Paradis fiscaux : Injustice vitale à la survie du système monétaire ?

par peimpourte
vendredi 20 mars 2015

C’est promis, juré ! Cette fois-ci c’est la bonne ! Nos appareils politiques vont vraiment, sincèrement, sans concession, s’attaquer à l’évasion fiscale. Ils le disent à la radio, la télé, en meeting… Et pourtant rien de nouveaux sous le soleil des Îles Caïmans ? C’est un discours politique récurrent qui resurgit à chaque nouveau scandale, mais nous le savons bien, il s’agit surtout de poudre aux yeux destinée à calmer la rogne du bas peuple qui lui-même, à son petit niveau, n’est pas contre l’idée de déjouer les règles fiscales afin d’améliorer son maigre quotidien à travers le travail au noir, par exemple. Mais c’est si peu à côté des dizaines de milliard, d’optimisation, d’évasion, d’exil de nos multinationales, de nos millionnaires et milliardaires chaque année plus nombreux, alors que le pays s’enfoncerait dans le marasme économique selon certains ayant pignon sur média.

Soyons honnêtes, personne à droite comme à gauche ne souhaite vraiment s’attaquer à cette injustice institutionnalisée. Il nous faut donc chercher à comprendre pourquoi. Tout d’abord, c’est l’Etat qui est le premier responsable et même le promoteur de cette délinquance. En effet, à travers les multiples niches fiscales qu’il invente, n’admet-il pas, ne construit-il pas l’idée que l’impôt est mauvais et trop lourd en permettant de manière légale à certains de s’y soustraire en partie ? L’exemple des avantages fiscaux consentis au Qatar pour encourager ses investissements en France n’est-il pas un bel exemple ? Ensuite, ouvrons les yeux : les paradis fiscaux prospèrent de manière totalement institutionnalisée au sein même de l’espace européen, avec des accords internationaux qui légitiment l’évasion. Je pense à Monaco, Andorre, Jersey, le Liechtenstein, le Luxembourg. Enfin, ils ne sont pas rares les politiciens qui, ayant travaillé au gouvernement et ayant acquis une connaissance pointue des rouages du ministère des finances, se reconvertissent dans les grandes boites privées ou comme « avocats d’affaires » et mettent leurs savoirs et leurs réseaux au service de « l’optimisation fiscale » de leurs clients et patrons.

Et par ailleurs, le dumping fiscal (qui est moteur de l’évasion), ne sévit-il pas aussi à l’intérieure même de nos frontières, à travers la compétition fiscale que se livrent nos communes, nos agglomérations, nos régions, pour attirer les entreprises et les investisseurs. On le constate, le mal est partout.

Il s’agirait donc de dizaines de milliards (mais comment le savoir puisqu’il s’agit de sommes secrètes soigneusement cachées par les évadés au regard du FISC ?) qui suffiraient à régler tous nos problèmes de déficits et de dettes, selon certains. Mais alors pourquoi rien ne change et même pourquoi la situation s’aggrave ? Soyons clairvoyants, il s'agit de la protection des intérêts d’une élite jamais rassasiée ayant la main mise sur les pouvoirs en place, mais peut-être faut-il chercher une autre raison macroéconomique à cette injustice flagrante, liée au système de la création monétaire par la dette. Je m’explique :

N’en déplaise à certains qui n’admettent pas l’évidence, la monnaie fiduciaire (pièces et billets) qui est effectivement émise par les banques centrales ne représente même plus 10% de la masse monétaire globale dans la zone euro, il me semble. Le reste, la monnaie scripturale (monnaie d’écriture), aujourd’hui informatisée (ce qui permet d’autant plus sa démultiplication) est entre les mains des banques privées (qui d’ailleurs ont toutes des succursales dans les paradis fiscaux). Ces dernières empruntent à la BCE, pour alimenter leurs fonds propres qu’elles démultiplient par le système de création monétaire par la dette. Un Etat ne peut plus emprunter directement à la BCE (article 123 du traité de Lisbonne) mais doit passer par le privé. Nos institutions publiques sont donc pieds et poings liés au bon vouloir des institutions bancaires privées qui font la pluie et le beau temps sur les politiques de nos gouvernements et la mascarade des élections n’y peut plus rien changer.

Pour les réticents qui se refusent encore à voir cette réalité, qu’ils visionnent cette vidéo explicative de la banque de France qui explique la même chose sans évoquer toutefois les conséquences néfastes de ce système :

Il n’y est rien dit ou très peu, sur les intérêts et donc la croissance folle et incontrôlable de la masse monétaire. Plus exactement, à la question posée naïvement par un comédien, la Banque de France répond que tout est sous contrôle car pour limiter et juguler la création monétaire par le crédit, il suffit de relever les taux d’intérêts et que donc, il y a moins de nouveaux emprunts et moins de création. Je pose la question : La BDF nous prend-elle pour des cons ? En effet, l’augmentation des taux d’intérêt peut limiter certes, la masse des emprunts mais comme expliqué dans un article précédent, puisque l’argent nait du crédit et meurt à son remboursement, il faut toujours des emprunts nouveaux pour rembourser les emprunts antérieurs afin qu’il y ait aussi de l’argent en circulation dans l’économie. La hausse des taux d’intérêts oblige donc à consacrer l’argent disponible au remboursement des dettes antérieures et assèche les mouvements monétaires pour les échanges dans l’économie réelle et appauvrit les masses populaires. Un exemple d’actualité : la Grèce.

Mais il y a encore plus grave. Car la hausse des taux d’intérêts implique qu’il faudra rembourser encore plus que ce qui a été emprunté et donc qu’il faudra encore plus de création monétaire. Ce système pourri ne peut donc pas contrôler la création monétaire folle car le remède aggrave le mal.

Je reprends : l’argent nait de la dette avec intérêts et meurt au remboursement du capital. Puisqu’il faut rembourser plus, il faudra emprunter plus avec de nouveaux intérêts. Donc création exponentielle de monnaie déconnectée de l’économie réelle. Pour juguler cela, décision d’augmenter les taux d’intérêts afin de limiter les emprunts nouveaux et la création monétaire. Mais puisqu’il faut rembourser les emprunts antérieurs, si l’on réduit les nouveaux emprunts, on vide l’économie de sa monnaie d’échange au profit du remboursement (comme en Grèce). La hausse des taux d’intérêts ne diminue donc pas les besoins en nouveaux emprunts et pire, elle asservit encore plus la politique aux créateurs de monnaies qui sont les seuls gagnants puisque le coût du crédit augmente. La hausse des taux ne fait qu’accroitre les besoins en masse monétaire globale.

Mais revenons aux Paradis fiscaux dont l’existence est vraisemblablement liée et indispensable au système monétaire. Depuis 1971 nous sommes passés de 3 à plus de 60 trillions de dollars de masse monétaire mondiale (toutes formes confondues). Et cela en quarante cinq ans. Ca dépasse tout entendement, toute logique rationnelle. Les paradis fiscaux agissent comme des véritables trous noirs de l’univers financier et ils absorbent à jamais une immense partie de la masse monétaire en extension (tout en assurant le pouvoir de ceux qui la possède). Alors posons-nous la seule question qui vaille : Si vraiment demain, les Etats s’attaquaient aux paradis fiscaux et que les milliards qui y stagnent retournaient dans l’économie, qu’adviendrait-il ?

C’est bien simple, nous serions submergés par une vague énorme, un tsunami monétaire, engloutis par les flots de milliards de milliards et en quelques jours, l’argent perdrait vraisemblablement presque toute valeur. Et donc ? C'est la fin du monde ?

Voila pourquoi jamais personne ne s’attaquera vraiment aux paradis fiscaux. A moins que demain, enfin, un mouvement politique mette clairement le problème de la création monétaire par le crédit avec intérêts auprès des banques privées, au centre de tous les débats. Mais pour cela, il faudrait qu’il atteigne le pouvoir où tout simplement, puisse prendre la parole.

En attendant, nous allons poursuivre vers le gouffre financier car malgré les trous noirs des paradis fiscaux, la masse monétaire va continuer de croitre inexorablement sans que la croissance économique ne puisse suivre faute d’énergie, de matière premières et parce qu’elle détruit notre environnement vital et notre sagesse sociale au nom de l’intégrisme économique. Bien entendu, cette démonstration n’entre pas dans les détails dont l'évocation ne sert bien souvent qu'à masquer l'essentiel.


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