Le RSA ou « Revenu de Sombre Avenir »

par Voris : compte fermé
mardi 12 août 2008

Le quotidien Les Echos s’est procuré l’avant-projet de loi généralisant à l’ensemble du territoire le Revenu de solidarité active (RSA). Pas de grande surprise. Le RSA reste une simple carotte financière et rien de plus et continue d’être présenté comme étant le meilleur, voire l’unique, moyen de lutte contre la pauvreté. Compte tenu de la faiblesse de l’enveloppe budgétaire accordée et des perspectives moroses d’emploi et de logement, le RSA mériterait d’être rebaptisé "Revenu de sombre avenir".

Le RSA sera sous-doté budgétairement et constituera donc une simple mesure d’incitation financière à la reprise d’un emploi. Partant, il ne sera guère plus efficace que le RMI et que l’API qu’il vient remplacer. On voit mal comment l’objectif fixé de réduction d’un tiers de la pauvreté d’ici 2012 pourrait être atteint avec si peu de moyens et d’ambitions.

Le journal Les Echos présente le projet de la réforme dont les principaux contours sont fixés.

Le RSA, simple mesure financière

Le RSA devait avoir pour ambition de donner un surplus de revenus et de mettre à disposition des personnes en insertion les moyens dont disposent les organismes pour l’emploi. Faute d’ambition et de budget suffisant, le RSA sera une simple mesure financière.

Le RSA se donne pour finalité de permettre à des bénéficiaires des minima sociaux qui reprennent un travail de passer le cap du seuil de pauvreté. Mais cette démarche est assez cynique quand on sait que le dernier rapport de l’Observatoire de la pauvreté et de l’exclusion sociale fait état d’une dégradation du niveau du RMI qui est passé d’un peu moins de 70 % du seuil de pauvreté en 1995 à près de 60 % en 2005. Donc, avec le RSA, non seulement, cette perte ne sera pas corrigée (et la situation des bénéficiaires des minima sociaux ne fera que s’aggraver), mais un surplus financier ne sera accordé qu’aux méritants : ceux qui pourront reprendre un emploi. Voilà pour le premier reproche fait au système.



Autre reproche, l’incitation financière ne sera pas forcément opérante parce que la plupart du temps les personnes qui se remettent au travail ne le font pas après calcul comparatif de leur situation présente et à venir, et parce que d’autre part la plupart des obstacles à leur reprise d’emploi ne sont pas monétaires. Ils sont dans la difficulté de faire garder les enfants, ou dans le coût du transport, le manque de formation...

Or, l’on sait que le coût du transport ne va pas baisser du fait de la montée régulière du prix du carburant.

En ce qui concerne la garde d’enfants, il faudrait mettre en œuvre un véritable service public de la petite enfance, dans un premier temps prioritaire pour les allocataires de minima sociaux puis rapidement étendu à l’ensemble des parents de jeunes enfants.

Pour ce qui est du logement, une décrue de la construction est anticipée par le ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire qui a constaté une baisse des mises en chantier de logements entre avril et juin de 28,8 %, soit un repli de 6,5 % sur les douze derniers mois. Il est hélas prévu que cette baisse se poursuive lors des deux derniers trimestres ainsi qu’en 2009. L’objectif du gouvernement de construire 500 000 logements par an est donc compromis. Ajouter à cela la décision d’assouplir la loi SRU fixant une obligation de 20 % de logements sociaux dans chaque commune, et l’on peut douter de la sincérité des objectifs annoncés par le gouvernement.

Le RSA est présenté comme la seule vraie réponse à la pauvreté grandissante

Or, c’est un mensonge. Une véritable politique de lutte contre la pauvreté passe en réalité par un plan d’aide au logement ambitieux. Or, rappelons que Mme Boutin a décidé d’assouplir l’obligation faite aux communes de construire un certain quota de logements sociaux.

Une véritable politique de lutte contre la pauvreté passe aussi par un coup de pouce à l’emploi, par une volonté de changer le contexte économique pour réduire le nombre de temps partiels imposés et le travail précaire (alternance de CDD et de périodes de chômage). Elle passe aussi par une revalorisation des minima sociaux, des salaires et des petites retraites.

S’il s’agissait d’aider vraiment l’emploi, on aurait décidé de consacrer à cette politique les moyens humains nécessaires pour renforcer l’action de l’opérateur issu de la fusion de l’ANPE et de l’Unedic et on aurait donné accès à ces moyens aux bénéficiaires du RSA. Mais cela supposerait d’accepter une augmentation du nombre de personnes recensées comme demandeurs d’emploi. Moins de 35 % des Rmistes étant inscrits à l’ANPE, on imagine la hausse que cela occasionnerait sur les chiffres du chômage...

Le RSA risque d’être employé isolément comme seul moyen de lutte contre la pauvreté, alors qu’il faudrait une politique d’ensemble plus ambitieuse. Le cadre budgétaire étriqué va également nuire à la réalisation des objectifs fixés.

Ambitieux à l’origine (c’était l’idée de Martin Hirsh), le RSA semble s’être réduit aujourd’hui à une simple mesure visant à compléter tout un ensemble de dispositions sur le chômage destinées à assouplir la main-d’œuvre et à la rendre plus malléable.


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