Non, la crise des dettes souveraines ne menace pas directement votre épargne

par Catherine Segurane
lundi 12 septembre 2011

"Les marchés, c'est vous, c'est moi ..."

Cette phrase, les économistes acquis au système nous la resservent quotidiennement. Ils recherchent un effet d'identification de la part de l'auditeur.

Or non, les marchés, ce n'est pas vous et ce n'est pas moi. Les grands banquiers qui sont à la manoeuvre dans les magouilles actuelles sont peu nombreux et pourraient être identifiés si les Etats le voulaient.

De même, si un Etat fait défaut, ce n'est pas vous et ce n'est pas moi qui sommes placés de telle sorte à payer la note par le jeu direct des mécanismes classiques de l'épargne.

En revanche, vous avez du remarquer qu'on sait nous transférer ce paiement par le jeu des plans de rigueur et des transferts de pertes sur le contribuable que nous sommes aussi.

La crise des dettes souveraines menace-t-elle votre épargne ?

Bien sur, me direz-vous. D'ailleurs, votre épargne en a déjà souffert. Par la chute de la bourse si vous y êtes investis. Ou par l'augmentation de vos impôts.

Mais il s'agit là d'effets indirects : la chute de la bourse est liée aux différentes rumeurs lancées par les marchés financiers, et l'augmentation de vos impôts correspond à la décision politique de transférer des pertes sur les particuliers des classes populaires et moyennes. 

Cependant, si on laissait les pertes là où elles sont, sans les transférer, la crise des dettes souveraines ne menacerait pas le patrimoine des particuliers.

On notera d'ailleurs que l'effacement de dettes est un sport pratiqué couramment. Nous ne cessons d'effacer des dettes de pays du tiers-monde. 

En particulier, la dette de l'Irak, qualifiée d'odieuse, a été largement effacée sous pression américaine. En aviez-vous entendu parler ? Non, probablement. La presse a été discrète. L'intérêt des Etats-Unis, sur ce dossier, était la discrétion. Il en a coûté quatre milliards d'euros à la France, ainsi punie de ne pas s'être engagée dans la guerre aux côtés des Etats-Unis. Et l'Irak, c'est un tout autre morceau que la Grèce.

Quels seraient les effets directs (hors effets créés par lancement de rumeurs du marché, ou par décision politique), sur les patrimoines des particuliers, d'un défaut de la Grèce ? Ces effets toucheraient les obligations, généralement présentes dans les contrats d'assurance-vie en euros. Or, ces contrats sont protégés.

Dans Le Figaro des 10 et 11 septembre, édition papier, pages 27 (saumon), on peut lire un article très interressant intitulé :

La crise de la dette menace-t-elle votre assurance-vie ?

La réponse est négative (sauf développement d'un cataclysme) pour les assurances-vie en euro, c'est à dire celles les plus investies en obligations. En effet :

Dans le cas d'une assurance-vie en euros, le capital est garanti par l'assureur. Donc, au pire, vous perdrez le petit rendement qui vous était alloué chaque année.

Et ceci même si la Grèce fait défaut et même si d'autres Etats font défaut : c'est la nature même d'un contrat en euros que de vous garantir que vous retrouverez votre capital. Si les obligations dans lequel il a été investi se cassent la figure, votre assureur doit assumer la perte sur ses fonds propres sans vous la faire subir.

Que se passerait-il maintenant si votre assureur faisait faillite ? Le Figaro répond :

"L"hypothèse de la faillite d'un assureur, même si elle ne saurait être écartée, reste fortement improbable. Il y a en effet tout à parier que l'Etat français interviendrait pour sauvegarder la société défaillante. Et, en dernier ressort, il existe des mécanismes de sauvegarde de votre épargne. L'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles (ACAM) peut effectuer un appel d'offres auprès des autres assureurs pour que le portefeuille de l'assureur défaillant soit repris. A défaut, elle peut actionner le Fonds de garantie des assurances, qui couvre les avoirs à hauteur de 70 000 euros."

On le voit : les risques attachés aux obligations souveraines ne pèsent pas sur le particulier, même détenteur d'une assurance-vie (en euros), et celui-ci n'a aucune raison de s'identifier aux marchés en se laissant "vendre" l'argument classique : "Les marchés, c'est vous, c'est moi ... c'est votre assurance-vie".

Avec cet argument, on endort sa résistance et on lui fait les poches pour de bon.

En effet, alors même qu'il ne risque aucune perte sur son assurance-vie, on lui prélève de l'argent autrement, soit disant pour éviter ce risque (inexistant, nous l'avons dit) : plan de rigueur, augmentation de la CSG, etc ...

La perte de valeur de certains titres de dette souveraine pèse sur les assureurs, et, sauf transfert par magouille, ce sont eux qui doivent l'assumer.

Si nos gouvernants faisaient leur travail, ils se battraient pour éviter que ce transfert indu se produise. En effet, les assureurs sont assez riches, directement ou par le biais des réassurances, pour assumer le risque qu'ils ont pris.

S'ils assument ce risque sans que leur soient permis des transferts indus, ils perdront de l'argent (on s'en fout), mais les épargnants titulaires de contrats d'assurance-vie en euros n'en perdront pas, et l'économie réelle n'en perdra pas non plus (ce ne sont pas les assurances qui prêtent aux entreprises ou aux particuliers qui veulent acheter des logement ; ce sont les banques).


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