

L’économie est en berne avec la crise du Covid19, les marchés financiers devraient forcément se casser la figure puisque l’économie réelle ne va pas produire assez de richesse pour alimenter les marchés financiers.

Christine Lagarde a annoncer qu’elle allait donner 1100 milliards de plus aux marchés financiers pour qu’ils tiennent. La BCE est en train de répéter le scénario de 2008.

Les banques sont déjà en train de dire qu’il faudra faire de l’austérité si les États veulent pouvoir financer leur crise.

Des députés européens ont proposé des amendements pour que la BCE puisse prêter directement aux États et enfin s’affranchir des banques privées. Les néolibéraux sont malheureusement majoritaires au parlement européens et ces amendements ont été rejetés.

C’est déjà une vraie révolution que ces amendements aient pu être proposés au parlement européen.

En France, les néolibéraux du gouvernement annoncent qu’il faudra faire des efforts pour financer la crise, ils préparent l’austérité, mais ils hésitent. Ils sentent qu’ils sont en bout de course.

Les anglais par exemple viennent de reprendre le contrôle de leur monnaie et la banque d’Angleterre va fiancer directement l’État.

Aux États-Unis le gouvernement va distribuer de l’argent à tous les américains.

Une autre voie est possible que de rester sous contrôle des banques et des marchés financiers. Nous devons utiliser cette crise pour nous en débarrasser et reprendre le contrôle de notre monnaie. Ce sera la seule manière de financer ce que nous pensons juste et pas uniquement ce qui rapporte de l’argent.

Cette crise est à la fois une opportunité et un avertissement. Une opportunité parce qu’elle peut nous permettre de reprendre le contrôle. Un avertissement parce que d’autres crises se profilent, à commencer par les crises énergétiques et écologiques. Les financiers ne s’occuperont jamais de provisionner de l’énergie ou de construire en environnement sain pour tout le monde. Puisque leur seul but est le profit. Pour l’éducation de nos enfants ou pour s’occuper des anciens, c’est pareil, il faut absolument un État fort et indépendant des marchés financiers pour faire tous ces investissements d’avenir qui profiteront à tous.

Le gouvernement hésite aujourd’hui, c’est le bon moment pour que tout le monde comprenne ce qui est en train de se jouer aujourd’hui. Il s’agit de notre avenir et de celui de nos enfants. Nous ne devons pas limiter cet avenir aux seuls bénéfices de la finance, nous devons définir nous-même ce qui est juste et le mettre en œuvre. Cela se joue maintenant, il y a bien une guerre. Mais c’est une guerre des idées, contre les néolibéraux.


Lire l'article complet, et les commentaires