Le grand bluff de la taxe sur les riches

par Laurent Herblay
lundi 29 août 2011

200 millions d’euros : voilà donc la contribution que le gouvernement va faire peser sur les ménages les plus riches dans le cadre de son plan d’austérité dévoilé cette semaine par François Fillon. Une mesure plus que symbolique qui témoigne des bricolages injustes et superficiels de l’équipe au pouvoir.

L’imposture gouvernementale

Hervé Nathan, sur Marianne, a mis en parallèle ces 200 millions avec les 11 milliards du plan. En clair, moins de 2% de l’effort national sera concentré sur les ménages les plus riches. La situation est d’autant plus paradoxale que 16 personnalités très riches ont demandé au gouvernement à les faire contribuer à l’effort national. Cependant, outre la modestie de l’effort, cette taxe est temporaire et sera supprimée quand le déficit atteindra 3% du PIB, soit dès 2013…

Mais si on prend un peu de recul, cette décision apparaît comme encore plus symbolique car le bilan 2011 du gouvernement de l’imposition des ménages les plus riches apparaît encore très déséquilibré. En début d’année, Nicolas Sarkozy a essayé de nous vendre la suppression du bouclier fiscal, très contesté dès 2007, par une baisse de l’ISF. Sauf que le premier coûtait 900 millions d’euros aux finances publiques et que la baisse du second devrait coûter au moins 2 milliards.

Bref, au final, la fiscalité des ménages les plus aisés devrait baisser d’environ un milliard à l’issue de ce tour de passe-passe. En outre, on peut toujours se poser des questions sur le rendement prévu du nouvel ISF, qui semble très optimiste. En outre, comment ne pas constater que les 16 personnalités se sont bien abstenus de revenir sur les détails de cette réforme. Au global, ils seront bel et bien gagnants. Nicolas Sarkozy reste le président des riches.

Ce qu’il faudrait faire

C’est pourquoi Thomas Piketty, auteur, avec Camille Landais, d’un excellent livre sur la fiscalité, a sévèrement critiqué le gouvernement en qualifiant cette contribution de « totalement anecdotique ». Le gouvernement ajoute rustine sur rustine. Plutôt que de réformer globalement la fiscalité et de supprimer les niches fiscales, il diminue un peu les plafonds, maintenant la complexité et donc l’injustice de notre système fiscal, qui aurait besoin d’une réforme en profondeur.

A ce titre, il faut saluer les propositions de Jean-Louis Borloo, qui propose deux nouvelles tranches d’impôt sur le revenu à 45 et 50%. Il propose également une taxe sur les transactions financières, pour laquelle je me bats depuis longtemps. Il propose également de remonter la fiscalité sur les revenus du capital (en passant le prélèvement forfaitaire libératoire de 19 à 25%) ainsi que la suppression de la niche Copé sur les ventes de filiales des grands groupes, qui coûte 6 milliards.

Mais si ces propositions sont justes, Jean-Louis Borloo fait sans doute l’erreur de vouloir imposer une austérité trop radicale, sans proposer de mesure pour relancer la croissance. Car vouloir réduire rapidement les déficits a forcément un impact négatif sur la croissance, déjà pas bien vaillante, comme l’a démontré la hausse du chômage en juillet. Bref, l’austérité seule est une voie extrêmement dangereuse, comme le souligne Joseph Stiglitz dans son dernier livre.

Comme souvent, cette taxe exceptionnelle sur les riches est de la poudre aux yeux, comme le montre bien le dossier de Marianne 2. Dès que l’on prend un peu de recul, Nicolas Sarkozy reste encore et toujours le président des riches, celui qui démantèle l’ISF.


Lire l'article complet, et les commentaires