Le credit-crunch, un danger mortel en récession !

par Aimé FAY
mercredi 8 octobre 2008

Depuis quelques jours ce terme anglais apparaît dans la bouche des commentateurs de la crise. Cette crise qui, depuis quelques semaines, affecte tous les systèmes bancaires de la planète et plus particulièrement ceux américains et européens. Le credit-crunch, littéralement "craquement du crédit", décrit l’arrêt soudain, par les banques, de l’octroi de crédits à l’ensemble des acteurs économiques, y compris, d’ailleurs, leurs consœurs bancaires. De fait, le credit-crunch symbolise une crise profonde du crédit. Une crise grave, voire ultime !
Alors, encore une nouvelle crise dira le grand public. Grand public qui se voit déjà touché ou risque d’être touché de plein fouet, surtout si c’est l’entreprise du coin qui voulait financer son développement ou boucler une fin de mois tendue. Idem pour le particulier qui avait un projet immobilier.
 
Dans un tel contexte, comment se manifeste le credit-crunch  ? Comment cette crise du crédit est-elle arrivée ? Quelles vont en être les conséquences ? Comment s’en sortir ?
 
Le credit-crunch ou crise profonde du crédit, c’est le fait pour le banquier d’avoir une perception démesurée du risque qu’il prendrait s’il faisait crédit à tel ou à tel agent économique et, donc, qui le pousse à ne pas faire crédit. Ce risque s’appelle le risque de non-remboursement, c’est-à-dire le risque d’insolvabilité, dit aussi risque de contrepartie, lié à la défaillance de l’emprunteur. Ce risque est par ailleurs inversement proportionnel à la croissance économique. Alors, si, en plus, l’économie est en récession, comme cela est le cas en France depuis six mois, le banquier "serre encore plus les boulons". Cela aboutit, soit à un refus direct pour un dossier de crédit où la visibilité à moyen long terme est incertaine, soit, pour un excellent dossier, la fixation de conditions exorbitantes pour couvrir quand même l’incertitude liée à tout crédit, celle d’une défaillance éventuelle de l’emprunteur. Souvent, avec de telles conditions, l’emprunteur sera lui-même amené à refuser d’emprunter. Donc, en cas de récession économique, seuls passent les dossiers dont la signature est de grande qualité et, de plus, munie d’une double sûreté, l’hypothèque et la caution personnelle, par exemple.
 
La crise du crédit, qui touche aujourd’hui la France, est d’abord une des conséquences du marasme de notre économie depuis le début de l’année 2008. La consommation baisse, la destruction d’emplois s’accélère, les déficits publics se creusent, l’inflation galope, le commerce extérieur poursuit son plongeon, etc. La crise financière, boursière et des subprimes venue des Etats-Unis n’en a été que l’accélérateur et, pour notre gouvernement et beaucoup de politiciens, le révélateur. Comble de l’ironie, elle sera même peut-être une aubaine pour eux. Aubaine qui, demain, aura bon dos. "Ce n’est pas de ma faute, j’ai fait le service maximum, la crise est mondiale… tout le monde le sait ".
 
Alors, laissons l’inconsistance aux inconsistants et voyons plutôt quelles vont être les conséquences de ce profond credit-crunch sur l’économie française ? Le crédit à l’économie est le principal moteur de toute économie moderne de marché. S’il s’arrête, c’est l’investissement qui s’arrête. Et, sans investissement, pas de production, pas d’embauche, pas de revenu, pas de consommation et, in fine, pas de production et donc… des faillites d’entreprises en chaîne et des files de chômeurs. En fait, le credit-crunch s’autoalimente s’il n’est pas rapidement jugulé. Si on le laisse faire, c’est la récession qui s’amplifie. Puis, c’est la dépression avec concomitamment une profonde déflation, c’est-à-dire l’effondrement des prix nominaux. En fait, c’est 1929 qui resurgit, mais amplifié d’une crise alimentaire, d’une crise des énergies et, d’une vacance totale du pouvoir chez la première puissance économique de la planète, les Etats-Unis, cela durant au moins six mois.
 
Comment s’en sortir ? Comme nous venons de le voir, le credit-crunch va au-delà d’une crise de liquidité bancaire. Cela serait trop simple. Il suffirait que la BCE continue à faire les fins de journée comme actuellement. Le credit-crunch n’est pas mon plus un problème de taux. Donc, ce qu’il faut, c’est que, durant quelques semaines seulement, les pouvoirs publics garantissent aux banques qu’elles n’ont pas à se soucier du risque de crédit. Ce sont les pouvoirs publics qui doivent s’en porter garants. Ce geste est le seul moyen de rétablir la confiance qui a abandonné l’ensemble des agents économiques en France, en Europe et ailleurs aussi.
 
N’ayant pas su donner ou redonner cette confiance sans laquelle le monde des affaires ne peut pas fonctionner, les pouvoirs publics doivent prendre enfin leurs responsabilités.
 
Garantir les dépôts c’est bien, voire indispensable ! Mais, aujourd’hui l’enjeu n’est plus celui-ci. C’est celui du risque d’asphyxie de notre économie par le credit-crunch.
 
Le gouvernement doit avoir le courage d’oser quelque chose d’innovant, jamais fait dans l’histoire de l’économie moderne : garantir aux banques qu’elles n’auront aucun risque de crédit ! Et, si concomitamment, la BCE baisse son taux d’intervention de 1 ou 2 points, ce sera gagné !

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