Le Medef, vautour du néolibéralisme

par Laurent Herblay
jeudi 25 septembre 2014

Les propositions du patronat sur l’emploi sont enfin sorties. Initialement programmées pour les universités d’été d’août, puis mi-septembre, les évènements politiques et le souci de ne pas prendre la majorité de front ont poussé Pierre Gattaz a temporisé, sur la forme, mais pas le fond.

Laisser faire et moins disant
 
Comme le note bien le Monde, « au final, malgré les reports de présentation, le document sur le fond n’a connu que des changements mineurs  ». Et même si Pierre Gattaz a tenu à faire préciser sur le compte Twitter du Medef que « nous ne remettons en cause ni le SMIC ni les 35 Heures  », la réalité est toute autre. En effet, le Medef propose de donner la liberté aux entreprises de fixer le temps de travail, en accord avec les syndicats, sans dépasser néanmoins 48 heures par semaine, Pierre Gattaz ayant précisé qu’il ne voulait pas revenir à l’âge de pierre… Juste au 19ème siècle ? Car malgré tout, cela pourrait représenter plus de 30% de temps de travail supplémentaire, et il n’est pas totalement évident que dans leur esprit les salaires seraient ajustés de manière totalement proportionnelle.
 
En outre, si le Medef ne demande pas une baisse du SMIC, il propose que l’Etat en prenne une partie à sa charge pour les chômeurs de longue durée et insiste encore sur la compétitivité, le mot au nom duquel on casse les salaires partout, y compris chez Air France. Suivent une multitude d’idées très néolibérales : suppression de deux jours fériés, facilitation du travail du dimanche, assouplissement du droit du travail, remise en cause de l’ISF, alors que les inégalités de patrimoine ne cessent d’augmenter. Bref, rien de nouveau sous le soleil : toujours plus de laisser faire, moins d’Etat et de règles et course au moins disant dans tous les domaines. Dommage qu’on ne lui fasse pas suffisamment remarquer que cela est exactement le chemin que l’on prend depuis 30 ans, avec le succès que l’on sait.
 
Surfer sur la vague néolibérale

Mais le Medef a malheureusement eu l’intelligence d’habiller cette violente remise en cause de notre modèle social d’un vocabulaire relativement modéré (d’où le tweet sur les 35 Heures et le SMIC), même s’il continue à appeler à accélérer le rythme de déconstruction de notre Etat. En outre, l’histoire qu’il raconte est tout de même relativement bien étudiée, puisque Pierre Gattaz explique que nos difficultés viennent de notre lenteur dans l’adoption de l’agenda néolibéral et que l’accélération dans sa mise en place permettrait de relancer la machine. Malheureusement, le cas allemand sert souvent ce genre de discours, même si sur le fond, cette explication est bien trop superficielle et ne prend pas en compte beaucoup d’autres facteurs, et notamment le fait qu’il repose sur la non réplication chez ses principaux clients.

Problème : les deux camps politiques qui se partagent le pouvoir depuis des décennies tiennent finalement un discours pas très différent dans sa logique. PS et UMP accepte la logique délétère de la mondialisation anarchique et broyeuse de conquêtes sociales et ne diffèrent que légèrement sur les modalités de sa mise en œuvre, Hollande, curieusement, étant parti pour faire plus sur la baisse du prix du travail que Sarkozy, un peu comme en Allemagne. Du coup, il n’est pas difficile pour le Medef de chercher à pousser son avantage et il est assez logique qu’il prenne des précautions vis-à-vis de la majorité actuelle qui pourrait finalement lui avoir été plus favorable que la précédente. Et l’UMP semble vouloir surfer sur cette vague également en ne se laissant pas dépasser sur la droite par le Parti dit Socialiste.
 
Alors que les idées néolibérales viennent tout juste de démontrer leur faillite complète dans la grande crise de 2008-2009, elles continuent à avancer en profitant de la crise qu’elles ont provoquée par une terrible ironie du sort. Heureusement, cela ne durera pas éternellement.

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