Les ménages américains ne vont pas bien... et ils ne l’ont pas volé !

par Charles DEREEPER
lundi 30 mars 2009

Comment résumer en une phrase la situation ?

Les américains qui tirent depuis deux décennies la croissance mondiale en consommant intégralement leurs revenus (ce qui a représenté jusqu’à 70% du PIB américain), ont à partir de 2004 opéré de la magie noire, à savoir qu’ils ont extrait du cash de leur patrimoine immobilier qui prenait de la valeur (et donc qui présentait des plus values latentes, on parle de "cash extraction", mesuré par l’indicateur MEW) pour pouvoir encore plus consommer. Une véritable boulimie...

Au final, entre 2004 et 2008, nous nous sommes retrouvés dans la situation absurde où les ménages américains consommaient 110% de leurs revenus... ils parvenaient à dépenser plus qu’ils ne gagnaient en revenus, hors plus values immobilières et boursières. Intenable, on l’a vu...

Tout s’est écroulé. Loin d’être une catastrophe, la correction est au contraire largement salutaire.

Aujourd’hui que la Bourse remonte de 15%, que les plans publics un peu bidons s’enchaînent (piquer dans la caisse commune en dévaluant le dollar de 300 milliards, il n’est pas besoin d’être un génie pour y arriver, le souci étant qu’il va falloir voler bien plus encore pour parvenir à, excusez du peu, stabiliser la situation...), que les réglementations anti banques, paradis fiscaux, finances et traders fleurissent, nous devrions croire qu’on voit le bout du tunnel ?

Tout ceci n’est que de la poudre aux yeux. Du vent. Les dettes sont déplacées d’un endroit à un autre, d’une sphère ou d’un groupe à un autre. Le problème reste entier, très mystérieux et assez angoissant.

Dire que les politiciens mentent comme des arracheurs de dents, prend actuellement tout son sens.


Observons quelques instants les dernières nouvelles sur le front du MEW.

Le MEW est devenu négatif comme vous pouvez le constater. Cela signifie que le pire est en route. La centrifugeuse déflationniste commence à tourner sur elle-même. La baisse de la valeur de l’immobilier met de plus en plus d’américains en situation de patrimoine négatif. Le poids de leurs dettes les écrase, ce qui influe directement sur la consommation.

Cette consommation doit déjà être réduite de 2.000 milliards pour revenir au niveau des revenus globaux. Mais si on prend en compte l’augmentation du poids des dettes dans le budget des ménages avec le MEW négatif, il faut prévoir un ajustement encore supérieur.

Autant dire que les capacités de production n’ont pas fini de s’ajuster à la baisse... les petits plans sympas des politiciens qui passent aux 20 heures de tous les pays occidentaux, ne peuvent au final qu’arrondir les angles, au mieux.

Vous pensez que j’exagère la situation ? Voici le graphique des défauts de paiements sur les cartes de crédit, graphique ajusté à fin 2008, dernier lieu où l’on pouvait récemment encore transférer ses dettes. Cela signifie qu’on tirait de l’argent par ce biais pour rembourser les autres dettes que l’on avait souscrit ailleurs.

Les défauts explosent avec entre 5 à 8% de pourcentages à cette date. D’autres articles récents dans la presse anglo-saxonne montrent chez Citi ou Amex des taux de 10%-11% de défaillance sur le premier trimestre 2009.

Alors, à la question de savoir si on peut espérer voir le bout du tunnel, je réponds à titre personnel un gros NON.

J’attends avec une grosse méfiance le moment où la lente glissade de la demande va toucher le cœur du réacteur, à savoir les nombreuses entreprises qui réduisent la voilure jusqu’à toucher le seuil minimal de rentabilité. Après la rupture... ?

Je ne vois pas à ce jour comment les Américains pourraient éviter cette contraction de la consommation. Avec quoi pourraient-ils la payer ?

Je ne suis pas devin et j’aimerais volontiers qu’une solution soit trouvée, car vivre en période de crise économique est pénible. Mais pour l’instant, rien.

En outre, je suis scandalisé par les décisions de dévaluation du dollar, même si cela ne me surprend pas comme je l’ai écrit dans cet article il y a à peine deux mois.

Le monde se divise désormais en deux groupes : ceux qui s’endettent et ceux qui épargnent. La couleur politique, le niveau de richesse ou de pauvreté ou l’aspect géographique ne joue plus. Payer les dettes des irresponsables avec l’argent des gens réfléchis est d’une injustice effarante, mais néanmoins une réalité. Evidemment, en passant par la monétisation des dettes nationales, le processus est suffisamment complexe pour que personne ne descende dans la rue faire grève. Il n’empêche que les épargnants, petits ou gros, Etats (comme la Chine) ou entreprises se sont tous faits voler pour payer des ménages américains supposés incapables de se rendre compte qu’ils achetaient une maison bien trop grosse par rapport à leur situation financière.

Mais comment peut-on défendre trois secondes un tel modèle de société ?

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