Le capitalisme se nourrit des excès

par Voris : compte fermé
mercredi 29 octobre 2008

Le capitalisme ne connaîtra jamais la décroissance. Autant parler de modération à une boule de neige qui dévale une montagne ! La pente naturelle de ce système est de capitaliser sans limite jusqu’à grossir démesurément. Aujourd’hui, on désigne du doigt le "capitalisme financier" pensant exorciser le mal et le contenir dans cette expression. Peine perdue, le capitalisme ne peut pas dévier de sa pente naturelle. Il écrasera quiconque se mettra au travers de son passage, gouvernements y compris.

Ce qui fait la force du capitalisme, c’est qu’il se nourrit des excès. Les excès de la recherche du profit et de la consommation sont son principal moteur. L’avidité est la base même du système et justifie toutes les pratiques, toutes les audaces, toutes les innovations. Les produits financiers dits "innovants" aujourd’hui décriés n’ont pas volé leur succès : ils ont attiré nombre de financiers en mal de profits rapides. L’excès mène le monde. Le riche devient richissime, le consommateur devient obèse et dépendant.

Dégagé de sa philosophie libérale, le capitalisme ne s’accorde plus aucune limite ni aucun frein autre que la contrainte extérieure. En résumé, la boule de neige ne s’arrêtera que lorsqu’elle aura rencontré un mur. Et même, lorsque cela se produit, d’autres mains façonnent déjà, plus loin, une autre boule au sommet d’une autre pente à pic. On voit que ce n’est pas la contrainte humaine qui arrêtera le processus, mais l’affirmation de la liberté contenue dans la doctrine du libéralisme. Cette dernière repose sur la liberté individuelle, ce qui signifie que la liberté des uns respecte celle des autres. Or, ce n’est pas le cas pour le capitalisme qui ne s’embarrasse pas de tels principes et produit des dégâts considérables. La pauvreté et la famine sont le prix à payer pour la liberté chérie de quelques-uns dont les fortunes atteignent des proportions gigantesques et continueront de croître de façon exponentielle. Il n’y a aucune raison pour que cela s’arrête : effet boule de neige ! Seul l’épuisement complet des ressources naturelles peut mettre un terme au mouvement sans fin.

Pour revenir à un système sain, il faut réaffirmer la liberté. Ceci est paradoxal aux yeux de ceux qui pensent, à gauche, qu’il faut imposer par la force des normes sévères, nationaliser, imposer des voies autoritaires. C’est, au contraire, en affirmant le principe de liberté et en le faisant respecter au sens du libéralisme que l’on pourra remédier à ce qui n’est pas seulement une crise, mais le devenir de l’humanité. Le libéralisme, en effet, est une philosophie qui veut limiter le pouvoir par le pouvoir. Il défend les libertés des individus. Le capitalisme n’est pas tant le défenseur des libertés que le défenseur de ses propres intérêts. Le capitalisme est un régime économique fondé sur le développement des capitaux et, de ce fait, il favorise toujours le meilleur profit des entrepreneurs et des actionnaires. On en voit les "dérives" en France aussi, si tant est que l’on puisse parler de "dérives" à propos d’une tendance inscrite dans le principe même du système...

La première des libertés pour l’homme consiste à sortir de l’aliénation à l’argent. Sortir du fétichisme de l’argent. Le consumériste fétichisme est le premier responsable de la crise financière. N’est-ce pas notre rapport à l’argent, au profit, et à l’appropriation, qui doit être repensé dans le cadre d’une économie plus juste, au sens du développement durable ?


Extraits choisis du discours de clôture de François Bayrou lors de la Conférence nationale du Mouvement démocrate le 26 octobre 2008 à la Maison de la Mutualité à Paris :

"Vous savez, c’est une société très paradoxale dont nous sommes amenés à prendre une partie de la responsabilité. C’est une société consumériste, c’est une société à qui l’on peut faire entendre qu’il n’y a que le matériel qui compte…"

"L’idée fondamentale que le capitalisme portait, celle qui a échoué aussi, son postulat fondamental était que la somme des intérêts particuliers faisait l’intérêt général. Ce postulat s’est révélé faux."

"Pour faire simple, durant les 150 dernières années se sont déroulées en Occident - et quand je dis Occident, c’est vraiment au sens large, de la Californie jusqu’à Vladivostok, en passant par chez nous évidemment… - ce modèle reposait sur une idée toute simple qui était que le progrès technique, technologique, scientifique et économique, allait effacer les inégalités ou, en tout cas, restreindre les inégalités."

"(... ) Cette pensée a dit, en tout cas aux initiés, parce que l’on n’a évidemment jamais osé le dire devant l’opinion publique, qu’il fallait abandonner cette idée de la réduction des inégalités, que ce qui était meilleur pour la créativité des sociétés, c’était l’acceptation des inégalités et même la volonté de voir les inégalités se perpétuer et croître !"

"Capitalisme... si les mots ont un sens, cela veut dire que, pour les sociétés, l’essentiel est dans le capital, dans l’accumulation du capital, dans la recherche du profit qui rémunère le capital. C’est le capital qui commande et c’est le profit qui donne le sens. Tous les discours visent en réalité à cela."

"Voyez-vous, les mots ne sont pas choisis au hasard et, voulez-vous que je vous dise, même le libéralisme est autre chose. Libéralisme, cela veut dire que l’on met en premier la liberté. On peut discuter du système. On sait qu’il a des défauts, des faiblesses, on peut avoir des nuances, mais au moins, on peut honorer la liberté, la mettre au nombre des valeurs."

"Nous, nous savons ce que nous mettons en premier et, ce que nous mettons en premier, ce n’est pas l’argent, c’est l’être humain. C’est pourquoi nous n’adhérons pas au capitalisme. Nous adhérons à l’humanisme et nous considérons que, sur bien des points, le capitalisme est en contradiction avec l’humanisme."



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