Philippe de Villiers : « La sécession monétaire est réalisable en huit jours »
par Catherine Segurane
jeudi 22 septembre 2011
Philippe de Villiers a fait paraître, sur l'Observatoire de l'Europe, un grand article dans lequel il s'interesse au pourquoi et au comment du retour au franc qu'il préconise.
C'est le comment qui nous interessera le plus.
Revenant sur le déroulement factuel de récentes sorties de monnaie unique, en particulier sur le divorce monétaire de la République Tchèque et de la Slovaquie, il conclut que l'opération est facile et peut se boucler en huit jours.
Ce point de vue mérite d'être nuancé. Certes, une sortie en huit jours est techniquement possible puisqu'il y en a des exemples historiques.
Mais, d'un point de vue politique, ce serait moins simple et il faudrait une négociation préalable, ne serait-ce que par corrections vis à vis des pays voisins.
Nous renvoyons donc, pour ces aspects politiques, au Plan de bataille pour sortir de l'euro si nécessaire de Jacques Sapir.
LE POURQUOI
Pourquoi faut-il sortir de l'euro ?
De Villiers nous le répête après bien d'autres : parce que l'Euroland n'est pas une zone monétaire optimale :
"Vous ne ferez jamais converger des fleuves dont les niveaux d'eaux et les débits sont trop différents, sauf à prévoir... des écluses. Et les écluses, en économie, portent un nom : ce sont les changes des monnaies ; elles s'ajustent, elles se lèvent, elles s'abaissent, elles se règlent pour réguler le débit, le volume et le niveau en fonction de l'offre et de la demande."
Mais il va plus loin quand il nous explique ce que serait une zone monétaire optimale à ses yeux :
"L'expression savante de zone monétaire optimale est un long détour de la science économique pour redécouvrir ce que la science politique connaît et décrit depuis la plus haute Antiquité : l'idée de communauté de sacrifice et de communauté de mode de vie.
Pour qu'une monnaie unique fonctionne sans exploser ou faire exploser l'espace auquel elle s'applique, il faut que soient réunies des conditions préalables qui sont les critères mêmes de la grande convergence : une vraie solidarité financière naturelle, une vraie homogénéité des préférences, une vraie mobilité des personnes, une aptitude à décider en commun, une authentique capacité à accepter des sacrifices pour aider le voisin - les Bretons aidant les Bourguignons sans problème - ou pour favoriser la réalisation des buts de l'union.
A quoi fait donc penser cette énumération ? Tout simplement aux contours d'une nation. Voilà le chaînon manquant, le "critère de convergence" omis, le tabou oublié par les eurolâtres : "Pour établir une monnaie unifiée entre plusieurs collectivités, il faut que celles-ci présentent déjà les caractères d'une nation. Tous les autres critères sont secondaires par rapport à celui-là"
LE COMMENT
Nous sommes nombreux à en avoir plus qu'assez de cet euro qui nous ruine, mais nous ne sommes pas surs qu'il soit facile d'en sortir. Nous nous rappelons tous les laborieuses circonstances du passage du franc à l'euro.
Changer de monnaie, est-ce toujours une telle galère technique ?
Non, nous répond Philippe de Villiers.
Il illustre cette réponse négative de plusieurs exemples historiques, dont les derniers sont relativemennt récents, puisqu'il s'agit des pays qui ont retrouvé une monnaie en sortant du communisme.
En particulier, quand la Tchécoslovaquie s'est scindée en deux, chacun des deux nouveaux pays a créé sa propre monnaie en quelques jours. De Villiers nous explique :
" ! Incapable de résister aux mouvements de capitaux qui menaçaient de déstabiliser leurs systèmes financiers, les deux gouvernements ont vite jugé indispensable de séparer leurs monnaies. La nouvelle a été rendue publique le mardi 2 février 1993 et l'opération n'a duré que quatre jours, du jeudi au dimanche. Le lundi 8 février, la couronne tchécoslovaque avait vécu. Les comptes en banque avaient été basculés très simplement, dans chaque pays, dans la nouvelle monnaie nationale, et on avait collé un timbre sur les billets de banque pour les identifier comme tchèques ou slovaques. Seules les petites coupures et les pièces, qui représentent 3 % de la masse monétaire, sont restées provisoirement les mêmes."