Les paradis fiscaux au purgatoire ?
par Napakatbra
lundi 23 février 2009
Soupçonnée d’avoir aidé 52 000 américains à frauder l’impôt et confrontée aux menaces de l’administration Obama, la banque suisse UBS a dû se résoudre à fournir l’identité de certains de ses clients à la justice américaine. Le secret bancaire est battu en brèche, la Suisse tremble...
Les Etats-Unis soupçonnaient depuis quelques temps la banque suisse UBS d’avoir aidé certains ressortissants américains à frauder le Fisc. Quelques documents internes de la banque révélés samedi confirment largement cette hypothèse. Problème : pour enquêter, la justice demande l’identité des clients américains de l’établissement, ce qui constitue une attaque frontale contre le sacro-saint principe du secret bancaire garanti par la loi fédérale. L’affaire aurait pu en rester là.
Aux US, on ne badine pas avec l’impôt
Mais l’administration Obama est entrée dans la danse, menaçant de retirer sa licence d’exploitation au monstre bancaire. De son côté, le Tribunal administratif fédéral (TAF), saisi par huit plaignants, a purement et simplement interdit à UBS de transmettre ses données. Trop tard ! "Les données sont déjà à Washington", affirmait Alain Bischel, porte-parole de l’Autorité de surveillance des marchés financiers (Finma). En mauvaise posture financière, du haut de ses 13 milliards de pertes pour l’année 2008, la banque a dû s’exécuter dans l’urgence, livrant l’identité de 250 à 300 clients américains. Le ministère américain de la Justice exige maintenant qu’UBS livre des informations sur 52.000 comptes secrets identifiés par le fisc comme appartenant à des Américains, qui recèleraient près de 15 milliards de dollars d’actifs.
"Déclaration de guerre", pour La Tribune de Genève
La Suisse toute entière hurle au scandale et les Européens semblent se réveiller ; ce week-end, l’Angleterre et l’Allemagne ont jeté de l’huile sur le feu (du lac ?). Le ministre des finances britannique, Alistair Darling, s’en est violemment pris aux banques helvétiques. "Le secret qui permet aux gens d’abriter leur fortune sans payer d’impôts comme il se doit, on ne peut pas le tolérer", a-t-il déclaré, ajoutant que la Suisse devait s’amender si elle "veut faire partie de la communauté internationale". Curieusement, Darling aura oublié d’évoquer les Antilles britanniques et autres îles anglo-normandes, qui sont parmi les paradis fiscaux les plus obscurs et les plus actifs de la planète. Angela Merkel s’est aussi déclarée favorable à une politique de sanctions à l’encontre des paradis fiscaux. Même le Luxembourg a admis qu’il faudrait "peut-être redéfinir" le principe du secret bancaire.
La descente aux enfers des paradis fiscaux ?
Il aura donc fallu que la justice américaine s’en mêle. Quelques semaines de menaces auront "suffi" à lever un voile de ce secret bancaire, qui fait pourtant partie des secrets les mieux gardé de notre époque. Les conséquences sont énormes. Primo, la Suisse n’est maintenant plus une destination "sûre" pour les capitaux "litigieux", et les semaines qui viennent seront capitales pour l’avenir de l’économie bancaire du pays, à en croire les éditorialistes locaux. Secundo, les paradis fiscaux démystifiés, qui pourra empêcher les gouvernements de multiplier les pressions contre les "trous noirs" de la finance ? Hein... qui ?
Citation : "Un dictateur qui meurt, c’est une banque suisse qui ferme" (Anonyme sur France Inter - 4 Novembre 1996)