Politique fiscale ou réductions de taux d’intérêt ?
par Michel Santi
samedi 14 février 2009
Les taux d’intérêts nuls aux Etats-Unis justifient à l’évidence l’adoption de stimuli fiscaux car la politique monétaire ne bénéficie plus d’aucune ressource. Effectivement, place aux mesures expansionnistes du type injections massives de liquidités ou réductions d’impôts une fois que les mesures dites "orthodoxes" ont fait long feu...
De même est-il relativement aisé de comprendre la quasi totalité des pays du monde - où les taux sont encore loin du zéro – qui conjuguent stimuli fiscaux aux réductions de taux d’intérêt, persuadés de l’effet synergique de ces deux types d’actions et conscientes que le seul assouplissement de la politique monétaire ne suffira pas à sortir leur économie du marasme...
Par ailleurs, la stratégie consistant à ne pas adopter de stimuli fiscaux coûteux et à miser sur des réductions substantielles de taux se conçoit également. Pour autant, cette majorité de nations à travers le monde adoptant actuellement des mesures non orthodoxes généreuses et onéreuses tout en étant attentives à ne pas assouplir trop rapidement leur politique monétaire estiment-elles que les bonnes vieilles recettes traditionnelles sont inefficaces ? Pourtant, dans la conjoncture présente, nos autorités se doivent de faire usage de tous les moyens à leur disposition, y compris des mesures orthodoxes et ce même si elles doutent de leurs effets productifs.
Car, s’il est permis de douter des conséquences bénéfiques à long terme des stimuli fiscaux ( telles que l’endettement des générations futures ), nos Banques Centrales perçoivent-elles un danger quelconque à assouplir leur politique monétaire ? Il est en effet incompréhensible d’aggraver nos déficits par des réductions d’impôt dès lors qu’il reste encore des cartouches à tirer - susceptibles d’atteindre la cible souhaitée - au niveau des taux d’intérêts ! Il est vrai que la politique monétaire reste un outil nettement plus réactif et « a posteriori » que stratégique ; il est vrai aussi que les baisses de taux Américaines souvent improvisées et brouillonnes de la Réserve Fédérale US en 2008 n’ont guère favorablement impressionné les marchés...
Toutefois, répondre à ces questions - et choisir en conséquence entre réductions des taux et/ou mesures non orthodoxes - se résume en fait à répondre à une seule question : Quel niveau de stimulation souhaite-t-on insuffler à la demande agrégée ? Car pendant que les responsables économiques plaident pour une accumulation de stimuli fiscaux, nos autorités monétaires, elles, sont affolées par tant de générosité ! Il est vrai que - particulièrement en période de crise aigue -, le compromis est généralement atteint entre tenants de ces deux méthodes mais l’équilibre relatif résultant cache mal l’incompatibilité presque congénitale entre une politique fiscale expansionniste et des taux d’intérêts très bas. Facile en effet de comprendre la réserve des Banques Centrales vis-à-vis de l’aggravation des déficits publics alors qu’elles sont généralement réticentes à réduire trop brutalement leurs taux d’intérêts afin de ne pas déstabiliser les divers intervenants à l’économie et au marché...Nos Banquiers Centraux, par ailleurs nombreux à être persuadés de l’opportunisme des responsables politiques soupçonnés de n’adopter ces stimuli fiscaux que pour des considérations électorales, conserveraient-ils sciemment les taux d’intérêts à des niveaux susceptibles de limiter - au moins en partie - les dégâts causés par les mesures expansionnistes non orthodoxes ?
Et si, après tout, la lutte se déroulait à un autre niveau, c’est-à-dire au niveau des Etats ou, plus précisément, au niveau où les Etats-Unis dicteraient leur conduite à ces pays disposant encore de munitions au niveau de leur politique monétaire afin qu’ils ne réduisent pas agressivement leurs taux d’intérêts et compensent ce manque de laxisme par des mesures fiscales ? L’objectif serait-il que ce différentiel de taux en défaveur des Etats-Unis affaiblisse le Dollar dans le but de dévaluer - et donc de soulager les Etats-Unis - des actuels et futurs gigantesques déficits publics creusés par les innombrables plans de sauvetage US ?