Le microcrédit mal connu du grand public

par Benjamin Melitta
jeudi 5 mars 2009

Le microcrédit même s’il fait partie des instruments utiles de développement économique, reste mal connu du grand public.

En 2005 avec l’attribution du prix Nobel de la paix à Mohammed Yunus, le grand public a découvert le microcrédit. Cela consiste à prêter de petites sommes d’argent à des individus très pauvres et exclus des systèmes bancaires traditionnels pour qu’ils puissent lancer une activité commerciale ou artisanale et ainsi améliorer leur niveau de vie.
Ces personnes démunies réputées insolvables affichent des taux de remboursement proches de 100%. Les taux d’intérêt auxquels prêtent les institutions de microfinance, organismes qui font office de banque auprès de ces populations, sont encore relativement importants (même s’ils restent très inférieurs aux taux pratiqués par les prêteurs informels des villages). Pourtant le taux de défaillance des microentrepreneurs est quasi nul.

Pourquoi les taux d’intérêt restent-ils élevés si le risque est faible ? Deux raisons permettent d’expliquer cette anomalie.


La première raison : les coûts de transactions sont très élevés. Les bénéficiaires de ces micro prêts sont souvent dans des zones rurales. Le déboursement des prêts et la collecte des remboursements se fait lors des tournées des agents de crédits, qui ont lieu quotidiennement, ou chaque semaine au domicile ou au magasin de chaque microentrepreneur. Cela coûte très cher. La productivité des institutions de microfinance est encore très faible. Ces taux d’intérêts élevés répondent ainsi à une certaine logique économique.

La seconde raison : l’activité de microcrédit est encore largement méconnue, il n’existe pas encore de modèle unifié d’analyse de risque adapté à ce segment de marché. Toutefois, des agences de notation connues des banquiers traditionnels, comme Standard & Poor’s, ainsi que des agences spécialisées comme M-Cril ou Planet Rating, ont développé des outils d’analyse et fournissent des « credit rating » des institutions de microcrédit. Mais malgré cela le secteur reste encore confidentiel. En économie comme dans la vie réelle ce qui est mal connu est considéré comme risqué, même si la réalité est différente. Il y a donc un formidable travail d’éducation et de communication à faire :
 - Education du grand public à qui proposer des produits d’épargne spécifique ; On voit d’ailleurs des fonds se développer dans le secteur de la microfinance
 - Education des futurs banquiers et gestionnaires d’actifs. Cela passe par un enseignement dans les écoles de commerce, les universités de gestion et les écoles d’ingénieurs où sont formés les banquiers de demain.

La communication auprès du grand public avance avec des événements focalisés sur le microcrédit et qui depuis l’attribution du prix nobel de la paix à Mohammed Yunus trouvent un certain échos dans les grands médias. On peut notamment citer la semaine du microcrédit qui se tient chaque année en France en juin à l’initiative de l’Adie.
Le microcrédit est aussi devenu une réalité tangible pour les internautes avec la création de plateformes de microcrédit en ligne ou « social lending plateform ». Un peu à la manière d’Ebay ces sites permettent à des internautes de financer des microentrepreneurs en ligne. C’est le site americain Kiva.org qui a lancé ce concept. Des plateformes européennes ont vu le jour avec MyC4.com au Pays Bas et Veecus.com en France.Si ces plateformes sont des concepts intéressants la demande de microcrédit est telle que seules les banques pourraient y répondre de manière efficace et globale.

A ce titre il est intéressant de noter que des enseignements spécialisées se développent dans les écoles de commerce. C’est notamment le cas de l’Essec qui a lancé une chaire « d’économie solidaire ». Ainsi quand dans 10 ans ils seront à des postes de responsabilité dans des banques, on peut espérer que ces nouveaux banquiers apportent un regard plus rationnel sur les activités de microcrédit qui ne leur seront pas inconnues.


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